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Un vent d'espoir souffle sur le théâtre Cervantès

A l'état d'abandon depuis plusieurs décennies, le grand théâtre Cervantès de Tanger est depuis longtemps le triste symbole du recul de la vie culturelle, grande oubliée du processus de développement de la ville, une situation qui pourrait connaître un dénouement heureux grâce à des promesses de réhabilitation de ce lieu centenaire.

Le théâtre Cervantès de Tanger, un édifice culturel fondé il y a cent ans et tombé en désuétude depuis des années, fera l'objet d'une action de restauration et de réhabilitation à l'initiative de la Commune de Tanger et du consulat général d'E

28 Mars 2013 À 10:21

Oeuvre de l'architecte espagnol Diego Giménez inaugurée fin 1913, le théâtre se trouve dans un grave état de délabrement, le menaçant de ruine et, partant, la perte d'un pan de la mémoire de l'époque internationale de la ville, marquée par le métissage culturel et la cohabitation des civilisations.

A son âge d'or, le Gran Teatro de Cervantès, fondé par les riches propriétaires espagnols Manuel Pena et son épouse, Esperanza Orellana, fut le plus grand, le plus célèbre et le plus prestigieux lieu de l'art scénique en Afrique du Nord, accueillant dans son enceinte de célèbres troupes de théâtres et artistes européens et du monde arabe.

Avec ses 1.400 places réparties en fauteuils, loges, parterre et amphithéâtre en demi-cercle, un équipement technique et artistique avancé pour l'époque et une décoration raffinée aux murs et au plafond, le théâtre a vu se produire d'innombrables vedettes de la scène et de la musique, comme les Espagnoles Luisita Esteso, Ana Maria Gonzalez, la Mexicaine Irma Villa, le grand ténor Caruso et des troupes interprétant l'opéra-comique espagnol, la Zarzuela.

Le théâtre animait aussi la vie mondaine du Tanger international en accueillant de grandes soirées, fêtes de charité, bals de sociétés des différentes communautés cohabitant dans la ville, tout en abritant des conférences, réunions culturelles et meetings politiques.

La scène théâtrale marocaine doit beaucoup à ce fameux monument. Dès les années 20, la troupe artistique «El Hilal» fût créée par la Jeunesse musulmane de Tanger et donnera de nombreuses représentations dans ce théâtre, dont Othello et «Roméo et Juliette» de William Shakespeare, Saladin de Naguib Hadad et «Majnoun Leila» d'Ahmed Chawki.

C'est dire l'intérêt de remettre sur pied cette infrastructure culturelle, propriété de l'Etat espagnol, afin qu'elle puisse renouer avec son passé glorieux et continuer à jouer son rôle dans le rapprochement culturel entre le Maroc et l'Espagne et le rayonnement de la cité du Détroit.

Sur ce plan, les choses semblent enfin bouger à l'initiative du conseil de la ville de Tanger, qui, conscient de l'importance historique, artistique et architecturale de cet édifice, a entrepris des démarches auprès des interlocuteurs espagnols pour trouver un moyen de réhabiliter le théâtre et lui redonner vie.

A cet égard, le maire de Tanger, Fouad El Omari, a tenu récemment des réunions avec le consul général d'Espagne à Tanger, Arturo Reig Tapia, à l'issue desquelles les deux parties ont convenu d'adopter une «feuille de route» pour la réhabilitation du site, à commencer par l'élaboration d'une étude pour déterminer le coût du projet, en passant par la recherche des bailleurs de fonds potentiels.

Il s'agit aussi de déterminer les maîtres d'ouvrages qui s'occuperont de la restauration et de la mise à niveau des lieux, et d'établir une vision claire et intégrée pour la gestion de cet établissement culturel une fois rénové.

Les deux responsables se sont engagées à œuvrer sans relâche pour la réalisation de ce projet, dans le but de préserver une partie de la mémoire commune entre les deux pays et répondre aux attentes des acteurs culturels et amateurs de la ville du Détroit.

Dans le même sens, la commune urbaine a entrepris la réalisation d'une fiche technique de ce monument, en collaboration avec le ministère de la Culture, l'Inspection des monuments historiques et les autorités locales, et examine avec la partie espagnole la possibilité de concéder, si ce n'est la propriété, du moins la gestion de cette infrastructure culturelle à la ville.

Jusqu'à présent, rien n'est gagné, et seul l'avenir nous dira si ces engagements seront traduits dans les faits ou bien resteront-ils lettres mortes, comme d'autres initiatives dans le passé. Mais d'ores et déjà la société civile et les acteurs culturels de la ville ont salué ce regain d'intérêt pour le théâtre de Cervantès, et appellent de leurs vœux la résurrection du Gran Teatro Cervantès, un miracle qui se fait attendre. 

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