30 Juillet 2020 À 10:41
Le constructeur automobile français Renault a subi au premier semestre la perte nette la plus lourde de son histoire, à 7,3 milliards d'euros, plombé par son partenaire japonais Nissan et la crise sanitaire.
Le groupe, déjà en difficulté avant la pandémie de coronavirus, et qui avait annoncé fin mai 15.000 suppressions d'emplois dans le monde (dont 4.600 en France), a indiqué qu'il renonçait à toute prévision de résultat financier pour 2020 face aux incertitudes liées à la pandémie de Covid-19.
"La situation est sans précédent, elle n'est pas sans appel", a commenté le nouveau directeur général, Luca de Meo, qui a pris ses fonctions au début du mois. "J'ai toute confiance en la capacité du groupe à rebondir", a-t-il ajouté.
"La crise sanitaire que nous vivons actuellement a fortement impacté les résultats du groupe sur le premier semestre et est venue s'ajouter à nos difficultés préexistantes", a expliqué la directrice générale adjointe Clotilde Delbos.
La perte historique s'explique principalement par la contribution du constructeur automobile Nissan, dont Renault possède 43% du capital. Il a pénalisé le groupe au losange à hauteur de 4,8 milliards d'euros.
Ces chiffres contrastent avec ceux du rival français PSA (Peugeot, Citroën) qui a réussi à gagner de l'argent au premier semestre malgré la crise, avec un bénéfice net de 595 millions d'euros.
Mais Renault (qui regroupe aussi les marques Dacia, Lada, Alpine et Samsung Motors) souffre de surcapacités de production au niveau mondial. Il a donc été particulièrement frappé par la chute du marché liée à la crise sanitaire.
"Nous touchons en ce moment le point bas d'une courbe négative qui a démarré il y a plusieurs années", a déclaré M. de Meo, lors d'une conférence avec les analystes, en référence à la course aux volumes attribuée à l'ancien patron Carlos Ghosn, déchu après avoir été interpelé au Japon pour des malversations présumées et qui s'est réfugié au Liban.
"Nous allons transformer tout le système des volumes vers la valeur", a expliqué M. de Meo, en annonçant "des temps meilleurs à la fin d'une route sinueuse", soulignant qu'il voulait investir "sur les segments de marchés en croissance et plus rentables" et annonçant un renouveau dans le design des modèles.
Il a souligné les points forts du plan produit de l'entreprise, louant la qualité des nouveaux modèles hybrides E-TECH et de la nouvelle plateforme électrique de l'alliance avec Nissan et Mitsubishi, au top de l'industrie selon lui.
Le prochain plan stratégique du groupe, qui sera annoncé en janvier prochain, s'étalera sur six ou sept ans. Il s'agira à la fois de réduire les coûts et de préparer la relance. "Les efforts pour alléger la compagnie doivent aussi nourrir le développement de notre potentiel futur", a-t-il dit.
"Nous ne sommes pas naïfs et nous savons qu'un redressement prend du temps", a estimé Mme Delbos, tout en espérant déjà du mieux sur la seconde partie de l'année.
Sur les six premiers mois de l'année, le chiffre d'affaires a plongé de 34,3%, à 18,4 milliards d'euros.
La marge opérationnelle est tombée nettement dans le rouge, à -1,2 milliard d'euros. Renault estime à 1,8 milliard l'impact négatif de la crise sanitaire. Cette marge était positive de 1,7 milliard d'euros au premier semestre 2019.
Le constructeur a annoncé des dépréciations d'actifs pour 445 millions d'euros, afin de prendre en compte des "hypothèses de volume revues" à la baisse "pour certains véhicules", ainsi que des provisions pour charges de restructuration pour 166 millions d'euros "principalement liées au plan de départs anticipés en France".
Enfin, l'échec de la stratégie du groupe en Chine est également acté dans les comptes avec 153 millions d'euros de moins-value de cession dans ce pays, une charge liée à la cession des parts de Renault dans sa filiale commune avec Dongfeng Motor Corporation. Renault avait annoncé qu'il abandonnait la vente de voitures à motorisation thermique en Chine pour se concentrer sur les utilitaires et les véhicules électriques.
Ces charges se reflètent dans la perte d'exploitation qui atteint 2 milliards d'euros, contre un bénéfice de 1,5 milliard l'an dernier sur la même période.