23 Octobre 2022 À 16:52
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Invité de la Fondation universitaire LINKS, Mohamed Mehdi Bensaïd, ministre de la Jeunesse, de la culture et de la communication, a tenu de prime à bord à partager sa propre vision des trois grandes missions de son portefeuille. Quelle est la vraie problématique des jeunes au Maroc ? C’était la première question à laquelle M. Bensaïd a tenté de réfléchir. «Ayant côtoyé les jeunes, je me suis rendu compte que leur préoccupation majeure est l’emploi. C’est une mission qui à priori n’est pas celle de mon département, mais je me devais de proposer des solutions dans ce sens». L’autre volet qui est la culture est encore plus complexe et comporte également l’une des solutions pour l’emploi des jeunes. «Je suis convaincu qu’en adoptant une approche de l’industrie culturelle, on pourra apporter des solutions à la question de l’emploi des jeunes», note le ministre.
L’idée du responsable est de se focaliser sur la création de nouveaux métiers liés au domaine culturel. C’est dans ce sens que M. Bensaïd révèle que des négociations sont en cours pour convaincre des investisseurs dans le domaine du gaming de venir s’installer au Maroc. «3 à 4 millions de jeunes Marocains utilisent le gaming au Maroc. On ne doit plus être de simples consommateurs, nous devons passer à la phase production», souligne le ministre. Il a ainsi expliqué que cette industrie nécessitera de développer des métiers comme le coding, l’intelligence artificielle, le design… d’où la stratégie du ministère de renforcer la formation autour de ces nouveaux métiers au sein même des maisons de jeunes. «200 maisons de jeunes prennent en charge aujourd’hui ce type de formations en partenariat avec l’école 1337 de coding et le ministère de la Transition numérique», a expliqué le ministre.
Le ministère de la jeunesse va travailler selon une nouvelle approche : former des compétences pour accompagner les autres ministères afin de promouvoir l’emploi des jeunes. Et de préciser qu’une entreprise de gaming peut absorber jusqu’à 3.000 ou 4.000 employés. «Nous sommes là au même niveau que Renault ou Peugeot», dit-il. C’est pour dire l’importance de ce secteur du gaming qui est aujourd’hui l’un des plus grands marchés de l’industrie culturelle. De plus, passer à la production dans ce secteur permettra de promouvoir le Made in Morocco, le patrimoine et la culture marocaine à travers ces jeux, insiste M. Bensaïd.
Comment mettre la culture au service de l’économie
«Il faut changer la vision que nous avons, même au sein du gouvernement, du secteur de la culture. Cela nous permettra d’avoir un nouveau poids et le débat va, à ce moment-là, changer avec le ministère des Finances et le département du Budget», lance le responsable gouvernemental. Il a dans ce sens insisté sur l’approche du calcul de l’impact économique de la culture. «À ceux qui s’opposent aux festivals et considèrent qu’ils sont une atteinte à nos valeurs, je dis qu’il faut être conscient de l’impact économique de ces événements sur le citoyen. Pour cela, nous travaillons aujourd’hui pour calculer cet impact qui est considérable pour la communauté. Cet exercice a déjà été effectué par Neïla Tazi qui est la première à avoir réalisé une étude sur l’impact économique du Festival Gnaoua sur la ville d’Essaouira. Il ne faut pas non plus oublier l’impact du patrimoine matériel et immatériel sur le tourisme», a noté le ministre. L’animation culturelle est également un volet que le ministère est en train de développer pour ouvrir des opportunités de travail aux jeunes. Le ministère est en effet en train de mettre en place les fondations pour animer les infrastructures culturelles au niveau des régions en coordination avec la société civile pour permettre de rendre des services meilleurs aux populations et combler le manque de ressources humaines, notamment dans les maisons de jeunes.
Créer des champions de la presse
Abordant le troisième secteur, qui est celui de la communication et de la relation avec les médias, Mehdi Bensaïd a expliqué que sa stratégie vise à professionnaliser le champ de la presse pour l’exporter vers l’international. «Pour ce faire, nous travaillons sur une stratégie pour renforcer l’investissement dans le secteur des médias avec l’objectif de créer des champions nationaux de la presse qui vont porter la voix du Maroc». Il a par ailleurs annoncé que «dans les semaines à venir, nous allons dévoiler un investissement spécial destiné à l’investissement dans le secteur de la presse. C’est un effort en plus des subventions classiques». Il a ainsi expliqué que pour lui, la petite entreprise doit continuer à exister, mais dans le cadre d’un groupement pour renforcer sa position. «Nous luttons pour porter les subventions destinées à la presse à 250 millions de DH au lieu de 65 millions de DH actuellement», a-t-il lancé.
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Adidas promet de dédier une collection au patrimoine marocain
Évoquant l’affaire du Zellij marocain utilisé par la marque Adidas sans approbation du Royaume, le ministre a tenu à expliquer que son département n’a pas porté plainte contre cette marque, mais a envoyé une correspondance pour demander des explications sur l’usage de ce patrimoine marocain sans l’aval du Royaume. «La marque a répondu à notre lettre et cela représente un geste d’excuse clair pour nos artisans. Nous leur avons demandé d’aller au-delà des excuses en créant une collection qui met en avant l’héritage marocain et dont les royalties iront aux artisans locaux. Cette proposition a été acceptée par Adidas qui a demandé un délai pour après la Coupe du monde. Nous avons fixé la date du 8 décembre pour reprendre les discussions avec la marque afin de mettre en pratique notre proposition. Le dossier est actuellement entre les mains du ministère du Tourisme et de l’artisanat pour prendre le relais», a déclaré M. Bensaïd.
Rappeur Toto : Bensaïd met les points sur les «i»
«Le gouvernement n’est pas là pour faire de la censure ou donner son avis sur les travaux artistiques, il est là pour soutenir le secteur et s’ouvrir sur les jeunes. Tous les jeunes, même ceux qui affichent des comportements marginaux. Notre rôle est de les amener à renouer le fil de la confiance dans les institutions et laisser de côté les violences verbales ou physiques (…) Que l’on soit d’accord ou non avec l’art présenté par le rappeur Toto, c’est un Marocain qui est placé en haut des classements mondiaux. Certes, ses propos étaient déplacés, et je lui ai signifié ça en personne, mais le principe est que le ministère n’a aucun droit de juger l’art».