19 Novembre 2021 À 18:53
Face à cette accélération du rythme de l’évolution des modes de vie des sociétés humaines, plusieurs nouveaux défis se dressent de plus en plus avec acuité et de plus en plus alarmants quant au devenir de l’Homme sur notre planète Terre ! Des défis écologiques et environnementaux, des défis de ressources naturelles, des défis sociaux, des défis de modèles de civilisations humaines ! Ces défis ne sont certes pas insurmontables pour l’Homme. Celui-ci a toujours excellé dans la recherche de solutions à travers les innovations technologiques et conceptuelles de la vie en société dès qu’il est mis sous pression. Le genre humain devient très créatif quand il sent et prend conscience des menaces qui le guettent.
C’est cette caractéristique singulière de l’Homme qui nous donne de l’optimisme pour dire qu’il pourra relever tous ces défis. L’instinct de défense et de survie crée un pouvoir miraculeux chez l’Homme par la constante mise en éveil de son intelligence dans la recherche de solutions aux défis qu’il affronte, quelle que soit la durée du temps nécessaire pour y aboutir. Ainsi, une inspiration de prévision à l’horizon de l’année 2035, soit sur une décennie et demie, est à la fois une durée courte et longue.r>• Longue, au regard de la vitesse de l’évolution à effets multiplicateurs des modes de vie de toutes les sociétés de ce monde. Avant, les transformations étaient plus localisées, se propageaient à un rythme moins soutenu. Aujourd’hui, elles touchent la majeure partie du monde avec un rythme de plus en plus accéléré.r>• Courte, comparée à la période du siècle qui s’achève, 1935-2035, et même à celle de la genèse de la révolution industrielle du 19e siècle, placée sur le segment de l’histoire de la civilisation humaine.r>Néanmoins, l’exercice voudrait la description de ce que nous inspire une date future, disons à l’horizon 2035 ! Aussi, on ne peut pas occulter les grands défis auxquels l’Humanité est actuellement confrontée, et auxquels elle le sera davantage demain et après-demain. L’impact de ces défis transversaux à l’échelle humaine sera déterminant, directement ou indirectement, sur la vie quotidienne de tout un chacun sur cette planète.r>Personne ne pourra admettre qu’il est toujours possible de vivre dans un ilot de richesse au sein d’un océan de pauvreté, ni croire qu’un accident du style de Tchernobyl ne touchera que la localité environnante. Les retombées radioactives ne reconnaissent pas les frontières, et n’ont guère besoin de visa pour pénétrer l’espace aérien d’autres pays. Le monde est unique, globalisé environnementalement, sociétalement et économiquement. Ce premier postulat de notre ère sera une réalité et une certitude à l’horizon 2035.
I. Les grands défis à relever
A. La population mondialer>Aujourd’hui, la population mondiale s’élève à 7,8 milliards d’humains, et atteindra 8,5 milliards en l’an 2035. Cette population est inégalement répartie sur la planète, d’une part, et d’autre part elle se caractérise par une grande dispersion de l’indice de fécondité. Cette évolution pose des problèmes socioéconomiques liés au vieillissement de la population dans certaines régions (les plus riches) et un surpeuplement dans d’autres régions. Cette problématique est exacerbée par l’implosion des tensions migratoires dues aux guerres, aux conséquences climatiques, aux fuites des systèmes dictatoriaux et, inévitablement, à la montée en puissance chez les pays nantis du rejet épidermique des flux migratoires.r>Enfin, sans sombrer dans un pessimisme malthusien, la population mondiale a besoin d’être nourrie convenablement (sans parler des poches de famine caractérisant encore certaines régions du monde), tout en sauvegardant l’empreinte écologique totale de la croissance démographique. La population est certes une richesse en soi quand elle est productive, mais devient une charge pour l’humanité quand elle participe à réduire la bio-capacité disponible par tête. Ainsi, à titre d’exemple, en 2012 l’empreinte écologique de l’humanité était estimée à 20 milliards d’hectares globaux, soit une moyenne de 2,8 HaG par personne, alors que la bio-capacité de la Terre se limitait à 12,2 milliards d’HaG. Ceci implique une surexploitation écologique de plus de 60%. Il est certain que les améliorations apportées par les nouvelles technologies agricoles par l’augmentation des rendements moyens à l’hectare atténuent ce risque de surexploitation des terres cultivées. Mais il n’en demeure pas moins que l’augmentation de la population humaine (environ 90 millions par an) et la surconsommation des pays riches affaiblissent sensiblement les impacts positifs.
B. Le défi énergétique
La consommation de l’énergie globale de l’humanité augmente de manière régulière. Celle-ci a enregistré un taux de croissance de 1,33% en 2019, soit une énergie finale consommée dans le monde de 418 Exajoules (1 EJ = 1.018 J), alors qu’elle n’était qu’à 194 Exajoules en 1973 ! Le taux moyen de la croissance de la consommation énergétique s’élève à 4,5% par an.r>La production mondiale de l’énergie selon les études de BP s’élevait à 556,6 EJ en 2020. Cette production est ventilée par catégorie d’énergie comme suit :
Les besoins en énergie de l’humanité sont en constante augmentation, due à la croissance de la population en valeur absolue, mais surtout au changement de mode de vie d’une large part de la population mondiale. En dépit des grandes mutations constatées tout au long des dernières décennies en matière de diversification et d’amélioration dans la production énergétique, la problématique demeure entière à l’heure actuelle. La complexité de cette problématique est qu’elle est à multiples variantes, quantitatives d’abord, qualitatives ensuite, et enfin environnementales.r>L’optimisation de la production énergétique cherchant à satisfaire convenablement toutes les variantes est difficilement atteignable, tant que la demande croît au rythme actuel. Le changement de mode de consommation, voire de modèle de société est probablement l’une des options pour limiter cette inexorable croissance de la consommation, mais demeure difficile à appliquer et demandera un long délai dans sa mise en œuvre !r>Enfin, les réserves mondiales prouvées d’énergie fossile ont été estimées par BP et l’association nucléaire mondiale à 1.014 milliards de tonnes équivalent pétrole. Au rythme de la production actuelle, ces réserves couvriront 84 ans de besoins en moyenne, toutes catégories confondues (53 ans pour le pétrole). Ainsi, l’équation énergétique est complexe, une consommation qui augmente, des besoins qui évoluent avec l’évolution du mode de vie, des ressources rares et épuisables et une contrainte écologique qui s’impose avec acuité pour la survie de la terre, fait que sa solution devient urgente !
C. Le défi de l’eaur>Les plus grandes civilisations se sont développées aux pourtours de l’eau. Les gisements d’eau ont toujours attiré l’Homme pour y prospérer et se construire en communauté, sociétés et civilisations. Aujourd’hui encore, l’eau reste une ressource très convoitée et attise les tensions entre des pays qui partagent le même fleuve, dont les enjeux géopolitiques peuvent conduire au déclenchement de guerres.r>Paradoxalement, l’eau de mer recouvre 71% de la surface de la Terre à travers les océans, en revanche l’eau douce a toujours été une ressource rare qui ne représente que 2,5% de l’eau sur terre (97,5% en eau de mer). En outre, cette eau douce si rare est inégalement répartie, ou inaccessible. En effet, 70% des réserves d’eau douce sur terre est retenue sous forme de neige ou de glaciers, 29,5% en eaux souterraines, et seulement 0,5% en eaux de surface. La consommation mondiale d’eau a doublé en 40 ans, ce qui laisse présager des risques de pénurie, aggravée par les effets de pollution induits par les rejets industriels. Cette consommation est attribuée à hauteur de 70% à l’agriculture, 20% à l’industrie et seulement 10% aux ménages. Cependant, la consommation de l’eau est très inégalitaire à travers le monde. r>À titre d’exemple, un habitant des États-Unis d’Amérique consomme 300 litres par jour, celui d’Europe 200 litres par jour, alors qu’un habitant des pays en voie de développement ne consomme qu’une dizaine de litres par jour ! Ainsi, cette double inégalité dans la répartition naturelle des gisements d’eau et de sa consommation à travers le monde justifie que l’eau soit qualifiée d’Or bleu. Déjà aujourd’hui, 40% de la population mondiale souffre de pénurie d’eau, et 2,4 milliards de personnes ne disposent pas de système d’assainissement de base. C’est dire que l’enjeu de l’eau est un véritable défi que l’humanité doit affronter avec de lourdes conséquences sur la santé, voire la vie.
II. Espérances à l’horizon de l’an 2035
L’Homme est par nature un être intelligent, et l’intelligence humaine est composée de plusieurs aptitudes, notamment cognitives, qui lui confèrent une grande capacité d’adaptation et une créativité exceptionnelle quand les conditions de sa vie sont soumises aux contraintes et aux pressions exogènes. r>Cette intelligence se développe constamment chez l’Homme, qui capitalise les connaissances et le savoir transmis et acquis par l’accumulation historique, et qui développe ce capital humain d’intelligences multiples en adaptation avec les éléments de son propre environnement.r>Cette faculté propre à l’Homme, unique dans sa puissance et ses variantes par rapport à tous les êtres vivants sur notre planète, nous permet d’entrevoir de grandes espérances à relever tous les défis, et particulièrement les trois principaux défis énumérés ci-dessus.
A. Démographie, population et alimentationr>Déjà à la fin du 18e siècle, Thomas Malthus (1766-1834) annonçait une thèse selon laquelle il y a une asymétrie entre la croissance démographique et la croissance de la production des ressources. r>La population augmente selon un rythme géométrique et la production selon une croissance arithmétique. En 1850, la population mondiale n’était que de 1,2 à 1,4 milliard de personnes, comparée à celle d’aujourd’hui de 7,8 milliards, on est bien loin de cette thèse qui aurait décimé 80% de la population de la planète !r>Or l’intelligence humaine a non seulement assuré la nourriture pour la majorité de la population mondiale, mais également en très grande abondance pour une partie. Si Thomas Malthus savait que l’Homme pouvait produire en hors-sol et multiplier les rendements par des apports techniques et fertilisants, il n’aurait jamais conçu sa doctrine, et aurait considéré que l’Homme est d’abord une richesse avant d’être une simple bouche à nourrir.r>Les innovations techniques et technologiques en matière de production des ressources foisonnent, allant du développement des fertilisants, à la sélection des semences, en passant par la production en hors-sol, marine, et enfin des programmes de lutte contre la désertification, la régression et la dégradation des terres arables. L’intelligence humaine finira de nous étonner sur ce sujet quand elle aura associé la maîtrise de l’énergie et de l’eau. De grandes perspectives d’innovation seront bien là en l’an 2035 pour assurer la sécurité alimentaire de la majeure partie de la population mondiale.
B. Les énergies renouvelables et les espérances énergétiquesr>Par définition, les énergies renouvelables sont inépuisables, et l’estimation de leur potentiel se mesure par rapport aux quantités de flux énergétique que peut fournir chaque type d’énergie renouvelable. L’essentiel à retenir est que les espérances humaines en matière énergétique résident dans cette typologie variée des énergies renouvelables, qui aujourd’hui ne représentent que 5 à 6% de la consommation mondiale.r>La recherche-développement se poursuit à grande vitesse pour inverser les proportions et permettre la mise en place d’une politique universelle de réduction des conditions de réchauffement de la planète, dont l’énergie est un facteur déterminant.
La typologie des énergies renouvelables est relativement variée, ce qui offre autant de gisements à développer en dépit des limites et des contraintes afférentes à chaque nature d’énergie renouvelable, notamment :
C’est dire que les variantes d’énergie renouvelable sont bien là, reste à l’intelligence humaine à définir les contraintes liées à leurs conditions d’exploitation. L’Homme nourrit de grandes espérances sur l’une d’elles, l’énergie solaire !r>Depuis plus de 4,5 milliards d’années, notre système solaire s’alimente de cette fabuleuse énergie propulsée par le Soleil. Notre planète terre est abondamment arrosée par cette énergie chaque jour, estimée à 1 kW/m². Un potentiel hors mesure au regard de la consommation mondiale actuelle d’énergie. Ce potentiel demeure exceptionnel et même si nous limitons l’exploitation à quelques espaces à forte exposition (déserts) aux rayons solaires, les besoins de l’humanité seront largement couverts.r>À titre d’exemple, la couverture de 0,3% des 40 millions de km² de déserts et autres espaces appropriés suffirait pour assurer la couverture des besoins d’énergie électrique de la planète de 2009. Or la technologie de l’exploitation de l’énergie solaire avance chaque jour. En moins de dix ans, le coût de production du kWh solaire a été divisé par 3, et les perspectives sont très prometteuses pour l’an 2035 ! Le coût devra être en dessous de celui des énergies classiques.
C. L’eau, source de vie
Les transformations des modes de vie d’une grande partie de la population mondiale, l’urbanisation accrue et une démographie galopante font que les besoins en eau doivent connaître une croissance soutenue. Deux actions en parallèle sont nécessaires pour l’humanité, d’une part, observer une politique universelle de l’économie des ressources hydriques sur terre et, d’autre part, innover dans la recherche pour la production de l’eau douce.r>Concernant l’économie de l’eau, les méthodes d’irrigation par système gravitaire sont à remplacer par des méthodes moins consommatrices d’eau pour l’irrigation. Plus de 70% de la consommation d’eau est accaparée par l’agriculture, dont certains produits sont trop gourmands en eau, comme le montre le tableau suivant :
Cette denrée vitale pour l’Homme est à appréhender dans la logique de sa survie plus que de celle de son confort. Aussi, toute son intelligence sera focalisée sur comment produire de l’eau là où il y a pénurie et comment détourner l’eau de là où elle est abondante vers les régions désertiques. Pour la production de l’eau, deux grandes espérances se profilent, dont l’une est déjà en phase de décollage. Le dessalement de l’eau de mer et les techniques de séparation des éléments de l’air.r>Les 2/3 de la surface de la planète terre sont couverts d’eau de mer salée. Les progrès techniques constatés dans le processus de dessalement sont prodigieux et l’avenir de la recherche-développement visant la réduction des coûts du mètre cube d’eau dessalé laisse présager des résultats forts encourageants. Actuellement, en 2020, plus de 100 millions de mètres cubes d’eau par jour sont dessalés dans le monde.r>C’est dire que la technologie est éprouvée et qu’à l’échelle humaine, on est à peine aux balbutiements des nouvelles techniques de la production de l’eau. La combinaison des techniques de dessalement par osmose inverse avec l’énergie solaire ou éolienne retiendra l’attention de l’intelligence humaine pour aboutir à un coût de production du mètre cube dessalé au même prix, voire moins cher que le coût du mètre cube de l’eau de surface !r>Enfin, sans verser dans l’esprit de science-fiction de Jules Verne (1828-1905), l’Homme devra être en mesure de produire de l’eau à partir d’une ressource très abondante, l’air. L’air est un mélange gazeux constitué de 78% d’azote, de 21% d’oxygène, 1% d’Argon et d’autres gaz (dioxyde de carbone, de la vapeur d’eau, etc.). La vapeur d’eau représente entre 0,1% et 4% de la troposphère.r>L’atmosphère est chargée de vapeur d’eau provenant de l’évaporation de l’eau des océans et des surfaces, et de l’évapotranspiration des plantes. L’atmosphère est très riche en eau, et selon les trois états, gazeux, liquide et solide. Les techniques de captage de ces vapeurs doivent connaître des développements et des progrès techniques à la faveur de l’évolution des techniques de séparation des éléments de l’air et des techniques de captage de la vapeur d’eau dans l’atmosphère.r>Ainsi, l’optimisme reste de mise à l’horizon 2035. Bien d’autres défis sont également à relever, allant de la lutte contre le racisme, des inégalités des richesses et des sexes, de l’éducation et de la santé pour tous, etc., en passant par les conséquences désastreuses du réchauffement climatique, pour aboutir au grand défi consistant à placer l’Homme au cœur de toutes les préoccupations humaines et à le considérer comme l’ultime richesse de cette planète
Par M’Fadel El Halaïssi, directeur général délégué Bank Of Africa