Fête du Trône 2006

L'exhortation au convenable et la prohibition du blâmable

Le thème abordé en conférence par le professeur Mohamed Taha Assabounji présente un principe idéal, d'abort par le fait de sa portée thématique qui évoque le prohibitif et le blâmable. En outre c'est un sujet d'actualité, complexe et enchevêtré par les di

21 Novembre 2001 À 17:47

Le thème que je me donne l'honneur de développer est en outre un sujet d'actualité, complexe et enchevêtré par les diverses questions qu'il ne manque pas de susciter. Il s'agit de l'exhortation au convenable et la prohibition du blâmable auquel se trouvent en fait rattachés toutes sortes de questions, de positions et de conceptions. C'est en outre une vertu grâce à l'application de laquelle la communauté musulmane peut retrouver la guidance divine et éveiller le reste de l'humanité aux beaux principes de sa religion.
C'est également un sujet qui a fait couler beaucoup d'encre et a retenu l'intérêt des spécialistes qui eux, lui ont consacré tous les efforts afin d'en établir les critères et pouvoir ainsi en normaliser et systématiser les fondements. Ces spécialistes ont par ailleurs tenu à appliquer ce principe vertueux aussi bien à leur existence qu'à leur société afin d'en faire les fondements mêmes de leur civilisation. Toute cette oeuvre bien sûr, a été accomplie selon leur propre vision du monde, leurs besoins et leurs conditions, tant générales que particulières. Ils abordaient aussi ce concept de la manière qui endiguait les problèmes pouvant résulter de leurs conditions politiques et socio-culturelles, tout en laissant néanmoins les portes ouvertes aux innovations qui, elles aussi, nécessitent des approches et des pratiques nouvelles.
Certes, aujourd'hui, aussi bien les méthodes logiques, les raisons sociales et les régimes politiques que le partage des responsabilités et l'instauration du dialogue entre les peuples, connaissent une nouvelle étape dans leur conception. Ce qui n'est pas sans nous appeler à renouveler les contours de l'exhortation au convenable et la prohibition du blâmable pour en moderniser le cadre et les moyens conformément aux aspirations islamiques, aux normes religieuses et à l'intérêt général, évitant ainsi toute déviation qui serait dans ce cas bien plus dangereuse que celles que nous projetons de réformer.
En définitive, tout nous interpelle pour nous surpasser afin que nous soyons à la hauteur de la grande responsabilité qui nous incombe et dont Dieu nous a honorés en nous en chargeant pour appeler les gens à Dieu par la sagesse, mais aussi par ce que recommande le développement comme modes, moyens et innovations techniques.
Dieu dit en effet dans son Livre: «Vous avez été la meilleure communauté jamais produite aux hommes pour ordonner le convenable, proscrire le blâmable et croire en Dieu».
Parmi les caractéristiques de la communauté musulmane, citons le fait que son élection par Dieu découle de la mission et de la responsabilité dont elle a la charge et qui réside dans le fait de veiller à la propagation de la foi et la généralisation du bien, ainsi que dans le fait d'édifier les fondements du développement humain en combattant toutes les formes de misère humaine et de régression aussi bien chez les Musulmans que chez le reste de l'humanité.
Avant cette élection, Dieu dans son Coran, avait déjà narré l'histoire de 110ns antérieures qui avaient rejeté la Vérité après qu'elle leur fut parvenue, ce qui les fit sombrer dans le malheur et les dépourvut de la mission dont elles n'avaient pu s'acquitter pose transfoen négateurs qui rejettent tant les envoyés de Dieu que la parole qu'ils leur apportaient, préférant plutôt soutenir le faux au détriment du Vrai. Ces communautés avaient réduit le message divin à des éléments partiels n'englobant pas tous les aspects de la foi authentique ainsi que l'ampleur de l'apostolat et avaient utilisé divinité et prophétie pour des intérêts spécifiques et souvent matériels au détriment de la vérité et de la guidance, de l'intérêt de l'humanité et de la dignité que procure la foi. Partant, Dieu a donc voulu susciter la communauté musulmane qu'il a qualifiée et a élue à cette noble mission et ce, en lui accordant Sa protection totale lorsqu'elle se réfugie auprès de tout ce que l'Islam a révélé et qu'on pourrait appeler «Le lien à Dieu»* sans quoi nul salut ne saurait se produire.
La communauté Musulmane a donc été élue par Dieu afin de faire parvenir Son message dans sa totalité et son intégrité. Il lui faut donc comprendre les fondements de sa religion et réunir toutes ses capacités en se regroupant et en assimilant parfaitement le message qui lui a été révélé. C'est là une condition capitale, car une assimilation parfaite d'une question évite toute approche réductrice et protège de l'anarchie et de toute propagande qui voudrait se jouer de l'esprit des gens en leur présentant une fausse interprétation des principes ou qui chercherait à occulter ceux-ci par le biais des séductions d'idéologies contradictoires utilisant de faux slogans sur la liberté, l'engagement ou la «transcendance spirituelle».
Et c'est ainsi que la communauté musulmane peut devenir la meilleure des communautés et ne se fonder ni sur un racisme dédaigneux ni sur une quelconque puissance militaire, mais sur le seul message qui se propose de réaliser l'essence même de l'existence, d'élever l'âme humaine au niveau de ses aspirations, de purifier les peuples en les écartant du faux et en les engageant dans la voie droite, de consolider les valeurs civilationnelles afin de raviver chez eux l'esprit du bien, de la miséricorde et de la dignité.
Quand nous prenons connaissance des paroles où Dieu dit: «Vous êtes la meilleure communauté suscitée parmi les hommes», nous ressentons tout le poids de la responsabilité qui nous incombe et percevons le noble étendard que nous sommes appelés à porter. Notre communauté, ne s'est pas d'elle-même destinée à ce rôle ni n'y a volontairement opté pour s'en acquitter. Elle a été suscitée parmi les êtres humains par une décision divine pour une mission qui surpasse la réalisation de son existence propre. Il ne lui est pas uniquement demandé de devenir meilleure, des'émanciper et d'être intègre, mais il lui faut également maîtriser, chez elle ainsi qu'au niveau international, les problèmes de la foi, de l'éthique, de la justice humaine et même de l'environnement, car le message qui lui a été adressé comporte la voie salvatrice.
Elle doit donc évoluer selon cette orbite sans s'en détacher et rester tout le temps attachée aux principes et aux vérités révélés par l'Islam. Un attachement total toujours prioritaire et qui ne saurait souffrir de rupture par rapport à des normes établies pour toute chose, mais qui doit aussi s'opérer conformément au rythme des idéaux afin que les Musulmans s'engagent résolument dans le progrès, occupent la première place dans cette voie et puissent ainsi traduire dans la pratique tout ce à quoi l'Islam appelle.
Par ailleurs, notre communauté est porteuse d'un message «de miséricorde aux univers», à savoir le monde des êtres humains ainsi que celui des animaux et des choses. C'est sur cette clémence que se fonde la loi divine et qui se trouve aussi à la base des rapports sociaux, non pas ceux qu'entretiennent entre eux les Musulmans uniquement, mais ceux aussi que nouent entre eux tous les habitants de notre planète. C'est qu'en effet, leur religion oblige les Musulmans à être cléments vis à vis des créatures qui vivent sur la terre, aspirant ainsi à faire régner la Miséricorde même de leur Créateur.
Quelles que soient son importance numérique et son extension dans le temps et dans l'espace, et quelles que soient les conditions de sa puissance ou de sa faiblesse, la communauté musulmane demeure garante du «témoignage» vis à vis des autres peuples en tout temps et en tout lieu. C'est qu'en effet, son témoignage n'est tributaire ni de sa régression ni de son essor. Qu'elle triomphe des autres 110ns ou qu'elle subisse leur despotisme, le «témoignage» doit nécessairement être garanti. Lorsque cette communauté ressent le dédain des puissants et sa faiblesse devant les plus forts, elle ne doit nullement se renfermer sur elle-même et penser que sa faiblesse diminuerait de son rôle de «témoin».
En effet, le «témoignage» qu'elle est appelée à assurer sera encore plus effectif et plus tangible en présence du triomphe de l'injustice, un véritable stimulant et un réel soutien pour le monde dans son aspiration vers la raison pure et la Vérité. Il est vrai que tous les messages célestes contiennent le principe de l'incitation au bien et la condam110n du mal, pourquoi donc la communauté musulmane a été principalement élue pour s'acquitter de cette responsabilité?
Il est évident que cette norme était limitée au temps où Dieu révélait ses messages à des peuples déterminés et à une époque qui a fait son temps. Par ailleurs, le motif de l'exhortation au bien est variable même dans le cadre religieux et a tendance à s'élargir ou à se réduire selon la conception religieuse dominante. Mais, en Islam il en est autrement. Il nous suffit d'indiquer à cet égard que le message islamique concerne en fait tous les habitants de la planète. Les Musulmans ont été interpellés parmi les peuples chargés d'une mission qui déjà dépassait le cadre géographique où leur religion était née, et qui franchit les limites du vaste monde musulman que nous connaissons aujourd'hui pour parvenir à tous les habitants et à toutes les régions du globe.
D'un autre côté, le fait que l'Islam ait été révélé pour clore le cycle de tous les messages célestes en fait le dépositaire des révélations authentiques, celles n'ayant pas été dénaturées ni n'ayant subi ni amendement ni réforme dûs aux transformations culturelles dans leur unité et leur intégralité. On peut également relever que notre thème d'aujourd'hui en Islam est ce qu'il y a de vraiment vaste et ne se cantonne pas aux prescriptions et aux interdits mentionnés par les textes, mais embrasse également les grandes questions de l'existence des hommes comme les changements et les innovations de leur culture et les réalisations techniques de pointe que nous connaissons aujourd'hui sur la scène mondiale, ainsi que les nouveaux systèmes conçus dans les relations internationales et les divers comportements tant au niveau des individus que des sociétés. Cette situation n'est pas sans se traduire par des attitudes, des conceptions et une action effective sur les tendances de l'humanité dans ses aspirations, susceptibles néanmoins de menacer celle-ci de crises qui pourraient la faire régresser.
Endossant sa responsabilité de la sorte et atteignant ce niveau dans l'exercice de son devoir vis à vis de son monde, la communauté islamique parviendra à un rang de choix jamais atteint aussi bien par les 110ns antérieures que les 110ns à venir.
Afin de consolider encore plus cette réalité, Dieu a chargé tant son prophète que la société musulmane de cette fonction en tant que noble objectif civilisationnel, fonction ayant toujours un même but, celui d'exhorter au convenable et de proscrire le blâmable.
Concernant le Prophète (P.S.), les charges dont il doit s'acquitter se trouvent déjà mentionnés dans les révélations antérieures comme le spécifie le verset où Dieu dit: «Nos signes en faveur de ceux qui suivent l'envoyé, le Prophète ne sachant ni lire ni écrire (Umni)* qu'ils trouvent chez eux inscrit dans la Torah comme dans l'Evangile: il leur recommande le convenable et leur proscrit le blâmable». Et pour ce qui est de l'attitude de la société musulmane, Dieu dit: «Les croyants et les croyantes sont en rapports mutuels de protection: ils commandent le convenable et proscrivenlemauvais». Quant aux fondements de la civilisation islamique, Il dit: «A ceux qui, si Nous leur en donnons capacité sur la terre, accomplissent la prière, acquittent l'aumône, prescrivent le convenable et proscrivent le blâmable. A Dieu la fin de toute chose».
C'est parce que justement la communauté musulmane est astreinte à mettre en pratique la bonté et à réformer le monde qu'elle est parvenue à se libérer de toute attitude passionnelle et de tout fanatisme pour s'élever au niveau qui lui permette de réaliser les plus nobles objectifs. En recommandant le bien et en combattant le mal, cette communauté ne le fait pas pour réaliser un intérêt quelconque ou pour aspirer à une quelconque hégémonie sur les peuples en les exploitant ou en les rançonnant, mais parce que le bien pour elle est une valeur absolue à laquelle elle doit obligatoirement appeler. Elle devient ainsi la communauté de l'honnêteté et de l'intégrité auxquelles elle se conforme, celle de l'équité et de la justice qu'elle veut impartiales, et qu'elle veut équilibrées et éloignées de toute passion et de toute haine. Une justice qui lui sert en fait à établir toutes ses normes et de jauger toute chose conformément aux paroles du Tout Puissant :
«Vous qui croyez, assumez Dieu, témoigner de l'équité. Que la rancune contre un peuple ne vous vaille pas de donner dans l'injustice. Soyez justes: C'est être au plus près de se prémunir».
L'établissement de la justice constitue le principal fondement de la responsabilité quant à la maîtrise par la communauté musulmane des principes du bien et à leur généralisation chez les individus et les sociétés.
Tout cela n'est pas sans susciter un ensemble de questions concernant «la recommandation du convenable et la prohibition du blâmable», surtout à notre époque, caractérisée par l'exercice de plus en plus répandu des libertés. Comment par exemple une communauté pourrait-elle s'octroyer le droit de maîtriser l'éthique et les principes, les aspirations et les objectifs à réaliser en réduisant les libertés des gens et en monopolisant les notions de bien et de réforme de l'humanité?
C'est là une question qui donne lieu à une réflexion approfondie et suscite une façon de voir particulière, surtout après que les gens ont été séduit par certains slogans sur une liberté somme toute vidée de son sens par ceux qui l'ont mystifiée en balayant ses critères, la mettant ainsi au seul service de leurs objectifs illusoires. C'est ainsi qu'ils ont outrepassé toute légitimité et tout sens des responsabilités sans considération aucune pour les véritables aspirations et les libertés effectives d'autrui. Qu'est-ce donc que la liberté? quels en sont les critères et les limites? Pour qui s'établit-elle et comment parvient-on à la préserver?
La liberté à la base n'est nullement une conception humaine et ne constitue pas une nécessité conçue par l'existence sur terre. Elle est plutôt un don de Dieu et une obligation charaïque. C'est aussi l'une des composantes de la dignité humaine. Il ne peut donc y avoir de foi authentique que par un esprit libre, et de responsabilité véritable que par une volonté libérée. Par ailleurs, la liberté n'est ni un droit contingent, dont on peut se défaire à l'occasion, ni une notion abstraite que chacun peut interpréter à sa manière ou expliquer selon sa culture et les conditions qui l'entourent. Elle n'est pas non plus un bien exclusif à une 110n ou une personne qui peut en disposer pour l'octroyer à autrui ou l'en priver selon son bon vouloir.
Les Musulmans en fait, en garantissent la préservation en l'octroyant à tout le monde sans exception, mais uniquement dans sa saine expression et son cadre constructif.
Tout ce qui ne se réclamerait pas de la raison, de l'équité et du bien n'a rien à voir avec la liberté. Ce ne sont là en fait que broutilles, calomnies et souillures de la notion de liberté. Ce qui d'ailleurs n'est pas sans provoquer un retour à un état primitif où on voit les instincts régner au détriment des critères de la raison et où l'individu évolue en dehors de tout système normatif où les sursauts des illusions l'emportent sur tout ce qui est logique et bien établi. C'est ce à quoi nous assistons aujourd'hui un peu partout dans le monde où la liberté commence à prendre une forme nouvelle d'idolâtrie où les valeurs, les systèmes moraux et les aspirations saines sont renversés par le règne des péchés et des vices souillant éthique et valeurs sacrées. Au niveau économique, cette liberté n'est plus que réalisation de richesses et de profits au détriment des pauvres et des démunis, qu'exploitation des biens des peuples colonisés économiquement et financièrement pour les maintenir dans leur sous développement et que division du monde en un Nord nanti et un Sud affamé. La libre pensée, quant à elle, s'est transformée en une aire de licence où sont déversées les épaves de la subjectivité à la place de la pensée constructive, les séquelles fantasques et non les investigations de savants authentiques et compétents. Un espace en définitive où n'importe quel vaniteux, déliquescent ou porteur d'un prétendu titre universitaire dispose d'une liberté totale d'exprimer ses fantasmes et de répandre ce qu'il veut comme mensonges et impostures provoquant une polémique illusoire le caractérisant de libre penseur et de critique en dehors de toute monition de la religion et de toute éthique ou réprobation de la raison. La confusion a alors gagné l'esprit des gens, l'absurdité celui des intellectuels et un ouragan balayant la foi des gens a commencé à souffler partout sur la planète, sapant les credo établis et faisant douter des certitudes pour les remplacer par des théories matérialistes et des idéologies athées au nom de la libre pensée qui n'a pas cessé d'éroder l'humanité et de provoquer son malheur tout le long du siècle passé. La libre expression dans le domaine artistique et esthétique pour sa part, n'exprime plus que démence à travers la photo, la peinture et la sculpture, le chant, la musique, la chorégraphie et d'autres domaines artistiques, transformant le désir sexuel naturel de l'homme en une lubricité enragée qui devient le symbole de la liberté et le critère incontestable du développement. Où va donc l'exercice de cette liberté qui ne cesse d'agresser les droits de l'homme en coexistant avec l'avanie, d'utiliser la force pour persécuter l'équité et de produire les armes de destruction massive qui menacent la paix dans le monde?
N'est-il donc pas juste, au nom même de la défense de la liberté, que les responsables de la recommandation du convenable et de la prohibition du blâmable œuvrent au triomphe du bien et à l'élimi110n de toutes ces impostures qui se sont collées à la liberté pour en occulter le sens réel? N'est-il pas temps de combattre cette injustice et de rattacher l'exercice de la liberté aux obligations de l'individu et des sociétés tant 110nale qu'internationale?
L'Islam, face à une telle problématique préconise qu'on commence tout d'abord par réfléchir à la situation pour qu'elle soit en premier lieu posée dans son cadre réel et logique afin de susciter chez les gens la conviction quant à la nécessité de la liberté qu'il met ensuite en pratique, préservée de toute atteinte et de tout dépassement, mais non pas pour réprimer les choix personnels des individus. C'est en effet dans le cadre de la foi même que la liberté prend toute son envergure dans sa quête spirituelle du libre arbitre. L'être humain est libre de croire en Dieu ou de demeurer mécréant, mais la liberté dont nous parlons ici s'arrête là où commence celle des autres. Elle commence d'abord pas le respect des croyants, par la lutte menée contre le mal pour les préserver des troubles et de l'anarchie recherchés par les ennemis de la religion. Certes, nulle liberté ne saurait être octroyée à ceux qui sèment la discorde parmi les croyants concernant leur religion, que ce soit en les forçant ou en les égarant et en les abusant. L'autorité a même le droit de prendre contre eux des mesures répressives pour mettre fin à leurs actions et à l'anarchie qu'il veulent semer parmi les populations.
Ensuite, cette liberté est tributaire du droit dont dispose le nde connaître le message islamique dans sa totalité. La parole de Dieu doit donc lui parvenir en dépit des agissements de ceux qui ont la main- mise sur la liberté et qui en réalité cachent aux gens la parole de la vérité et verrouillent les frontières de leur pays à l'appel à Dieu en déformant sciemment l'image de l'Islam pour en éloigner leurs citoyens.
Enfin, la liberté en Islam n'empiète jamais la liberté individuelle tant que celle-ci ne dépasse pas l'individu lui-même et n'éclabousse pas les autres en les incitant à la déprédation ou en troublant l'ordre social. L'Islam ne permet nullement que les domiciles soit violés ou surveillés pour que soit contrôlée la vie privée de leurs propriétaires. Le domicile est sacré et celui qui y habite dispose de sa liberté sauf s'il se comporte de manière à porter atteinte à la sécurité de la société et à ses valeurs sacrées. Même pour ce qui est de l'apostasie, si elle ne concerne que la personne elle-même et que l'apostat n'affiche pas son attitude, ne cherche pas à y gagner autrui et ne menace pas la communauté, sa sanction demeure entre les mains de Dieu seul et ne tombe sous aucun châtiment légal, Dieu d'ailleurs dit: «Qui d'entre vous apostasierait, qu'il périsse en tant que dénégateur». «Périr» dans ce verset voudrait dire: mourir d'une mort naturelle et non pas par application de la peine capitale.
(à suivre)
Cependant, concernant celui qui abjure l'Islam en se détachant de la communauté et constitue pour celle-ci un danger, l'Islam établit tout d'abord avec lui un dialogue utilisant l'argument et la preuve pour le ramener à la raison. S'il persiste cependant dans son attitude et continue à menacer la communauté des croyants, la peine légale lui sera alors appliquée. La sanction ici n'est nullement une atteinte à la liberté, mais plutôt une préservation de la liberté d'autrui et de la concorde sociale. Mais, tant la libre pensée que la libre expression demeurent assurées dans le cadre de l'éthique et de l'intérêt général et ne se transforment pas en un instrument de trouble, d'anarchie et d'atteinte à la sécurité de l'Etat et de la 110n sous prétexte de la liberté d'opposition ou du développement et de la réforme sociale. L'intervention d'aussi bien l'autorité que de la société dans le combat contre le mal et les extravagances politiques et sociales ne peut être comprise comme une régression de la liberté, mais plutôt comme une action qui jugule les dépassements et l'anarchie dans le seul but de préserver les libertés et la stabilité sociale. Cette intervention, dans plusieurs circonstances, devient même un devoir religieux qui prémunit contre tout danger de dislocation sociale et qui protège les individus et la société de l'anarchie, leur assurant ainsi la sécurité dans l'intérêt de tous.
C'est qu'en effet la société constitue un ensemble complémentaire. Une utilisation de la liberté portant préjudice à cette homogénéité est une attitude inique qui expose la communauté à l'anéantissement. Il devient donc obligatoire de contrer pareils excès sans faire cas des prétextes derrière lesquels se cachent ceux qui utilisent la liberté dans le but de saccager l'harmonie sociale.
Cela étant, la recommandation du convenable et la prohibition du blâmable passent néanmoins par l'argumentation et la belle exhortation qui s'effectuent selon les étapes du conseil, de la notification et de l'avertissement, conformément aux paroles où Dieu dit:
«Que de vous se forme une communauté qui appelle au bien, ordonne le convenable, proscrive le blâmable: ce seront eux les triomphants».
Cette phase doit s'accompagner d'une révision de la notion de culture générale, des valeurs établies et des conditions environnantes ainsi que du domaine éducatif avec les instruments, l'évaluation et la méthodologie qu'il utilise pour assurer à la société le climat idéal qui en fait une 110n consciente de ses problèmes, réellement responsable et possédant une foi authentique.
C'est pareille société qui serait alors apte à adopter les mesures contraignantes et parfois même la force et la répression pour se protéger contre la déprédation.
Vient après la phase où l'on tranche le problème et qui ne saurait avoir lieu qu'après avoir au préalable puisé tous les moyens servant à cultiver et à orienter les gens et à leur faire prendre conscience du problème. C'est une phase s'accompagnant d'une mutation que supervisent l'autorité et les responsables pour mener la communauté de la perdition à la stabilité, de l'anarchie à l'exercice d'une liberté responsable et de la déliquescence à la sécurité bienfaisante.
Aussi, le convenable supplantera-t-il le blâmable et assistera-t-on alors à une transformation telle que les personnes qui se dressent en tuteurs des gens, en censeurs de leur pensée et en juges de leurs comportements et qui se croient les seuls à comprendre la religion en se réservant le droit de distinguer le bien du mal, n'auront plus aucun impact sur les gens. Ces individus qui monopolisent la faculté de penser en l'interdisant aux autres et qui s'opposent à eux en les taxant d'innovateurs destructeurs, n'auront plus aucune raison d'exister.
En effet, telles attitudes aujourd'hui sont devenues parmi les éléments qui s'opposent à la liberté et à la religion même. Car le concept de recommandation du bien et de prohibition du mal devrait se fonder sur les réalités religieuses ne souffrant aucune espèce de permissivité ou de licence qui autoriserait les prétendus dévots, ceux qui utilisent la religion à leur fin personnelle ou qui se barricadent derrière des visions du monde révolues et ceux qui sont hostiles à tout genre de renouveau que suscite l'existence ainsi que leurs semblables parmi les septiques qui ne répondent qu'à leurs passions en toute chose, qui autoriserait, disions-nous de tels censeurs à intervenir en directeurs de consciences. Le blâmable ne saurait être combattu par de tels énergumènes brailleurs. Il n'appartient en effet à aucun individu seul ni à un groupe quelconque de personnes de garantir cette responsabilité avec la méthode et l'exercice de la liberté qu'ils préconisent. Sinon les transformations sociales iront de mal en pis à cause des troubles, des exactions et des excès que cela ne manque pas d'engendrer.

Une authentique mutation ne saurait se produire que par le biais de l'autorité qui elle, en a les moyens et peut donc distinguer avec justesse le bien du mal tout en donnant la priorité à l'intérêt général, à la sécurité et à la stabilité de la communauté. Elle pourra pour cela mettre sur pied les institutions appropriées, combattre la régression et la décomposition qui menacent la société et préserver les citoyens de la dégradation des moeurs. De tout temps d'ailleurs, mais surtout à notre époque, ces questions demandent à être revues selon de nouvelles approches pour que la société soit mise à l'abri du terrorisme intellectuel et préservée de la ruine et du dépérissement et ce, grâce au principe de l'appel au bien et la condam110n du mal en tant que priorité, loin cependant de toute polémique superflue.

Cette nouvelle approche du principe fera en sorte, d'une part, que chaque domaine de l'activité culturelle tant individuelle que sociale reçoive un intérêt et une considération à sa juste mesure pour que le véritable problème ne soit pas noyé dans les détails et que, d'autre part, le mal principal ne soit pas occulté par un autre de moindre importance.

Chaque fois qu'un mal grandissait et menaçait la vie islamique dans ces principes, c'est d'abord à ce mal qu'on s'attaquait pour lui trouver un remède tout en reléguant au second plan les questions secondaires. Celles-ci ne préoccupent et n'irritent en fait que les personnes superficielles qui s'y sacrifient ou sacrifient la vie de ceux qui s'opposent à eux.

En cette époque qui a vu l'émergence des systèmes juridiques et des institutions politiques, le changement ne saurait s'opérer que dans le cadre limité de l'Etat où sont déterminés tant les attributions que les domaines de compétences.

L'incitation au bien et la condam110n du mal peuvent alors se poursuivre conformément à des orientations précises et à l'éducation du peuple dans le cadre d'une épartagée entre l'Etat et les garants de l'éducation, de la loi et de l'appel à Dieu. C'est pourquoi notre principe pose comme préalable à la lutte contre le mal multicéphale que la communauté revoie sa réalité pour évaluer jusqu'à quel point celle-ci demeure conforme aux préceptes de sa religion et pouvoir ainsi s'engager dans son époque selon une conception saine des diverses normes établies par la religion et en revoir certainesautres grâce à la distanciation. Ces questions historiques en l'occurrence qui continuent à préoccuper l'esprit des Musulmans, afin de leur trouver de nouvelles approches, de nouvelles conceptions et de nouvelles solutions. Partant, la communauté pourra différencier entre l'immuable et le contingent, entre la norme religieuse maîtrisée et la politique législative malléable, entre le contenu religieux obligatoire et son cadre circonstanciel, entre la norme immuable dont la preuve est établie et les normes rattachées aux causes, aux effets et au temps, entre l'événement historique rattaché à son époque et la marche islamique ininterrompue, entre le patrimoine qui puise sa sacralisation dans son authenticité et un renouveau attesté par ses causes, entre un idéal qu'on peut être fier d'adopter et une réalité rejetant légendes et croyances mythiques, entre les textes du Coran ainsi que la politique du Prophète attestés, et les conceptions humaines discursives suscitant l'effort intellectuel dans le cadre des fondements de la religion et ses desseins.

Tous ces impératifs n'engendreraient-ils pas les actes les plus inavoués si jamais les Musulmans n'en assimilaient pas tout à fait les significations ou s'ils restaient en expectative devant les problèmes qu'ils soulèvent? Y a-t-il une attitude plus négative que de céder l'évaluation du blâmable à de prétendus savants, à ses férus enthousiasmés des questions religieuses et de leur permettre ainsi de s'y prononcer en émettant leurs avis à partir de leurs connaissances toutes relatives et de leurs conceptions toutes tordues, tout comme celles d'ailleurs des organisations auxquelles ils appartiennent et qui leur tracent des orientations à partir de l'étranger pour juger les autres personnes de mécréantes?

Ces illuminés finissent même par verser le sang des innocents, démolissent les établissements publics, égorgent des enfants toutes confessions confondues et déclarent pour eux licites les biens d'autrui, alors que Dieu nous ordonne de nous en remettre à Lui, au Prophète (P.S.) et aux érudits en matière de religion habilités à déduire les normes juridiques.

Il n'est pas de mal plus grand que celui-là, car il porte atteinte à l'Islam et en présente une image déformée. C'est ce mal là qu'il convient de combattre et de rejeter. Il n'est pas pire scélératesse que de plonger la communauté dans une polémique concernant les choses de l'au-delà et de la couper ainsi du monde réel auquel Dieu nous invite à réfléchir pour en explorer les lois à exploiter au service de la foi et de la prospérité de l'homme.

Il n'est pas plus grand mal que de rechercher la conscience religieuse en dehors de la dimension humaine. L'appel à l'Islam se fonde sur deux principes essentiels: libérer l'esprit de l'ignorance et la vie de la misère et du malheur, Dieu dit à cet égard: «Qui suit la guidance ne s'égare ni ne peine».

Le grand mal réside aussi dans le fait que nombre de questions demeurent momifiées dans les linceuls du passé et limitées aux exégètes et à des restrictions en relation avec les concepts de la théologie, du pouvoir, de la guerre sainte et des relations avec les non musulmans ainsi que d'autres concepts souffrant ou d'une carence ou d'une exagération ou de l'immobilisme.
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