Fête du Trône 2006

Après les événements du 11 septembre, rencontre autour de l'image de l'Islam

L'amalgame entre Islam et terrorisme qui a resurgi après les événements du 11 septembre, la restauration de l'image de l'Islam en tant que religion de tolérance, de dialogue qui appelle à la concorde et l'urgence de préciser certains concepts sont les q

28 Décembre 2001 À 21:18

Initiée par l'Association "Al Massare”, "Le Journal hebdomadaire” avec le concours de la "Royal Air Maroc” (RAM), la rencontre intitulée : "quelle cité pour les pays islamiques? s'est déroulée avec la participation de deux éminents penseurs à savoir, les professeurs Abdelali El Amarani Jamal, directeur de recherche au CNR (Centre 110nal de Recherches-France) et enseignant à la Sorbonne et Tarik Ramadan, spécialiste en islamologie arabe, doyen au collège de Genève, attaché au Parlement de Bruxelles et membre de la commission la laïcité et Islam de la Ligue française de l'enseignement.
Dans son exposé sur l'idéal de civilisation en Islam, M. A. El Amrani Jamal a contextualisé la laïcité dans l'Islam à partir de la laïcité vertueuse d'Al Farabi. Il a ainsi fait remarquer que le concept, forgé dans un contexte culturel, politique et historique déterminé, se ressource de la philosophie grecque sur laquelle s'est fondée la civilisation occidentale.
Le conférencier s'est arrêté, par la suite, sur le concept civilisation mettant l'accent sur le clivage qui a surgi, après la découverte du nouveau monde, entre deux types de civilisations : celle du colon civilisé et celle de l'Indien sauvage.
Ce courant de pensée, a-t-il ajouté, fera son entrée en Europe et trouvera ses titres dans le positivisme avec notamment auguste comte et Ernest Renan et la laïcité aura, dès lors, sa consécration comme étant positive.
L'intervenant a, par ailleurs, déploré la disparition de la science en terre musulmane soulignant que l'idéal de civilisation dans la religion est inscrit dans quelques versets du Saint Coran en citant quelques-uns. Il a également indiqué que la laïcité pour l'Islam commence par la recherche et le doute comme le prône Houjjat Al Islam Al Imam Al Ghazali.
M. Tarik Ramadan est revenu, pour sa part, sur la complexité de la définition de la laïcité du moment qu'il n'y a pas une seule mais plusieurs laïcités, ceci dit, ce qui est important c'est le contenu et la portée fondamentale des termes et dans le monde musulman nous avons un vrai travail de défrichage terminologique à faire, a-t-il affirmé. En effet, il est nécessaire pour les pays musulmans, selon lui, de procéder à une clarification et à une précision à ce niveau, afin de pouvoir apporter une réponse à une interrogation fondamentale : où allons-nous? Faut-il imiter ou innover ? S'est encore interrogé le conférencier pour qui, il s'agit tout d'abord de ne pas confondre la laïcité et sécularisation, eu égard aux différences d'ordre institutionnel, théologique et philosophique précisant, au passage, que la laïcité est plurielle parce que les Etats et les histoires le sont. Il a, par la suite, rappelé que la laïcité se décline en deux modèles : une laïcité légale ouverte à la religion et une idéologie de laïcisation qui exclut cette dernière.
Ce qui est important pour les Musulmans est de dégager certains éléments et de les distinguer des modèles sur la base de principes relatifs à l'Etat de droit, qui est le produit d'une rationalité active et non d'un dogme imposé, a-t-il encore souligné.
Abordant, dans cet ordre d'idées, la question de la démocratie, l'intervenant a estimé que pour avoir un débat d'égal à égal la conscience musulmane a un grand effort à déployer à travers ses intellectuels qui doivent sortir de la superficialité et adopter le débat critique, d'autant que ce débat existait déjà chez les savants musulmans du 8ème siècle, car, si les sources sont unes : la chariaâ et la sunna, il y a une distinction de méthodologies, a-t-il affirmé, citant à ce propos le principe de causalité chez Ibn Khaldoun. M. Tarik Ramadan, a, dans cette même optique, préconisé une approche historique. Pour lui, la grande confusion chez les Musulmans aujourd'hui se situe au niveau des principes et des modèles et comprendre la distinction reste un grand défi de l'intelligence, a-t-il relevé, or il ne faut pas avoir peur de la raison mais développer une rationalité à partir du principe révélé.
Il a, en outre, estimé que tout se fond en Islam sur les principes de l'Etat de droit, (citant l'exemple de l'Etat de Médine), de la citoyenneté, de l'égalité, de l'élection et de l'alternance. Et c'est à partir de ces principes qu'il faut dégager les modèlss et de les établir et non recourir aux modèles importés, a-t-il poursuivi.
Le conférencier a, en conclusion, souligné que les Musulmans doivent reprendre possession d'eux-mêmes et de leur histoire.
Pour cela, il faut qu'ils prennent connaissance de leurs sources et leurs références et renouer avec ce qu'ils sont, déplorant le déficit de dialogue intra-communautaire qui prévaut. Il faut également cesser, selon M. Ramadan, de jeter la responsabilité de ce que les Musulmans sont aujourd'hui sur l'Occident, appelant à une réflexion intellectuelle réellement productive.
L'association Al Massar, initiatrice de cette rencontre, a été créée en mai 1999. Parmi les objectifs qu'elle s'est assignée figurent l'élaboration d'un projet de société moderne émanant de notre civilisation et ouvert sur l'environnement international, et mener des actions sur le positionnement de l'identité civilisationnelle du citoyen marocain vis-à-vis de la mondialisation, la promotion de l'esprit de citoyenneté constructive au sein de la société civile et parmi la population en général, la contribution à la moralisation de la vie publique et de l'environnement professionnel et social et la promotion et le développement de l'utilisation de la langue arabe comme l'un des fondements de l'identité 110nale.
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