FIFM : colloque sur “Le cinéma, pourquoi faire ?”
Le premier colloque se tenant dans le cadre du 1er Festival international du film, à Marrakech, placé sous le Haut patronage de S.M. le Roi Mohammed VI, a débuté hier matin, à la maison de la culture de Daoudiate, sous la présidence de Bernard Henry Levy,
LE MATIN
30 Septembre 2001
À 20:35
Thème de la rencontre, "Le cinéma, pourquoi faire ?”, sujet qui a suscité un débat fort intéressant et des exposés succincts mais révélateur de la problématique qui concerne toute l'humanité, à savoir le dialogue des civilisations.
Farid Boughedir, cinéaste tunisien, a situé le contexte de la production cinématographique au Maghreb, les diverses entraves rencontrées par les créateurs, le désir de certains réalisateurs de tourner des films qui "plaisent” aux festivaliers d'Europe et d'ailleurs pour conclure que le 7ème art dans nos pays du Sud ont plus que besoin de trouver une autre voie à même de les réconcilier avec leur public et de là, dépasser le cadre des frontières 110nales.
Seule une volonté politique est à même de soutenir cet objectif.
Le même argument a été tenu par Bernard Henry Levy qui appelle à trouver les moyens pour que le singulier puisse s'exprimer librement.
Le cinéma,
quelle signification ?
Quelle dimension donner au "cinéma face à la mondialisation”; ce à quoi répond David Kessler qui estime qu'après les attentats de New York, l'on est droit de s'interroger sur le rôle du cinéma américain et des pouvoirs publics.
Longtemps, le cinéma américain a été dominant et l'intervenant de citer un article de journal publié déjà en 1928, dénonçant cette mainmise des productions made in USA sur le reste du monde.
Le cinéma,
une industrie
Il y a une trentaine d'années, le cinéma européen existait bel et bien mais, à la suite du manque de dialogue entre les cinéastes, le niveau de la production a considérablement régressé. Et de dénoncer la politique constante de la France depuis 50 ans, en matière de cinéma. "Est-il nécessaire de tourner 50 films par an en France ". David Kessler opte enfin pour une coopération avec les pays du Sud de la Méditerranée pour favoriser le dialogue et les échanges entre les peuples des deux rives.
Intervenant à son tour, Souhaïl Ben Barka évoque la problématique à l'échelon 110nal : la situation matérielle des gens du cinéma.
"Après avoir terminé un film, un technicien du cinéma doit-il atteindre 3 ou 4 ans pour trouver un autre job ?” Ce qui a poussé le directeur du CCM à changer de vision en prônant le développement du fonds de soutien, la création et la modernisation des salles, l'encouragement des productions étrangères. Selon lui, ce sont 10.000 personnes qui vivent du cinéma au Maroc où la production 110nale marocaine est d'environ 8 films (longs métrages) par an.
Après avoir rendu hommage à M. André Azoulay qui agit discrètement pour l'essor du cinéma au Maroc et à M. Mohamed Achaâri, ministre de la Culture et de la Communication, Souhail Ben Barka a réaffirmé la volonté des pouvoirs publics de faire du cinéma au Maroc, une industrie.
Yamina Benguigui, algérienne d'origine, réalisatrice, vivant en France, a déclaré que l'image peut jouer un grand rôle dans la quête du passé de chaque individu.
Claude Lelouch avoue ne pas pouvoir oser expliquer son parcours tellement il se sentait comme un enfant gâté vis-à-vis de ceux qui sont intervenus dans ce débat.
Tout ce qui est
irrationnel
"Le cinéma, ma passion, m'a appris à discerner le mal du bien. Cela a transformé ma vie ; et j'ai de la passion pour tout ce qui est irrationnel”.
Il s'est déclaré profondément touché par l'accueil au Palais Royal où un dîner était offert vendredi soir, aux participants au Festival. Luis succédant, Youssef Chahine, décoré vendredi dernier par S.M. le Roi Mohammed VI, a reposé la question du colloque en ces termes : "Aujourd'hui, la question est de dire comment faire des films, contre les despotes et les intégristes”.
Pour le grand cinéaste égyptien, la date du 11 septembre 2001 ne peut être oubliée même si elle a des retombées négatives sur le monde entier. Pour tout cinéaste qui se respecte, et selon Youssef Chahine, la question qui doit le motiver est de se demander quel film voudrait le public dans deux ans.
Le producteur marocain Salim Fassi Fihri a traité du sujet cinéma au Maroc : 700 autorisations de tournage sont délivrées annuellement par le CCM (Centre cinématographique marocain) et le Maroc, aux côtés du Mexique et de la Tchéquie sont les desti110ns prisées par les grands producteurs de cinéma. Apport de devises pour le Maroc, entre 100 et 200 millions de dollars américains, provenant seulement du cinéma. Tout en louant les initiatives prises pour la relance du secteur, Salim Fassi Fihri a appelé à l'élaboration de nouveaux textes réglementant la profession, à un meilleur encadrement et que les pouvoirs publics défendent le cinéma comme ils le font pour d'autres domaines.
BERLuSCoNIi, DESAVOUE
Daniel Toscan Du Plantier, revenant sur l'opportunité de la rencontre de Marrakech a dénoncé vivement les propos tenus dernièrement par le Premier ministre italien, S. Berloscuni, à propos de la civilisation occidentale et l'Islam.
Des propos racistes qui déshonorent l'Italie dont le cinéma était à l'avant-garde pour dénoncer le fascisme et la dictature. Après quoi, un débat a clôturé ce colloque.
Rappelons que dans l'après-midi, une cérémonie d'empreintes de Charlotte Rampling (présidente du jury des longs métrages), d'Anouk Aimée, d'Omar Sharif, de Claude Lelouch et de Jeremy Irons a eu lieu à l'hôtel "La Mamounia”.
Puis, une rencontre de Claude Lelouch avec le public, à la maison de la culture à Daoudiate.
Ce matin, le cinéaste égyptien Youssef Chahine doit donner une conférence de presse à l'hôtel Méridien.