Fête du Trône 2004

Lamine Diack, un sportif contre la démolition des stades

Lamine Diack, 74 ans, président de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF), s'est révélé ces derniers jours à Dakar un fervent avocat "anti-démolition" après la destruction d'un stade, où est née en partie sa renommée de sportif, au profit d'un complexe immobilier.

Lamine Diack, président de la Fédération internationale d'athlétisme. (Photo : www.unep.org)

08 Mars 2008 À 09:15

Le Stade Assane Diouf, près du centre-ville, a été démoli dans la nuit du 24 au 25 février pour construire une "Cité des affaires" appelée Kawsara, un projet qui "ne (le) séduit pas du tout", a expliqué M. Diack dans une émission hebdomadaire de la radio privée RFM.

Il s'était fait moins amène quelques jours plus tôt, fustigeant la démolition en catimini de ce stade situé dans le quartier de Reubeuss, où il est né en juin 1933.

"Je pense que ce qui vient de se faire est une hérésie", avait-il dit lors d'une conférence de presse le 27 février. "On a des problèmes d'infrastructures sportives à Dakar (...). On pensait qu'on allait refaire ce stade, mais à la place, c'est la démolition pure et simple. C'est la jeunesse qui est ainsi spoliée".

Sport et politique

Des pans entiers des murs extérieurs aux tags défraîchis soustraient du regard les ruines de tribunes du lieu où les jeunes de Reubeuss et des quartiers voisins convergeaient pour suivre matches de foot ou combats de lutte. En prenant un peu de hauteur, un triste enchevêtrement de fer et béton effondré s'offre au regard.

Lamine Diack semble d'autant plus touché que c'est à la fréquentation de ce stade, où il s'est entraîné, qu'il doit en partie sa renommée mondiale. Ex-champion d'Afrique occidentale française (AOF) en saut en longueur, ex-champion de France dans la même discipline (1958 et 1959), il fit aussi carrière dans le football (il évolua au Racing-Club de Paris) et a pratiqué du volley-ball jusqu'aux années 1960, avant d'occuper différents postes de responsabilité en sport et en politique (notamment comme député et maire de Dakar).

Alors, quand il a appris la démolition du stade, a-t-il dit sur RFM, "c'est le sportif qui a réagi" et qui a porté la campagne devant les médias et un public plus large.

Car sa bataille ne date pas d'aujourd'hui, a-t-il rappelé à Dakar, qu'il devait quitter dimanche soir pour Monaco. "On allait le détruire il y a trois ans si je ne m'étais pas interposé".

Le projet Kawsara est évoqué depuis 2004. Le Stade Assane Diouf, qui était municipal, avait alors été rétrocédé à l'Etat pour réaliser des immeubles et plateaux commerciaux avec un investisseur pakistano-soudanais pour 268 millions d'euros (176 milliards de FCFA).

Projet "bidon"
"Il se trouve que c'était bidon, il n'y avait rien", a affirmé Diack.

Rebelote en 2008. Une société jusqu'alors inconnue, assurant être promotrice du projet, se félicite de la démolition du stade, "point de départ" du chantier du même complexe immobilier. Cette fois pour un coût de 200 millions d'euros, "en partenariat avec la société chinoise de promotion immobilière Sichuan Jiahé".

La démolition, ayant suscité un tollé, a été suivie d'une confusion sur les protagonistes -réels ou supposés- de la "casse". "Il faut clarifier les choses. (...) Ce n'est pas possible! On ne peut pas continuer à faire disparaître nos installations sportives" au profit des privés, a martelé Diack.

A l'en croire, l'"affaire Assane Diouf" devrait cependant connaître un dénouement heureux. Il a affirmé avoir rencontré Karim Wade, le fils du président sénégalais qui dirige une agence nationale (Anoci) exécutant des travaux de construction et d'embellissement dans Dakar.

"Il m'a dit : 'On va reconstruire le stade'". Pour en faire un vrai "et peut-être en profiter pour l'appeler Papa Gallo Thiam", du nom d'un Sénégalais détenteur du record de France du saut en hauteur.




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