25 Janvier 2022 À 14:44
Le retour au télétravail ou à la formule hybride repose toute la question du management à distance et de l'agilité. «La gestion en ces moments de transition requiert une capacité d’adaptation importante de la part des managers. Il ne faudra pas essayer de gérer à distance tout en utilisant les outils du management classique ainsi que ses critères», indique Dr Mohammed Benouarrek, expert international en conduite du changement & en gestion des ressources humaines, approché par «Le Matin».r>Selon lui, le challenge est de taille. «Il faudra une réelle émancipation des anciens repères et un vrai think-outside-the-box pour innover non seulement en matière d’outils de gestion, mais aussi en termes d’attitudes et postures managériales».
La culture de résultats a du mal à s’installer
À la question de savoir si les managers marocains sont conscients de la complexité relative de ce genre de gestion, l’expert estime que «le come-back au télétravail n’est pas aussi bouleversant qu’il l’était en 2020. Nous avons tous eu un temps d’adaptation nous permettant d’apporter les ajustements nécessaires au pilotage des performances à distance. Nous avons tous eu assez de temps d’apprentissage pour savoir piloter les performances à distance depuis le déclenchement de la pandémie à ce jour. Avec le recul que nous avons aujourd’hui, je pense qu’une bonne partie des entreprises a appris à gérer ses activités à distance hormis le secteur industriel qui reste relativement cloué, pour l’instant, au mode présentiel». Toutefois, reconnaît Dr Benouarrek, «l’inconvénient majeur demeure celui de la résistance de certains managers à évoluer dans leur mode d’appréciation des équipes. La culture de résultats a du mal à s’installer dans certains esprits».
Créer de la proximité à... distance
Par ailleurs, nombreux sont ceux qui estiment que parmi les défis du gestionnaire figure la nécessité de créer de la proximité entre lui et les membres de son groupe. Benouarrek, également directeur du Pôle stratégie au sein d’une grande entreprise, souligne que «le distinguo entre la proximité relationnelle et celle physique s'éclaircit de plus en plus. Les managers ne sont pas obligés de rester physiquement collés à leurs équipes pour avoir le sentiment d’être proches. Il existe des managers qui sont installés à côté de leurs équipes, mais qui en sont éloignés sur le plan relationnel». Et de préciser que «la proximité n’a pas de lien intrinsèque avec la présence. La chaleur relationnelle se détermine à travers la qualité de l’encadrement et la disponibilité pour ses équipes». Notre interlocuteur estime d'ailleurs que les appels vidéo ainsi que les échanges email sont des canaux valables pour entretenir des relations de proximité avec ses collaborateurs.
----------------------------------------------r>Mehdi El Yousfi, DG du cabinet Diorh
«Il est important d'accélérer la migration vers un pilotage par livrable»
Pour Mehdi El Yousfi, directeur général du cabinet Diorh, «le travail à distance, dans la durée, conduit à une évolution de la manière de penser le travail, ses rituels et ses contraintes. Afin de mieux gérer leurs équipes à distance, les managers pourraient ainsi s’inspirer des quelques idées suivantes :
• Maintenir les rituels collectifs de l’équipe : les outils permettant de connecter les collaborateurs ne manquent pas et sont d’un usage facile : Teams, Webex, Zoom pour ne citer que les plateformes les plus populaires. Il est important de les utiliser de manière à maintenir les rituels de proximité qui existaient par ailleurs (réunions d’équipe, points de coordination…). Il est, en outre, utile d’accompagner l’utilisation de ces outils de chartes et règles internes : ponctualité, règles d’animation, d’utilisation de la caméra…
• Accélérer le pilotage par objectifs : nombreux sont les managers à avoir probablement été désemparés par cette brusque migration vers le distanciel, certains ayant avec le temps acquis des réflexes de management par la présence. Il s’agit ici d’accélérer la migration vers un pilotage par livrable, par objectifs… cela ne peut concerner tout le monde, mais il a été démontré une augmentation importante, voire très significative, de la productivité de certaines catégories de collaborateurs (analystes, développeurs…). Peu importe finalement quand et où leur travail est réalisé. Le travail à domicile offre à ces catégories une souplesse qui convient à la nature de leur travail.
• Multiplier les feed-back individuels : afin de ne pas fragiliser le lien avec ses équipiers et collaborateurs, les managers gagneraient à multiplier les feed-back individuels à distance, afin de maintenir la dynamique de cohésion, le niveau d’engagement individuel et éviter un risque de délitement et de sentiment d’isolement.
• Mettre en place des dispositifs de veille, d’écoute et de mesure du risque psychosocial. Nombreuses sont les entreprises à avoir renforcé leurs dispositifs de well-being, via des plateformes d’écoute permettant de parler à un assistant social ou à un psychologue, ou des baromètres de mesure de la santé mentale notamment.