21 Juin 2023 À 10:10
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L'exposition Mon Maroc, «Je croyais rêver» – E. Delacroix, va au-delà d'une simple démonstration superficielle de l'hospitalité marocaine. Elle émerge d'un véritable intérêt pour des artistes confirmés, installés depuis des années dans le royaume. La Fondation TGCC, qui accueille cette exposition dans son magnifique espace Artorium jusqu'au 22 juillet, s'associe à la Fondation Ali Zaoua pour présenter un travail d'une beauté saisissante et d'une diversité rafraîchissante.
Au-delà de l'esthétique impeccable des œuvres d'art, soigneusement sélectionnées par le commissaire Mahi Binebine, une réflexion philosophique se dégage de cette collaboration prometteuse. «Le territoire, un terme familier à tous, émerge comme une entité reconnaissable au sein de notre existence. Il engendre un sentiment d'identification, mais quelle est sa véritable signification ? Est-il simplement une dénomination, une délimitation, ou bien un ensemble complexe de règles sociétales ? Peut-être incarne-t-il une composition magique de paysages naturels, de formes géométriques et d'êtres vivants ?», se demande Meryem Bouzoubaa, présidente de la Fondation TGCC.
Pour l'artiste-peintre et écrivain Mahi Binebine, «le Maroc a été un carrefour de cultures, de religions et de civilisations. Des Berbères aux Phéniciens, des Romains aux Arabes, des Andalous aux Portugais, ce pays a été marqué par des échanges et des influences multiples, et a forgé une identité particulière, riche de diversité». C'est un territoire en perpétuel mouvement et brassage, donc un territoire pleinement vivant.r>Mais penser le territoire est un droit qui appartient à tous ses habitants, y compris ceux de nationalités étrangères. «Pour avoir vécu et travaillé à Madrid, Paris ou New York, ma nationalité n'a jamais été un obstacle dans mes relations avec les éditeurs, les galeristes ou les conservateurs de musée. Seul le travail comptait. C'est donc pour cette raison que j'ai proposé à la Fondation TGCC cette exposition qui fera date, car elle répare une injustice», explique Mahi Binebine. En effet, à part quelques noms illustres qui ont marqué l'art partout dans le monde, tels que Delacroix, Matisse, Majorelle et d'autres orientalistes, il est rare de voir des artistes étrangers contemporains reconnus dans la scène artistique marocaine actuelle.
Grâce à la Fondation, nous pouvons donc espérer voir d'autres expositions dédiées aux artistes qui ont choisi le Maroc comme terre d'accueil. Pour l'instant, nous pouvons toujours nous délecter du travail aux formes débordantes et éthérées de Flo Arnold. Cette Casablancaise depuis vingt ans, qui expose souvent à l'étranger, offre des créations vaporeuses qui habitent les murs plutôt que de les habiller. Son coup de crayon enchanteur transcende les limites des corps, en les unissant harmonieusement.r>Hélène Brugnes, elle, est photographe. De ses flous maîtrisés se dégage un onirisme incroyable, en contraste avec la vivacité des scènes de plages marocaines. Tour à tour, cinéaste et plasticienne, elle a hérité de son père l'amour de la photographie et un désir de capturer le mouvement, qui remonte de son enfance passée sur les plages tunisiennes.
Pascal François est l'enfant terrible de l'exposition. Artiste autodidacte hypersensible, il étonne par la minutie et la patience de son travail, dans sa série «Abracadablanca», qui dévoile la ville blanche avec fracas. En effet, les sons, la densité urbaine et la diversité s'y expriment en formes et en couleurs.r>Le Chilien Marco Guerra, quant à lui, aime «prendre le Maroc de haut». Sa série de photographies aériennes, prises depuis le sommet d'un immeuble toujours vers 4 h 30 du matin, immortalise le croisement du monde des deux sexes, des hommes rentrant chez eux, après une longue nuit dehors, et des femmes commençant leur journée de travail.
Les peintures de Christophe Miralles, franco-espagnol, sont intemporelles, avec des influences enracinées dans le siècle d'or de la peinture espagnole, mais son inspiration s'accroche aux deux rives de la Méditerranée. La superbe palette de couleurs choisie par l'artiste rappelle la mer, le soleil et la terre qui nourrit et accueille.r>Enfin, l'Italien Nicola Salvatore nous plonge dans un travail assidu sur la symbolique de la baleine. Depuis ses années d'étudiant, il considère cet animal légendaire comme un symbole de recherche intérieure et de sagesse. Les œuvres de Nicola Salvatore offrent un voyage onirique, sculpté dans la matière.r>Au-delà de la diversité des techniques et des expressions artistiques, cette exposition célèbre la beauté et la complexité nées sur le territoire marocain, mettant en évidence la multiplicité des perspectives et des identités, dans un Maroc vibrant d'échanges, de rencontres et de créativité. Cette exposition est une invitation à questionner notre compréhension du territoire et à reconnaître la richesse qui émane de la diversité.
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