Culture

«Cinémas du Maroc» : Une initiative du photographe François Beaurain en faveur d'un patrimoine menacé

Cinéma Lutétia Casablanca

26 Juillet 2022 À 14:05

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Plus qu'un jour pour voir l’exposition Cinémas du Maroc de François Beaurain à Fès. Les photographies présentées jusqu’au 27 juillet dans le hall de l’Institut français mettent en valeur un trésor méconnu et menacé. Les salles obscures nationales représentent un riche patrimoine représentatif de toutes les décennies et de nombreux mouvements architecturaux du XXe siècle. «Une telle diversité et un tel état de conservation sont rares. Au contraire de nombreux pays où les salles mono-écran ont été transformées en multiplexes, les cinémas du Royaume ont gardé leur architecture et leur cachet», indique l’IF de Fès. Néanmoins, ce patrimoine est menacé. De 240 salles en activité dans les années 80, il n'en reste plus qu'une vingtaine environ. Pour beaucoup en difficulté financière, ces salles souffrent aujourd'hui d'un manque d'entretien et se dégradent vite. L'exposition «Cinémas du Maroc» a pour objectif de sensibiliser l'opinion publique pour la préservation de ce patrimoine. Cette exposition est un avant-goût du livre-photo de François Beaurain «Cinémas du Maroc, lumière sur les salles obscures du Royaume» paru en 2021 aux éditions La Croisée des chemins.

Cet ouvrage est une invitation à découvrir la diversité et l’histoire d'un patrimoine exceptionnel. «C’est avant tout un livre-photo, mais qui se veut également, à son échelle, le témoin d’une nostalgie, de l’amour que les Marocains ont eu et ont encore pour leurs salles. La parole y est donc souvent donnée à ceux qui les ont connues du temps de leur âge d’or», précise François Beaurain dans l’introduction de son livre. Le récit est illustré par de nombreux articles de presse ou d’extraits de livres, mais aussi par des interviews de professionnels (cinéastes et exploitants) afin de témoigner et de faire revivre ces cinémas. Selon Craig Buckley, professeur adjoint d’histoire de l’art à l’université de Yale, les photographies de Beaurain attirent l’attention sur l’extraordinaire diversité des théâtres au Maroc aujourd’hui. «Très peu de pays dans le monde ont un éventail aussi large de cinémas de différents types et de différents millésimes. Tout cinéma que l’on peut voir dans ce livre en ruine ne fait qu’ajouter du poids à ceux qui continuent d’exister.

La survie des cinémas marocains n’est pas accidentelle. Chacun témoigne du dévouement, du soin et du travail des familles qui ont gardé leurs portes ouvertes, des projectionnistes, des ouvreuses et des gardiens qui les maintiennent en activité, et du public qui continue à leur rendre visite». Et de préciser que les cinémas du Maroc sont des lieux de mémoire. Si ces espaces de rassemblement cinématographique disparaissent, il en va de même pour un pan d’une culture. La genèse de ce projet remonte au mois de mars 2018, quand François Beaurain se rendait à Meknès pour une séance photo. «Connaissant mal la ville, on m’avait fixé rendez-vous “devant le Caméra” sans me donner plus d’explications. Je me suis donc laissé guider par mon GPS jusqu’à ce navire aux dimensions impressionnantes qui semblait sorti tout droit d’une autre époque.

Je me revois devant la vitrine regardant ces posters de films datant d’il y a vingt ou trente ans, ou encore cette maquette de salle d’un autre âge. Était-ce un musée ou un cinéma fantôme échappé de mon imagination ?…», écrit le photographe dans l’introduction de son livre. Piqué au vif par cette première visite, l’artiste s’est rendu quelques jours plus tard au Royal puis au Paradise à Rabat, retrouvant à chaque fois ce charme désuet des édifices figés dans le temps. Puis, pendant deux ans, il s’est adonné à la chasse aux cinémas, ville après ville, de manière exhaustive, ne négligeant aucune salle, quel que soit son aspect ou son état. En tout, ce sont 200 cinémas qui ont été identifiés, dont une centaine, photographiés.r> 

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