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Une nouvelle étude prometteuse

La thalidomide, associée il y a un demi-siècle à de graves malformations, connaît un regain d'intérêt et apparaît aujourd'hui prometteuse pour une maladie hémorragique héréditaire rare, selon les résultats d'une étude française, publiés dimanche dans la revue «Nature Medicine».

La thalidomide est de retour, bien en comprendre les risqué. (Photo : www.legalaid60.org.uk)

05 Avril 2010 À 10:17

Ces résultats pourraient offrir aussi une source d'espoir dans le domaine des tumeurs.

«Nous avons trouvé que la thalidomide favorise la maturation des vaisseaux et serait susceptible, à ce titre, de contrecarrer les malformations vasculaires héréditaires et les tumeurs», dit à l'AFP Franck Lebrin de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm, Paris).

Le médicament a été testé aux Pays-Bas sur sept patients âgés de 48 à 75 ans atteints de formes sévères de la maladie de Rendu-Osler, une maladie héréditaire rare sans possibilité de traitement durable, qui touche environ 1 personne sur 10.000.

Chez ces patients, suivis sur 6 mois à 5 ans, l'administration orale quotidienne de 100 mg de thalidomide a réduit considérablement la fréquence et la durée des saignements de nez, et surtout, selon le chercheur, permis d'éviter les transfusions sanguines rendues nécessaires notamment par les saignements digestifs, pour pallier leur anémie.

Afin de confirmer ces résultats, «un essai est prévu à Paris sur 32 patients souffrant également d'une forme très sévère de la maladie. La moitié aura le médicament pendant six mois et l'autre le placebo, puis le groupe traité aura le placebo, et l'autre recevra la thalidomide», indique M. Lebrin.

«Les femmes en âge de procréer dans l'essai feront l'objet d'une surveillance particulière (test de grossesse)», souligne-t-il. Car les femmes enceintes ne peuvent pas prendre de thalidomide en raison du risque de malformations des membres chez l'enfant à naître, découvert il y a une cinquantaine d'années.

Témoin du regain d'intérêt pour ce médicament au passé sulfureux, la thalidomide fait l'objet de plus de 50 essais dans le monde sur des cancers solides (ainsi appelés par opposition aux cancers du sang), relève le chercheur. L'idée est de bloquer la formation des vaisseaux («angiogénèse») qui viennent nourrir la tumeur.

La thalidomide est de nos jours utilisée pour traiter la lèpre et un cancer, le myélome multiple.

La maladie de Rendu-Osler (MRO) est caractérisée par un défaut de communication entre les cellules de la paroi intérieure du tube formant le vaisseau et celles de la paroi extérieure (cellules murales). D'où une fragilité des vaisseaux malformés qui saignent au moindre traumatisme. Certains patients peuvent avoir plus de 30 saignements par semaine.

Or les chercheurs ont découvert que la thalidomide, considérée comme un simple «bloqueur» de la formation des vaisseaux, stimule en fait leur recouvrement par les cellules murales -un processus qui correspond à la maturation vasculaire. La thalidomide réduit ainsi les saignements de la MRO grâce à ses propriétés de stabilisation du réseau vasculaire.

D'après ces nouvelles données, la thalidomide entraverait par ailleurs le développement des tumeurs par le biais de cette maturation vasculaire, qui favorise l'arrivée de cellules, des lymphocytes T tueurs, capables de les détruire. Elle faciliterait également le traitement (chimothérapie, rayons), ajoute le chercheur.
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