14 Septembre 2023 À 18:49
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Lorsque l’on évoque un séisme, quel que soit le pays, l’ampleur des dégâts matériels et humains devient la priorité. Toutefois, la différence cruciale réside dans la gestion de la catastrophe, qui tend à être bien plus maîtrisée dans les pays qui accordent une importance aux normes parasismiques. C’est en somme le message de l’Invité de «L’Info en Face», Nabil Mekaoui, ingénieur, docteur en parasismique & enseignant-chercheur à l’École Mohammedia des ingénieurs (EMI). «Les victimes d’un séisme peuvent perdre la vie à cause du tremblement de terre en lui-même, mais aussi en conséquence de la mauvaise qualité des constructions», a affirmé Pr Mekaoui. Il a expliqué qu’il faut prendre en considération que le risque sismique dépend de deux facteurs : l’aléa sismique, qui signifie que le séisme est un événement aléatoire qu’on ne peut pas prévoir et qu’on ne peut pas maîtriser, ainsi que la vulnérabilité des constructions, qui, elle, peut être maîtrisée.
Le professeur a souligné, à cet égard, que «l’objectif fondamental de chaque nation doit être de minimiser les pertes humaines au détriment des dommages matériels, qui sont, en fin de compte, “plus tolérables”». La problématique réside dans le fait que les bâtiments construits selon les normes parasismiques sont souvent plus coûteux pour les constructeurs et les citoyens, a-t-il précisé.
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Au Maroc, les normes parasismiques ont été hissées en priorité à la suite des tragiques événements sismiques d’Agadir en 1960, puis celui d’Al Hoceïma, a indiqué le professeur en rappelant que «le pays avait élaboré son premier règlement parasismique, le “RBS 2000”, promulgué en 2002». Ce règlement établit les techniques d’ingénierie parasismique à suivre pour toutes les nouvelles constructions en béton, en acier ou en matériaux mixtes. Par ailleurs, l’expert a fait savoir que «face à chaque nouvelle activité sismique sur le territoire marocain, engendrant de nouvelles données pour les sismologues, une mise à jour de la réglementation est devenue indispensable. D’où la version 2011 du “RBS 2000”, la plus récente à ce jour». Parallèlement à ce règlement, un ensemble de normes parasismiques a été mis en place pour les constructions en matériaux traditionnels, tels que la terre et les pierres, a indiqué Mekaoui notant que la problématique dans cette situation réside dans le fait que ces normes s’appliquent uniquement aux nouvelles constructions. Les structures érigées avant les années 2000 ne sont pas soumises aux mêmes exigences, ce qui constitue un défi de taille pour la sécurité sismique du pays. En ce qui concerne la reconstruction, le professeur de l’EMI a précisé que «dans les zones rurales, la majorité des constructions reposent sur l’utilisation de matériaux locaux. Par conséquent, il est impératif de reconstruire en respectant les normes parasismiques déjà en vigueur». Et d’ajouter que cette transition vers des constructions plus résistantes aux séismes est essentielle pour prévenir de futures catastrophes. Il a toutefois expliqué qu’il faut reconstruire en lieu et place des douars et communes sinistrés, dans le respect de l’identité de chaque région et des normes parasismiques. Ceci est important pour permettre à ces populations de ne pas se sentir dépaysées et de pouvoir reprendre leurs activités économiques et touristiques d’avant-catastrophe.
Prédire les répliques qui surviennent après un séisme demeure une tâche extrêmement difficile, voire impossible, a répondu Pr Mekaoui, soulignant qu’en général, lorsqu’un séisme se produit, d’autres secousses sismiques se produisent inévitablement par la suite. Cependant, à ce jour, il est impossible d’anticiper avec précision la fréquence, la magnitude et l’intensité de ces répliques, a-t-il affirmé. Et de poursuivre que «même dans les pays les plus développés, disposant de ressources matérielles et financières considérables, la détermination du moment exact d’un séisme reste difficile. Les seuls modèles disponibles à ce jour sont des modèles probabilistes, basés sur des probabilités statistiques».