Le Président français Nicolas Sarkozy et le Premier ministre britannique David Cameron ont été accueillis en héros jeudi en Libye, où les forces du CNT ont affirmé au même moment être entrées à Syrte, l'un des derniers bastions pro-Kadhafi.
AFP
15 Septembre 2011
À 20:33
Premiers dirigeants occidentaux à venir en Libye depuis la chute de Kadhafi, en place depuis 1969, Sarkozy et Cameron ont notamment pris un bain de foule à Benghazi (est), qui a servi de «capitale» aux rebelles pendant les six mois d'insurrection contre le régime.
Le président français a affirmé, lors d'une conférence de presse commune avec Cameron et les dirigeants du CNT à Tripoli, que Mouammar Kadhafi, en fuite depuis le 23 août, était encore «un danger» et qu'il y avait donc «un travail à terminer», le Premier ministre britannique David Cameron promettant d'aider à sa traque. «L'engagement» de l'Otan en Libye «n'est pas terminé», a ajouté le chef de l'Etat français.
«Nous devons poursuivre la mission de l'Otan jusqu'à ce que tous les civils soient protégés et jusqu'à ce que notre travail soit terminé». «Nous vous aiderons à trouver Kadhafi et à le présenter devant la justice», a renchéri le Premier ministre britannique.
Cameron a expliqué que l'Otan, qui a pris le 31 mars la tête des opérations militaires en Libye, poursuivrait sa mission tant que des villes ou régions libyennes, notamment Syrte et plusieurs oasis du Sahara, resteront sous contrôle des pro-Kadhafi.
«Nous continuerons la mission de l'Otan aussi longtemps que cela sera nécessaire sous le mandat de la résolution 1973 des Nations unies pour protéger les civils», a-t-il expliqué.
«Ce travail n'est pas encore fini. Il y a encore des parties de la Libye sous le contrôle de Kadhafi», a-t-il rappelé. «Ceux qui pensent encore que Kadhafi a encore une place au gouvernement ou dans le pays doivent se défaire de cette idée. Il n'en a aucune. Il est temps pour lui de se rendre».
Peu après ces déclarations, les forces armées du Conseil national de transition (CNT) à Misrata ont affirmé que leurs combattants étaient entrés dans Syrte, ville située à 360 kilomètres à l'est de Tripoli et 600 kilomètres à l'ouest de Benghazi.
«Nos révolutionnaires sont entrés à Syrte aujourd'hui (jeudi) par trois axes principaux», a affirmé le Conseil militaire de Misrata, la grande ville rebelle située au nord-ouest de Syrte, dans un communiqué.
«Je confirme que nos forces sont à Syrte (...) Il y a encore de la résistance mais nos combattants pourront la surmonter», a affirmé à l'AFP un porte-parole militaire de Misrata, Fathi Bachaga. «Ils nous attaquent avec des avec des mortiers de 40 et 43 mm et toutes sortes d'armes».
A Tripoli, M. Sarkozy a demandé qu'il n'y ait ni «vengeance» ni «règlements de comptes» en Libye et a appelé les pays ayant sur leur sol des Libyens recherchés à les livrer à la justice internationale.
«Nous avons dit également au CNT que c'est aux Libyens de construire l'avenir, c'est pas à nous, c'est aux Libyens de choisir leurs dirigeants», a encore dit le chef de l'Etat français.
Il a aussi souhaité que le CNT conserve son «unité», «le bien le plus précieux pour eux», et que «cette unité permette la période de transition, les prochaines élections et la prochaine Constitution».
Nicolas Sarkozy et David Cameron ont visité pendant environ une heure un hôpital de la capitale libyenne où ils ont été accueillis dans la liesse et où ils ont parlé avec des blessés.
Comme on lui demandait si les slogans enthousiastes entendus sur son parcours lui faisaient plaisir, Sarkozy a répondu : «ce n'est pas une question de plaisir, c'est extrêmement émouvant de voir les jeunes Arabes se tourner vers deux grands pays d'Occident pour leur dire merci. Ce qui prouve que l'affrontement entre l'Occident et l'Orient n'est pas du tout une fatalité».
A Benghazi, Nicolas Sarkozy a assuré croire dans une «Libye unie, pas dans une Libye divisée», tandis que David Cameron, a jugé «extraordinaire de se retrouver dans Benghazi libéré, dans une Libye libre».
«Vous avez voulu la paix, vous avez voulu la liberté, vous voulez le progrès économique, la France, la Grande Bretagne et l'Europe seront aux côtés du peuple libyen», a affirmé le président français.
«Votre ville a été une source d'inspiration pour le monde. Vous avez renversé un dictateur et choisi la liberté», a lancé à la foule le Premier ministre britannique.
Sur le plan économique, un porte-parole de David Cameron a affirmé que la Grande-Bretagne allait débloquer «environ 600 millions de livres (688 millions d'euros) d'avoirs libyens qui étaient gelés par les résolutions des Nations unies».
Quelque 12 milliards de livres (près de 14 milliards d'euros) en liquide et d'autres actifs (immobiliers, etc.) détenus par le régime du colonel Kadhafi avaient été gelés au Royaume Uni en février à la suite de résolutions.
Entre-temps, la Russie a annoncé vouloir que le Conseil de sécurité de l'Onu mette fin à la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye. Moscou, qui avait permis la mise en place de la zone d'exlusion en s'abstenant lors du vote en mars à l'ONU, a depuis vivement critiqué les forces occidentales, estimant qu'elles outrepassaient largement le mandat accordé par les Nations unies.
Dans un message diffusé mercredi soir, le colonel Kadhafi a accusé l'Otan de «terrorisme et de destructions indescriptibles à Syrte», selon la chaîne Arraï basée en Syrie qui diffuse régulièrement ses messages.
Son porte-parole Moussa Ibrahim a lui accusé sur la même chaîne les combattants du CNT d'«affamer des régions entières pour les obliger à se rendre», en allusion aux bastions pro-Kadhafi, citant en particulier Syrte et Bani Walid.