13 Août 2020 À 11:32
Jusqu’à la veille de la grave crise sanitaire mondiale qui sévit, autant la monnaie américaine demeurait la devise-clé, en raison de la puissance économique reconnue qu’elle reflète en particulier, autant l’Euro et le Yen n’en sont pas moins bien présents, également, comme importants instruments de la liquidité internationale. Certes, chacune de ces monnaies connait des difficultés qui lui sont propres et spécifiques. Aucune devise internationale n’a pu offrir une quelconque forme de relève au Dollar, un statut d’ailleurs peu recherché et encore moins convoité, rendant, de ce fait, la solution combinant les avantages des trois principales monnaies comme un cadre monétaire, à la fois réaliste et efficace, à moyen terme, et, surtout, probablement réducteur des nombreux risques planant sur le système existant.
D’une longue observation des données des changes relevées sur les grandes places financières mondiales, depuis le début du nouveau siècle, il ressort que la devise américaine vient évidemment au premier rang du classement des transactions, suivie de l’Euro, du Yen, de la Livre sterling, le Renminbi restant encore discret, ainsi que quelques autres devises régionales.
Il est nécessaire de rappeler, qu’avant de se convertir à l’Euro, la plupart des monnaies des différents Etats européens, devenus membres de cette nouvelle Zone, connurent plusieurs dévaluations successives, que ce soit le Franc, la Peseta, la Lire, l’Escudo et même le Mark allemand. Rares ont été celles qui en furent épargnées au cours de la deuxième moitié du siècle dernier. Tout retour à la situation antérieure avant l’Euro, comme cela est parfois évoqué, abusivement, lors des diverses crises ou surenchères politiques internes aux nations membres, ne peut s’effectuer, au pire que vers une sorte de chaos et, au mieux, revenir aux dix-neuf monnaies nationales qui avaient été absorbées.
Dans l’ensemble, les diverses tensions commerciales internationales ont représenté plutôt un facteur positif pour la monnaie nipponne, le Yen, qui, bien que sous-évaluée, vient en troisième rang, et largement perçue comme une valeur refuge, surtout lors des diverses crises financières et économiques.
L’augmentation des tarifs douaniers américains n’est pas sans effet sur la valeur du Yuan chinois, dans le sens d’une dépréciation de fait. Selon les modèles développés par d’importantes banques internationales d’investissement, cette tendance est appelée à se poursuivre, sur la base du niveau moyen des tarifs douaniers appliqués, notamment aux flux d’exportations de la Chine vers les États-Unis.
La monnaie cryptée a fait parler d’elle, à travers quelques expériences antérieures de «stable coins », dont celle fort médiatisée et, plutôt, décriée du « Bitcoin ». Une arrivée éventuelle annoncée, puis retardée sine die, d’un futur « Libra » (Livre), monnaie portée et organisée par un vaste groupe d’entreprises du numérique, dirigé par Facebook, est encore au stade de projet. La finalisation de ce dernier requiert de lever d’importants handicaps institutionnels et juridiques.
En dépit d’une diminution généralisée du contrôle des changes de la dernière période à travers le monde, le cours d’une devise continue de se jouer, encore jusqu’ici, en fonction de l’importance du poids considérable des relations financières que celle-ci permet et facilite. La monnaie américaine demeure la devise-clé, en raison de la puissance, également sécuritaire, qu’elle incarne, l’Euro et le Yen, demeurant relativement incontournables, à leur tour, tant sur les marchés qu’au niveau des réserves monétaires de plusieurs pays. Certes, chacune de ces devises-clés enregistre une évolution qui lui est particulière.
Cependant, il est notoire de constater qu’aucune devise internationale n’ait pu offrir, jusqu’ici, une quelconque forme de relève au Dollar, un statut paradoxalement devenu peu attirant, tant sont lourdes les contraintes et obligations qu’il impose. De ce fait, notamment, la solution, combinant les avantages des trois principales devises internationales, tend à devenir à moyen terme un cadre monétaire réaliste et efficace et, surtout, atténuant l’ampleur des divers risques planant sur l’ordre existant. Une configuration monétaire internationale du genre serait, aussi, de nature à amortir les effets d’un risque global et réel pesant sur les divers échanges de biens et services.
Entre une concurrence apparente à la monnaie américaine exercée par l’Euro, une sous-évaluation systématique du Yen et une encore timide internationalisation du Renminbi chinois, un système monétaire, reconfiguré au sortir de la pandémie en cours, doit se soucier des nouvelles réalités qui ont fait leur apparition, quelque sept décennies après la Conférence de Bretton Woods. Le monde a enregistré, depuis, une forte croissance mais inégale des revenus, une divergence prononcée des politiques monétaires et budgétaires des nations industrielles et émergentes et des liquidités internationales limitées, rendant quasi caducs des accords conclus naguère.
Nonobstant une place négociable et évolutive de la monnaie cryptée dans un ensemble monétaire appelé à enregistrer des mutations, une forme de répartition tripartite Dollar-Euro-Yen semble pouvoir offrir certains avantages par rapport à une monnaie dominante unique. Ceci permettrait, notamment aux liquidités créées dans une Zone, de pouvoir être absorbées dans une autre, favorisant un réel échange de devises et, surtout, un possible arbitrage entre taux avec moins de risques, notamment de bulles financières ou immobilières que par le passé.