Le PPP veut faire de son livre un «message d'outre-tombe»
Le parti de l'ex-Premier ministre Benazir Bhutto, tuée le 27 décembre dans un attentat suicide au Pakistan, a lancé mardi le livre qu'elle avait à peine achevé d'écrire en le présentant comme un message "d'outre-tombe" prônant notamment un Islam tolérant.
Des Pakistanais achètent les mémoires du leader de l'opposition tué Benazir Bhutto lors d'un lancement de livre à Islamabad. (Photos : AFP)
AFP
13 Février 2008
À 09:59
"Réconciliation : l'Islam, la démocratie et l'Occident", dans lequel la défunte leader de l'opposition semble annoncer son assassinat comme un acte inéluctable, est paru à Islamabad près de sept semaines après sa mort et à cinq jours des élections législatives et provinciales qu'elle préparait comme la seule chance de "restaurer la démocratie".
"Avant de s'éteindre, Benazir Bhutto a allumé une bougie et cette bougie c'est cette oeuvre mémorable", s'enflamme Tanvir Ahmad Khan, ancien haut responsable du ministère des Affaires étrangères quand Mme Bhutto dirigeait le pays (1988-1990 et 1993-1996).
"Ce livre sera lu dans le monde entier mais pour le peuple pakistanais et pour les Musulmans partout dans le monde, il symbolisera son appel incessant à lutter contre la dictature, les esprits moyenâgeux et la bigoterie", ajoute l'ancien diplomate.
Sherry Rehman, porte-parole du Parti du Peuple Pakistanais (PPP) que dirigeait Mme Bhutto, estime que son amie a laissé là un "profond message" de tolérance à l'adresse des fondamentalistes musulmans dont elle jurait de débarrasser le Pakistan.
Le gouvernement du Président Pervez Musharraf, qui a pris le pouvoir par un coup d'Etat il y a huit ans, a accusé un chef de tribu proche d'Al-Qaïda d'avoir commandité et fait exécuter son assassinat.
Mais selon Mme Rehman, le livre pourfend également les relations ambiguës d'Islamabad avec l'Occident. Depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, le régime de l'ancien général Musharraf est devenu l'allié-clé de Washington dans sa "guerre contre le terrorisme", après l'avoir été dans celle contre l'occupation soviétique de l'Afghanistan dans les années 1980, puis dans le soutien aux talibans dans les années 1990.
"C'est un message d'outre-tombe, elle livre de formidables arguments (...) sur la manière de transformer les société", s'émeut encore Sherry Rehman.
Mme Bhutto, la plus jeune femme à diriger un pays musulman de l'histoire contemporaine, à 35 ans seulement, se dépeint dans son livre comme l'unique recours pour une confrontation avec les islamistes, qui gagnent du terrain au Pakistan et mènent depuis des mois, en collaboration avec Al-Qaïda, une campagne d'attentats suicide extrêmement meurtrière.
Mais elle révèle aussi dans son livre qu'elle soupçonnait des hauts responsables du gouvernement de M. Musharraf et des services de renseignements pakistanais de préparer son assassinat.
Mme Bhutto avait fui huit années en exil à Londres et Dubaï pour échapper à la prison, accusée de corruption et de détournements de fonds du temps où elle était chef du gouvernement, ce qu'elle a toujours nié et dont elle avait été amnistiée par le président Musharraf peu avant son retour au pays, en octobre, dans le cadre de négociations avec le chef de l'Etat pour un futur partage du pouvoir.
Son époux, Asif Ali Zardari, qui a été emprisonné plus de 8 ans, lui, pour les mêmes accusations de corruption, a pris de facto la tête du PPP pour les élections de lundi.