15 Septembre 2023 À 09:30
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Le gouverneur de la Banque centrale, Abdellatif Jouahri, a plaidé jeudi dernier à Rabat pour l’élaboration de politiques publiques pour la promotion de l’emploi basées sur des données précises et actualisées soulignant que le choix d’une politique publique «basée sur des preuves» n’est plus un luxe, mais plutôt une nécessité, d’où l’importance d’investir dans la production des données, dans l’amélioration de leur qualité et de leur granularité et surtout une plus grande accessibilité à la donnée publique.
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Intervenant à l’ouverture de la troisième édition de la conférence annuelle du réseau de recherche régional des Banques centrales de la région MENA, placée sous le thème «Les marchés du travail et les transformations structurelles», M. Jouahri a estimé que l’appréhension de l’évolution des marchés du travail devenait de plus en plus difficile avec les changements de paradigme et les transformations profondes que les chocs successifs des dernières années ont initiées ou accélérées. Une situation qui rend plus complexe la formulation de la politique publique, a-t-il ajouté.
S’agissant des transformations profondes, elles sont nombreuses, a indiqué le même responsable, citant à cet égard le changement climatique dont les conséquences directes et indirectes s’annoncent importantes, notamment sur des pays comme le Maroc où l’agriculture concentre toujours une part importante de la main-d’œuvre. La montée du protectionnisme et du souverainisme économique engendre également une reconfiguration des chaînes de production et en conséquence une redistribution de l’emploi au niveau international. De plus, a ajouté M. Jouahri, la révolution digitale rehausse certes les exigences en matière d’accès au marché, mais la disparition massive annoncée de l’emploi ne paraît pas se matérialiser et de nombreuses études mettent en exergue que l’impact final reste en grande partie incertain.
Par ailleurs, l’essor que devait connaître le travail à distance après la pandémie ne semble pas se confirmer. «Certains travaux soulignent même une baisse de la productivité qu’il induit», a affirmé M. Jouahri. À toutes ces variables, s’ajoute par ailleurs le vieillissement démographique dans les pays avancés qui, conjugué aux autres changements de paradigme précités, les amène à mener des politiques d’immigration parfois agressives pour attirer les jeunes qualifiés de tous horizons. Ce qui n’est pas sans conséquence pour un pays en développement. «Quelle est la résultante de toutes ces forces qui sont en train de concourir pour refaçonner les dynamiques sur les marchés du travail ? Il faudrait avoir l’humilité de reconnaître qu’il est difficile, voire impossible de l'anticiper», a reconnu M. Jouahri.
Abordant le volet relatif à la dynamisation du marché de l’emploi, le wali de BAM a rappelé que cette démarche restait tributaire de la promotion de l’activité économique, laquelle passe en premier lieu par des politiques visant l’investissement et la croissance. Toutefois, la politique publique, a-t-il fait remarquer, peut aussi y contribuer en amont en préparant des jeunes au marché du travail à travers l’amélioration de la qualité de l’éducation et de la formation, et plus globalement en renforçant les capacités du capital humain. En aval, l’effort doit se focaliser sur la mise en place de mesures et de réglementations adéquates du marché du travail, facilitant l’embauche, octroyant des incitations ciblées à l’emploi salarié ou à l’entrepreneuriat et apportant un soutien direct aux personnes ayant des difficultés d’accès à l’emploi.
Le ministre de l'Inclusion économique, de la petite entreprise, de l'emploi et des compétences, Younes Sekkouri, a abondé dans le même sens en soulignant que le gouvernement accordait un intérêt particulier à la promotion du marché de l’emploi en engageant des réformes globales et audacieuses. Le ministre a cité à titre d’exemple le lancement de la réforme du Code du travail en vue d’adapter ce texte aux évolutions du marché de l’emploi, ainsi que la réforme du cadre juridique régissant le droit de grève, sans oublier l’adoption de la nouvelle Charte de l’investissement.
M. Sekkouri a par ailleurs mis l’accent sur les différents programmes sectoriels initiés par le gouvernement sur Hautes Instructions Royales, pour la promotion de l’emploi en ciblant en particulier les catégories vulnérables. Il a cité en particulier le programme «Awrach», ciblant les personnes ayant perdu leur travail à cause de la pandémie de la Covid-19, les personnes ayant des difficultés à accéder au marché du travail, ainsi que les secteurs et les entreprises touchés par la pandémie de Covid-19.
Le responsable gouvernemental a également mis en avant le programme «Forsa», qui s’adresse à toutes les personnes porteuses d’idées ou de projets d’entrepreneuriat, relevant que ce programme met l’autonomisation des citoyens au cœur de son action, et prévoit ainsi deux dispositifs combinant accompagnement et financement. Il convient de souligner que cette conférence, organisée par Bank Al-Maghrib et le bureau de l’économiste en chef de la Banque mondiale pour la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient (MENA) les 14 et 15 septembre 2023, se tient en prélude aux Assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, qui auront lieu en octobre prochain à Marrakech.r>