Pour réduire sa facture d'électricité et rejeter moins de gaz carbonique, un agriculteur de Terneuzen (sud) qui cultive des millions d'aubergines sous serre récupère la chaleur résiduelle et le CO2 d'une usine voisine.
Grâce à la chaleur et au CO2 d'une usine, des aubergines cultivées sous serre. (Photo : binicaise.unblog.fr)
AFP
21 Décembre 2009
À 12:32
«Nos produits sont extrêmement durables», souligne Jan van Duijn, 40 ans, en se promenant dans sa serre, une structure de verre et de métal couvrant cinq hectares où des milliers de plants d'aubergine poussent sur un lit de laine de roche, été comme hiver, sans jamais toucher la terre.
La température y est maintenue, été comme hiver, à 20 degrés grâce à des tuyaux d'eau chaude qui circulent entre les rangs de plants. Cette eau à 90 degrés provient de l'usine d'ammoniac Yara, à cinq kilomètres de là, d'où elle est amenée par des tuyaux sous-terrains après son passage dans le circuit de refroidissement.
L'eau repart ensuite, refroidie, vers l'usine.
De la même manière, du CO2 libéré lors de la fabrication d'ammoniac est injecté dans la serre pour stimuler la pousse. «C'est le principe de base de la photosynthèse, explique l'horticulteur. Les plantes le transforment en protéines en le combinant avec de l'eau et de la lumière».
La concentration de gaz carbonique y est trois fois plus élevée qu'à l'air libre, ce qui permet un rendement de deux à trois fois plus élevé, selon M. van Duijn, qui produit 2,5 millions de kilos d'aubergines par an.
Les Pays-Bas, premier exportateur de produits horticoles cultivés sous verre en Europe, comptent 10.000 hectares de serres, où poussent fleurs, plantes, légumes et fruits.
Selon l'organisation horticole LTO Glaskracht, les serres ont rejeté 5,2 mégatonnes de CO2 en 2008, soit 63% des émissions du secteur agricole. A lui seul, leur réchauffement absorbe 8% à 10% de la consommation néerlandaise de gaz naturel.
Dans la serre de M. van Duijn, qui emploie dix personnes en hiver et trente en été, la température est constamment suivie, et ajustable, par ordinateur.
Si l'usage de CO2 dans les serres est très répandu aux Pays-Bas, il est rare qu'il soit récupéré directement à la sortie d'une usine.
«C'est aussi la première fois que la chaleur résiduelle est réutilisée à grande échelle pour une initiative privée, commerciale», souligne le directeur commercial du fournisseur de l'eau chaude et du gaz carbonique WarmCO2, Jacob Limbeek.
Selon lui, le système permet une réduction de la consommation d'énergies fossiles de 90% par rapport à une serre traditionnelle, chauffée au mazout ou au gaz naturel.
«On est un peu des pionniers», sourit Jan van Duijn, tout en reconnaissant que «ce sont avant tout des considérations de coûts» qui l'ont amené à ce projet.
L'horticulteur, dont la facture d'énergie représente 20% des frais fixes contre 25% pour les serres traditionnelles, s'est accordé avec WarmCO2 sur les prix pour les quinze ans à venir.
«Ca nous donne une certaine sécurité. Nos concurrents n'ont aucune idée de ce que va être leur facture d'énergie d'un an sur l'autre, cela dépendra des prix du pétrole, du gaz et des cours de change», explique-t-il.
WarmCO2, qui fournit aussi des serres produisant des tomates et des poivrons, prévoit à terme d'alimenter 168 hectares de serres à Terneuzen.
Selon LTO, le secteur, qui expérimente aussi l'utilisation de panneaux solaires et de la géothermie, s'est engagé à réduire de 30% de ses émissions de gaz à effet de serre en 2020 par rapport à 1990.