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Addictions : un rapport du CESE tire la sonnette d’alarme

Le rapport du CESE sur le phénomène des addictions révèle des conclusions alarmantes. Réalisé dans le cadre d’une auto-saisine et adopté le 29 décembre dernier, le document souligne notamment que les addictions ne sont pas encore suffisamment reconnues, ne sont pas prises en charge par les organismes de protection sociale et ne sont pas traitées en tant que maladies.

03 Janvier 2022 À 16:51

«Préoccupants», c’est ainsi que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) décrit les constats mis au jour par son étude sur le phénomène des addictions au Maroc. Le rapport du CESE, réalisé dans le cadre d’une auto-saisine et adopté le 29 décembre dernier, souligne que les addictions ne sont pas encore suffisamment reconnues, ni effectivement prises en charge par les organismes de protection sociale, ni traitées en tant que maladies, alors qu’elles sont définies comme telles par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et à ce titre éligibles aux soins. Dans ses conclusions, le rapport relève également que les biens et services licites à fort potentiel addictif représentent un volume d’affaire de l’ordre de 3% du PIB (plus de 30 milliards de DH) et pèsent de plus de 9% dans les recettes fiscales de l’État. Le document préconise ainsi qu’une part substantielle et pérenne de ces revenus soit affectée à la prévention et aux soins contre les troubles addictifs. Sur un autre registre, le rapport s’attarde sur les différentes manifestations du phénomène de l’addiction qu’il qualifie de multiforme. D’après des données datant de 2005, on estime l’usage des substances psychoactives à 4,1%, l’abus et la dépendance aux drogues à près de 3%, l’abus de l’alcool à 2% et la dépendance alcoolique à 1,4%. Une étude régionale de 2016 estimait à 18.500 les personnes qui s’injectent des drogues au Maroc, avec des prévalences élevées du VIH (11,4%) et de l’Hépatite C (57%).

Par ailleurs, 6 millions de personnes fument au Maroc, dont 5,4 millions d’adultes et un demi-million de mineurs de moins de 18 ans. D’autres données sont révélées également par ce rapport. Selon le même document, 15 milliards de cigarettes sont consommées chaque année, avec des teneurs en nicotine et en substances toxiques supérieures aux produits autorisés en Europe et 35,6% de la population sont exposées au tabagisme. L’usage des substances psychoactives auprès des adolescents scolarisés n’est pas moins alarmant, selon les dernières enquêtes en la matière menées par le ministère de la Santé, avec une prévalence de 9% au tabac. Il y a lieu de relever que 7,9% des élèves âgés de 13 à 17 ans sont des fumeurs, dont 63,3% ont commencé avant l’âge de 14 ans, 9% disent avoir consommé au moins une fois du cannabis au cours de leur vie, 13,3% ont expérimenté la consommation de l’alcool et 5% ont expérimenté la consommation des psychotropes. Quant à la prévalence de la cocaïne durant la vie, elle est estimée à 1,4%. Par ailleurs et s’agissant des autres comportements addictifs, le rapport évoque le jeu d’argent. Selon les estimations des opérateurs de jeux, 2,8 à 3,3 millions de personnes pratiquent le jeu d’argent au Maroc, dont 40% sont considérés comme des joueurs à risques excessifs.

En outre, on apprend que l’usage pathologique des écrans, des jeux vidéo et d'internet commence à se développer dans notre pays, bien que ces problématiques restent actuellement ignorées au niveau de notre santé publique. En effet, une étude épidémiologique effectuée par un cabinet privé en 2020 sur un échantillon de 800 adolescents âgés de 13 à 19 ans à Casablanca révèle que 40% ont un usage problématique d'internet et environ 8% sont en situation d’addiction. Notons que malgré l’existence d’une stratégie nationale de lutte contre les addictions et les avancées réalisées par le Royaume en comparaison avec la région MENA, la réponse collective demeure limitée et les politiques publiques demeurent insuffisantes, dominées par une approche répressive, fondée sur un cadre légal désuet et non protecteur. En effet, la lutte contre les addictions se confond encore trop avec la lutte contre les drogues. Tandis que les addictions aux comportements sans substance – notamment les jeux d’argent, les jeux vidéo, la cyberdépendance, les achats compulsifs – demeurent hors du champ des politiques de prévention et de prise en charge. Le pays dispose de seulement 18 structures d’addictologie, avec 15 centres ambulatoires, dont 5 en capacité d’assurer un traitement de substitution aux opiacés (TSO) et 3 services résidentiels au niveau des Centres hospitaliers universitaires de Rabat, Casablanca et Fès. On relève également une pénurie en ressources humaines, avec seulement 64 médecins généralistes ou psychiatres formés en addictologie.r> 

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