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Fuite des médecins : Khalid Ait Taleb interpellé par le PJD

De 600 à 700 médecins quittent le Maroc chaque année pour aller travailler sous d’autres cieux, ce qui équivaut à 30% de l’effectif des médecins actuellement formés. Ces chiffres alarmants et bien d’autres ont été dévoilés par la députée du PJD Touria Afif, dans le cadre d’une question écrite adressée récemment au ministre de la Santé au sujet de l’émigration des médecins, sachant que ce phénomène inclut les étudiants en médecine, les médecins spécialistes et les professeurs. La parlementaire souligne par ailleurs, en se référant aux résultats d’une étude réalisée récemment par l’Association des professeurs de médecine du secteur privé, que 80% des médecins résidents refusent de travailler dans le secteur public et que près de 100% des médecins spécialistes du secteur public refusent de poursuivre leur activité dans ce secteur après la fin de leur formation.

03 Juillet 2023 À 09:30

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Le phénomène de l’émigration des médecins marocains prend des proportions alarmantes. Certes, le phénomène n’est pas nouveau, mais sa persistance, voire son accentuation alors que le chantier de la protection sociale est lancé, interpelle plus d’un. Dans ce cadre, la députée Touria Afif, membre du groupement parlementaire du Parti de la justice et développement, vient d’adresser une question écrite au ministre de la Santé en s’appuyant sur les résultats d’une étude réalisée récemment par l’Association des professeurs de médecine du secteur privé.

D’après cette enquête, qui s’intitule «La fuite des cerveaux dans le domaine médical au Maroc, menaces ou opportunités ?», le Maroc perd chaque année entre 600 à 700 médecins. Un chiffre qui équivaut à 30% des médecins actuellement formés, sachant que cette émigration inclut aussi bien les étudiants en médecine que les médecins spécialistes et les professeurs.

80% des médecins résidents refusent de travailler dans le secteur public

Mais ce n’est pas tout, l’étude révèle, selon la même parlementaire, qu’il existe une véritable résistance affichée par les médecins qui rechignent à faire carrière dans le secteur public. Selon les chiffres de la même étude, 80% des médecins résidents refusent de travailler dans le secteur public, et près de 100% des médecins spécialistes du secteur public refusent poursuivre leur activité dans ce secteur après la fin de leur formation.

La même étude montre une baisse du nombre de médecins étrangers exerçant dans le pays, puisque seulement 50 médecins étrangers ont intégré les hôpitaux marocains pendant toute l'année.

«Cette situation représente un véritable danger pour le secteur de la santé puisqu’elle contribue à accentuer la pénurie des ressources humaines», souligne la députée pjdiste qui estime que les efforts de l'État pour remédier à cette pénurie à travers la formation de 3.000 médecins supplémentaires par an «n'ont pas atteint les objectifs souhaités». Et de noter que la densité médicale (qui correspond au nombre de professionnels de santé par rapport à la population) reste inchangée et qu'elle est loin de correspondre à la moyenne mondiale, ce qui pose des défis majeurs au système de santé dans notre pays qui vient d’ouvrir le chantier de la généralisation de la couverture médicale. Mme Afif s'est justement interrogée dans ce sens sur les mesures que le ministère prévoit de prendre pour faire face à ce phénomène, ainsi que les initiatives prévues pour attirer les médecins étrangers, notamment marocains.

45 professionnels de la santé pour chaque 10.000 habitants en 2030

Face aux enjeux liés à la réforme du système de protection social, le gouvernement met les bouchées doubles pour renforcer l’effectif des professionnels de la santé. C'es dans ce cadre que s’inscrit la signature en juillet 2022 d'une convention-cadre pour la mise en œuvre du programme d’augmentation des effectifs des professionnels de santé à l’horizon 2030. Cette convention-cadre a été signée par le ministre de la Santé et de la protection sociale, Khalid Aït Taleb, le ministre de l'Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l'innovation, Abdellatif Miraoui, et le ministre délégué chargé du Budget, Fouzi Lekjaâ.

L’objectif est de pallier le manque d’effectif dan le secteur de la santé et de réformer le système de formation. Ce programme vient concrétiser la haute attention accordée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI aux questions liées à la santé et au renforcement du capital humain du secteur, en tant que pilier central du développement et de la réussite de la mise en œuvre du Chantier Royal de la généralisation de la protection sociale, conformément aux dispositions de la loi-cadre 09.21 relative à la protection sociale.

Ce programme vise ainsi à augmenter le nombre des professionnels de la santé en passant de 17,4 pour chaque 10.000 habitants en 2021 à 24 en 2025, puis à 45 en 2030, ce qui nécessite de doubler le nombre de diplômés des facultés de médecine, de pharmacie et de médecine dentaire, de tripler le nombre des lauréats des instituts supérieurs des professions infirmières et techniques de santé à l’horizon 2025, tout en élaborant une nouvelle ingénierie de formation de base au sein des facultés de médecine, de pharmacie et de médecine dentaire, avec la création de 3 facultés de médecine et de pharmacie et 3 Centres hospitaliers universitaires dans les villes d’Errachidia, Béni Mellal et Guelmim. L’enveloppe budgétaire allouée à ce programme s'élève à plus de 3 milliards de dirhams, à laquelle s'ajoutent les coûts de création des 3 nouveaux Centres hospitaliers universitaires.

Une carte sanitaire régionale pour maitriser le besoin au niveau des régions

Dans le même ordre d’idées, le ministre de la Santé, Khalid Aït Taleb, avait annoncé il y a quelques semaines au Parlement la mise en place d’une nouvelle carte sanitaire régionale pour définir les besoins des régions en termes de ressources humaines et garantir une meilleure répartition de ces ressources. Le responsable gouvernemental avait reconnu le manque persistant en termes de ressources humaines dans le secteur de la santé qu’il a attribué au faible nombre de médecins formés, mais aussi aux conditions de travail difficiles et à l’absence de mesures d’incitation. Autant de facteurs qui contribuent à éloigner les professionnels de la santé des régions où les besoins se font le plus sentir.

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