Société

Formation des ingénieurs : les industriels veulent avoir leur mot à dire

L’École nationale supérieure d'électricité et de mécanique de Casablanca (ENSEM) a organisé, mercredi dernier à Casablanca, une rencontre intitulée «Réinventons ensemble la formation de l'ingénieur de l'industrie du futur». Cette journée a été l’occasion pour les différents intervenants d'aborder les moyens d'améliorer l'employabilité des ingénieurs en mettant en place des formations plus adaptées aux entreprises.

Ph. Sradni

02 Mars 2023 À 15:39

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L’évolution de la science et de la technologie forcent les entreprises à s’adapter constamment. Cela induit des changements importants dans les catégories classiques des métiers et fait émerger le besoin pour de nouvelles compétences. C’est dans ce sens que l’École nationale supérieure d'électricité et de mécanique de Casablanca (ENSEM) a organisé, mercredi 1er mars, une rencontre intitulée «Réinventons ensemble la formation de l'ingénieur de l'industrie du futur». Cette rencontre a mis en avant l'enjeu d'une adéquation agile entre les besoins des entreprises, leurs réalités scientifiques, technologiques et économiques, et les programmes d’enseignement des écoles d’ingénieurs et l’ENSEM, en particulier.

Des partenariats Industriels-Ecoles d'ingénieurs s'imposent

«L'Industrie du Futur repose sur l'innovation et l'investissement dans des technologies. Miser sur les générations qui se forment aujourd'hui et demain doit également être un enjeu que les industriels doivent prendre en compte s'ils veulent pérenniser leur développement», a souligné Badreddine Benameur, directeur de l’ENSEM, à l’ouverture de cette rencontre dont l' objectif est d’améliorer l’employabilité des ingénieurs, tout en favorisant une montée en charge du Maroc dans les métiers de l’Industrie du Futur. «Nous devons attirer les meilleurs éléments et former des acteurs qui permettront aux entreprises de ce secteur d'innover. Au-delà des sciences de l'ingénieur, la formation à la technologie doit permettre l'acquisition de compétences opérationnelles et la formation de cadres à haut potentiel et de dirigeants», a affirmé Benameur. Le directeur de l’ENSEM a également précisé que la réussite des formations d'ingénieurs repose sur les partenariats Industriels-Ecoles d'ingénieurs avec le déploiement de plateformes technologiques de pointe sur lesquelles pourront se former les futurs ingénieurs tout en travaillant sur des projets réels d'entreprises.

Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du commerce, a de son côté rappelé que le secteur industriel est actuellement en pleine mutation et ses perspectives ne cessent de s’accroître, surtout avec les enjeux technologiques, notamment la transition 4.0 et la décarbonation. «Les chantiers structurants dans lesquels s’est lancé le Maroc aujourd’hui feront certainement appel à des compétences, notamment nouvelles et pointues capables de mener à bien la transformation du pays recommandée par le nouveau modèle de développement socio-économique. D’où la nécessité de revoir d’une manière continue l’offre de formation de nos écoles d’ingénieurs, notamment l’ENSEM qui fête aujourd’hui le lancement d’une réflexion visant son repositionnement dans l’écosystème de l’enseignement supérieur de demain», a déclaré le ministre. Ce dernier a également rappelé que son département a signé, en février 2022, une convention avec le ministère chargé de l’Enseignement supérieur et le secteur privé pour accompagner le développement de l’écosystème industriel et soutenir sa forte dynamique par la formation de 100.000 profils répondant aux besoins de l’industrie marocaine à travers une meilleure adéquation formation-emploi.

L'IA et le quantum computing indispensables dans la formation des ingénieurs

Pour sa part, Awatif Hayar, ministre de la Solidarité, de l'insertion sociale et de la famille, a insisté sur l’importance d’introduire des modules sur les différents outils de l’intelligence artificielle et du quantum computing aux formations des ingénieurs, tout en mettant l’accent sur l’aspect humain de leur utilisation. «Il est important d’accompagner les étudiants pour qu’ils soient dotés de capacité de flexibilité, surtout que certains métiers seront amenés à disparaître avec les avancées technologiques, en particulier l'intelligence artificielle. Les étudiants doivent avoir une formation fondamentale suffisamment solide et aussi être capables de découvrir par eux-mêmes grâce au «learning by doing», qui est une approche efficace et qui a montré ses preuves. Sans oublier de renforcer le lien entre la Recherche et Développement et la formation», a-t-elle souligné.

La ministre a, en outre, insisté sur la nécessité d’agir pour soutenir les jeunes étudiantes pour leur permettre de contribuer par leur intelligence au développement du secteur industriel. «Il y a encore beaucoup de femmes qui décident d’abandonner leur carrière professionnelle après avoir brillé lors de leur cursus universitaire, notamment à cause de la violence, des obligations familiales… Il faut absolument agir ensemble pour leur permettre de s’épanouir sur le plan professionnel et apporter leur valeur ajoutée au secteur de l’industrie».

Intervenant à cette rencontre, Hicham El Haid, président de la Fédération marocaine de plasturgie, estime qu’il y a une déconnexion entre la formation et le monde de l’entreprise. «L’industriel doit être une partie prenante de la formation et des programmes et commencer même à embaucher les futurs ingénieurs dès qu’ils intègrent l’école. Cela va permettre aux étudiants d’avoir une visibilité sur la filière dans laquelle ils vont se spécialiser assez tôt pour qu’ils puissent y dédier tout leur intérêt», a-t-il recommandé. «Nous insistons, par ailleurs, sur l’importance de la maîtrise de la langue anglaise. Et nous voulons et «exigeons presque», en tant que professionnels, de participer au programme de formation. Nous souhaitons avoir un rôle consultatif», a indiqué El Haid, qui a proposé de s’engager avec l’ENSEM pour mettre en place une machine de soufflage pour le Plast Expo 2023 qui aura lieu en juin prochain.

Parmi les recommandations retenues à l’issue de cette journée, le déploiement de méthodes innovantes pour enseigner les soft skills essentielles pour les futurs ingénieurs. Il a également été recommandé d’associer les industriels pour mettre à jour une partie (20%) des modules enseignés aux étudiants sans avoir besoin de ré-accréditer tout le programme, ce qui leur permettra de mieux répondre aux besoins des entreprises.

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