Économie

La hausse de la dette publique au Maroc affecterait l’arrivée des IDE

Dans une nouvelle étude, le groupe Crédit Agricole France table sur une accélération de la croissance du Maroc de 3,5% en 2023, après moins de 1% cette année. Ce redressement reste, toutefois, tributaire de de trois facteurs essentiels : le rebond espéré du secteur agricole, l’intensité de la crise chez les partenaires européens et enfin les évolutions du prix des importations. En attendant, les déséquilibres macro-économiques restent relativement contenus. Des tensions monétaires pourraient ressurgir en cas de dérapage des déficits mais la nécessité d’une nouvelle aide du FMI semble peu probable. Mais attention à la hausse des dettes publique et extérieure qui pourrait affecter l’arrivée des IDE et renchérir les coûts de refinancement.

La dette extérieure est au-delà du seuil de surendettement de 150% des exportations à 180%, selon les estimations du groupe.

16 Octobre 2022 À 08:33

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Le groupe Crédit Agricole France vient de publier une étude sur la situation macroéconomique du Maroc et ses perspectives de croissance. Après une décélération attendue en 2022 à moins de 1%, l’économie marocaine devra rebondir de 3,5% l’année prochaine. Cependant, précisent les experts du groupe français, ce redressement va dépendre de trois facteurs essentiels : le rebond espéré du secteur agricole, l’intensité de la crise chez les trois partenaires européens : Espagne, France et Italie et, enfin, les évolutions du prix des importations. Déjà en 2022, l’économie a souffert de la forte récession agricole (-12%) et de la crise qui se profile dans les pays partenaires d’Europe du Sud. Le redressement du tourisme, qui représente 8% du PIB et qui devrait être multiplié par plus de deux en 2022, celui de l’industrie automobile et aéronautique et celui du BTP ne suffisent pas à atténuer la crise agricole et les effets de l’inflation.

De plus, la hausse du coût de l’énergie et des céréales importées ne sera que partiellement compensée par les recettes du tourisme et des transferts des Marocains résidant à l’étranger (+37% à 7% du PIB). «Le déficit commercial des biens et services et le déficit courant devraient donc se creuser à, respectivement, 22% et 5,9% du PIB en 2022», estiment les économistes du groupe. Concernant la politique monétaire de Bank Al-Maghrib, celle-ci reste très articulée pour éviter des tensions de change. «Le régime de change fixe (à plus ou moins 5%) au panier eurodollar reste donc solide, malgré une baisse des réserves en devises à six mois d’importations retrouvant ainsi le niveau de 2020 avant l’aide de 3 milliards de dollars du FMI», détaillent-ils. Selon eux, les crises récentes ont par ailleurs joué un rôle de frein à une évolution du régime de change vers plus de flexibilité. Pour ce qui est de l’inflation qui a été très modérée grâce à une politique monétaire réactive, ce risque macro-économique se matérialise cette année. «L’inflation dérape à 8% en août (13% et 14% sur les transports et l’alimentaire). Elle devrait atteindre 6% en moyenne cette année.

Cette situation exceptionnelle a obligé la Banque centrale à augmenter de 0,5% à 2% son taux directeur. Un resserrement modéré, mais volontaire, pour un pays qui n’avait pas augmenté ses taux depuis quatorze ans», indique le groupe. Ce dernier précise que le taux d’intérêt réel reste négatif, une politique assez «accommodante» pour ne pas affecter la croissance du PIB déjà fortement déprimée cette année par l’aléa climatique. «L’évolution macro-économique la plus négative issue de ces crises passées est sans aucun doute la hausse des dettes publique et extérieure au-delà des seuils de surendettement et leur détérioration à nouveau en 2022. Certes, cette dérive est constatée partout ailleurs dans le monde, qu’il soit développé ou émergent.

Mais il peut affecter, dans le cas du Maroc, l’arrivée des Investissements directs étrangers (IDE) et renchérir les coûts de refinancement de ces dettes», alertent les experts de Crédit Agricole France. En effet, la dette extérieure est au-delà du seuil de surendettement de 150% des exportations (à 180% selon les estimations du groupe). En outre, la situation sociale et les mesures de soutien vont maintenir le déficit budgétaire à environ 5,8% du PIB et la dette publique à 90% du PIB en 2022. Une diminution ne se matérialisera que si la croissance du PIB retrouve des niveaux plus élevés aux alentours de 4% à 5%. En dépit de toutes ces évolutions, les déséquilibres macro-économiques restent, somme toute, relativement contenus malgré le contexte très défavorable. «Des tensions monétaires pourraient ressurgir en cas de dérapage des déficits, mais la nécessité d’une nouvelle aide du FMI (Fonds monétaire international) semble peu probable au regard de la gestion actuelle et assez articulée de la crise», conclut l’étude.r> 

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