Fête du Trône 2004

Les affiches épatent mais ne convainquent pas

"Sois belle et vote": à un mois des législatives au Liban, les deux camps rivaux s'affrontent à coups d'affiches tape-à-l'oeil et de slogans pompeux ou provocateurs, sans référence pour la plupart à un programme précis.

Législatives au Liban du 7 juin 2009 entre incertitude, tension et apaisement. (Photo : AFP)

08 Mai 2009 À 08:40

L'affiche représentant le visage d'une jolie femme et frappée du slogan, en français, "Sois belle et vote", est celle qui fait couler le plus d'encre parmi ceux qui en défendent l'originalité et d'autres qui critiquent son côté "sexiste".

"Chaque parti ou mouvement tente de prouver son poids politique plutôt que de faire parvenir un message", affirme Melhem Chaoul, sociologue spécialisé dans les médias.

Contrairement à ce qui se passe en Occident, "les politiciens au Liban n'ont pas cette obsession de convaincre les électeurs neutres ou ceux qui votent pour le camp rival, mais veulent uniquement mobiliser au maximum leurs partisans", dit M. Chaoul.

"Les campagnes médiatiques politiques en sont encore à un stade basique", ajoute-t-il.

"Certains se contentent de faire du tapage médiatique, d'autres font de la provocation ou de la prose", explique Sara Keirouz, spécialiste dans la création d'affiches.

Sur les toits des maisons, le long des autoroutes, sur les murs et même parfois sur des balcons, les affiches reflètent surtout le fossé qui, depuis les législatives de 2005, sépare la majorité parlementaire antisyrienne soutenue par Washington et Ryad et la minorité appuyée par Damas et Téhéran.

"Le Parlement est notre arme", affirme un panneau des Kataëb (les Phalanges, majorité), en réponse au coup de force du Hezbollah chiite, chef de file de la minorité, il y un an dans le secteur ouest de Beyrouth, lors d'affrontements meurtriers sans précédent depuis la fin de la guerre civile (1975-1990).

L'arsenal du Hezbollah, seul parti libanais à ne pas avoir déposé les armes après la fin de la guerre civile, est la principale cible des critiques de la majorité.

De son côté, le mouvement chiite a voulu montrer une image de rassembleur en affirmant dans l'une de ses affiches "le Liban pour tous les Libanais" et en barrant trois expressions: "Votre Liban", "Notre Liban", "Leur Liban".

"Résistez avec votre voix", lit-on sur une autre affiche, en référence au combat mené par le mouvement contre Israël.

Pour le Courant du Futur, qui a choisi de jouer sur son nom, "l'avenir est prometteur sans aucun doute", et que "Pour connaître l'avenir, il faut le construire".

Le mouvement de Michel Aoun, allié chrétien du Hezbollah, attaque le Courant du Futur également grâce à un jeu de mots en déclarant qu'il n'y a "pas d'avenir sans changement", en référence à son groupe parlementaire qui porte le nom du "bloc de la réforme et du changement".

Si la quasi-totalité des affiches tombent dans les généralités, elles se distinguent surtout par leur couleur.

Les candidats ne sont pas en effet de gauche ou de droite, mais "jaune" (Hezbollah, minorité) "vert" (Amal, minorité), "orange" (Mouvement de Michel Aoun, minorité), bleu (Courant du Futur, majorité).

Le Mouvement patriotique libre de M. Aoun interpelle même les électeurs de la sorte: "Votez pour le bon candidat, quelle que soit votre couleur", lit-on sur un panneau d'un orange vif.

Mais alors que certains citoyens admirent l'esthétique des affiches qui, pour la première fois, mettent en avant des slogans politiques plutôt que les photos des candidats, ils ne semblent pas très convaincus par le fond.

"Pour moi, les élections c'est avant tout un programme, pas des slogans sensationnalistes", affirme Rima Rassi, 23 ans, une diplômée en sociologie.

"Je ne crois pas qu'un Libanais neutre ou hésitant va voter pour tel ou tel à cause des affiches. Tout le monde a déjà choisi son camp", dit-elle.
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