19 Juin 2022 À 16:32
Au moment où le gouvernement s’apprête à engager la restructuration du service public à travers la mise en place, comme premier pas, de l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’État et de suivi des performances des EEP, le débat sur l’agencification du secteur public est plus que jamais d’actualité. C’est le sujet retenu justement pour la conférence organisée, samedi dernier, par la Trésorerie générale du Royaume en partenariat avec l’Association pour la Fondation internationale de finances publiques, avec le soutien de la Revue française de finances publiques. Un parterre d’économistes, d’éminents spécialistes et de professeurs se sont donné rendez-vous donc pour examiner le système d’agencification du secteur public, ses performances et les dérives de sa mise en œuvre.
Dans un discours prononcé à cette occasion, le trésorier général du Royaume, Noureddine Bensouda, a souligné que l'agencification du secteur public est devenue visible ces dernières années et a toujours suscité beaucoup de débats entre partisans et opposants de ce mode de gestion publique. Selon le haut responsable, à la base de cet engouement pour l'agencification se trouve «l'attrait pour les modèles de gestion du secteur privé, considérés comme «plus légers, plus souples et plus pragmatiques». En effet, la prolifération des Agences dans le secteur public et l'essor qu’elles ont connu sont motivés par la recherche de performance et de rationalisation qui nécessitent, selon les partisans, de «se délester du poids de la bureaucratie et de ce qui fait la rigidité de l'Administration publique». Néanmoins, ce mode de gestion n’est pas épargné par un certain nombre de dysfonctionnements, qui ont d’ailleurs été relevé par le rapport de la Cour des comptes élaboré en 2016. «Dans nombre de cas, la Cour a relevé, parfois, une superposition d’entités pour un même ensemble de prérogatives et que des entités administratives qui continuent pourtant d’exister, sont complètement vidées de leurs attributions et privées, pour ainsi dire, de leur raison d’être», note le trésorier du Royaume en citant les constats établis par le rapport.
Les dérives de ce mode de gestion peuvent être beaucoup plus importantes, note d’ailleurs Michel Bouvier, professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et directeur de la Revue française de finances publiques.
En effet estime cet expert, si ces Agences peuvent se substituer parfois aux administrations classiques et prendre en charge des fonctions particulièrement régaliennes, comme les fonctions fiscales, leur développement entropique, non contrôlé, conduirait à coup sûr à affaiblir l’État et à éroder sa souveraineté. Pour garantir justement une bonne performance de ce système et prévenir les dysfonctionnements qu’il peut développer, une feuille de route a été mise en place, indique Tarik Laaziz, inspecteur des finances, dans une déclaration accordée au «Matin» en marge de cet événement. Ce chantier, qui a été amorcé par la promulgation en 2021 de la loi-cadre sur la réforme des établissements et entreprises publics et se poursuit par la mise en place de l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’État et de suivi des performances des EEP qui regroupera 42 entreprises de forme SA et 15 établissements publics, nécessite seulement la promulgation du décret relatif au code de bonne gouvernance des entreprises publiques.r>