Économie

Les nouveaux «warnings» de la BAD aux pays africains

La Banque africaine pour le développement alerte de nouveau sur les risques liés au changement climatique. L'institution appelle à une action «massive» et «rapide» pour faire face à ce phénoméne dont les impacts sur les pays du continent ne sont plus à démontrer. La Banque estime qu’en l’absence d’action climatique concertée, la souveraineté alimentaire globale reste à l’état d’objectif. La plupart des pays lourdement affectés par les changements climatiques se trouvent en Afrique, où les températures dépassent déjà les seuils au-delà desquels toute production agricole est quasi impossible.

Selon la BAD, si la tendance actuelle des flux de financement climatique vers l’Afrique se poursuit, le continent sera confronté à un déficit annuel qui pourrait dépasser 127 milliards de dollars d’ici 2030.

19 Avril 2023 À 15:22

Your browser doesn't support HTML5 audio

La Banque africaine pour le développement (BAD) revient à la charge pour tirer la sonnette d'alarme quant aux risques des changements climatiques pour le continent africain. L'institution panafricaine appelle à une action massive et rapide pour faire face à ce phénomène en accélérant le développement agricole durable du continent et en enclenchant une réelle transition énergétique.

La Banque relève le «cruel paradoxe» d’un continent qui possède 65% des terres arables non cultivées dans le monde et importe aujourd’hui plus de 100 millions de tonnes métriques de nourriture pour une valeur annuelle de 75 milliards de dollars. Alors qu'au-delà de la simple résilience, le continent africain peut devenir une véritable puissance alimentaire mondiale.

Pour la BAD, le climat n’est plus le seul défi. En effet, indique la Banque, le conflit russo-ukrainien a placé les systèmes alimentaires face à un triple défi : productif, économique et géopolitique. La capacité des Africains à produire et se nourrir s’en trouve fragilisée. Ce contexte a fortement perturbé l’approvisionnement mondial en denrées alimentaires et provoqué l’envolée des prix des matières premières. Plus de 280 millions de personnes en Afrique souffrent de la faim. Ce que la BAD juge «inacceptable».  En réponse, l’institution affirme avoir déployé la Facilité africaine de production alimentaire d’urgence : une enveloppe de 1,5 milliard de dollars en soutien à 34 pays africains et à 20 millions d’agriculteurs pour produire 38 millions de tonnes de denrées alimentaires, d’une valeur de 12 milliards de dollars.

«La succession des crises redéfinit notre marche collective vers un même cap : la souveraineté alimentaire du continent africain. Il est vital de ne pas dévier en chemin. Chaque épreuve est une opportunité de faire différemment», souligne la Banque qui tiendra cette année ces assemblées annuelles en Égypte.

8,9 milliards de dollars mobilisés pour l'action climatique

De même, la Banque et ses partenaires avaient mobilisé, fin 2022, pas moins de 8,9 milliards de dollars pour le Fonds africain de développement (FAD-16). Un nouveau guichet d’action climatique destiné aux pays à faible revenu du continent a été créé. «Le FAD-16 soutiendra le développement d’infrastructures de qualité durables et résilientes aux changements», soulignait le président de la banque, Akinwumi Adesina, lors du lancement de l’initiative à Tanger, en décembre 2022. Fin janvier dernier, à l’occasion du Sommet Dakar 2 consacré à la souveraineté alimentaire et à la résilience du continent, les partenaires au développement se sont engagés à hauteur de 30 milliards de dollars sur cinq ans pour soutenir la mise en œuvre de pactes nationaux agricoles. Une enveloppe qui inclut 10 milliards de dollars de la Banque pour aider l’Afrique à éradiquer la faim et devenir le principal fournisseur de denrées alimentaires dans le monde.

Cependant, alerte la BAD, en l’absence d’action climatique concertée, la souveraineté alimentaire globale reste à l’état d’objectif. La plupart des pays lourdement affectés par les changements climatiques se trouvent en Afrique, où les températures dépassent déjà les seuils au-delà desquels toute production agricole est quasi impossible. De lourdes menaces pèsent en particulier sur les petits producteurs vivriers. Le droit à l’alimentation est remis en cause tout comme l’adaptation de la majorité des pays africains.

Rappelons que lors des prochaines assemblées annuelles de la BAD, les gouverneurs, les administrateurs, les dirigeants africains et les partenaires de développement de l’institution devront se pencher sur la discussion des stratégies les plus efficaces pour mobiliser davantage de ressources, notamment celles provenant de leurs propres pays, ainsi que des possibilités d’investissement dans les énergies renouvelables et l’agriculture durable. En fait, si la tendance actuelle des flux de financement climatique vers l’Afrique se poursuit, le continent sera confronté à un déficit annuel qui pourrait dépasser 127 milliards de dollars d’ici 2030.

L’Afrique pourrait en outre perdre jusqu’à 12% de son PIB d’ici à 2100. En comparaison, le déclin projeté pour les États-Unis et d’autres pays industrialisés serait inférieur à 1% du PIB.

Lire aussi: Comment le Maroc compte gagner la bataille d'une agriculture durable

Copyright Groupe le Matin © 2025