Fête du Trône 2006

Le Coran, en langue vernaculaire des «incultes»

Le professeur Abdessabour Shahin dans le présent essai évoque la thèse de Régis Blachère qui soutient que le Prophète «Ummi» est le Prophète d'un peuple autre que les gens du Livre, c'est-à-dire des païens n'ayant jamais reçu de révélation. En réalité, R

19 Novembre 2001 À 21:54

Avant d'entrer dans le vif du sujet, il nous faut tout d'abord rechercher la signification du concept coranique «Al Ummiyun». Nombreux sont ceux qui jugent que le fait que le Coran a été révélé dans la langue d'un peuple analphabète réduit de sa valeur, car pour la plupart des gens le terme coranique «Ummi» voudrait dire l'ignorance de l'écriture et de la lecture. Il ne convient donc pas selon eux de caractériser ainsi le Coran et de diminuer de sa valeur.
En réalité, le terme «Ummya» est interprété différemment par les exégètes. Les Musulmans parmi eux l'expliquent comme étant le fait d'ignorer l'écriture et la lecture alors que les orientalistes, et c'est d'ailleurs là une opinion répandue chez eux, présument que le Prophète (P.S.) savait lire et écrire pour ainsi soutenir que celui-ci aurait plagié la religion à laquelle il a appelé, des Ecritures antérieures révélées aux gens du Livre. Ainsi, dans son ouvrage «Introduction au Coran» Régis Blachère soutient que le prophète «Ummi» est le prophète d'un peuple autre que les gens du Livre, c'est à dire des païens n'ayant jamais reçu de révélation. Les «Ummi» seraient donc l'équivalent des «110ns du monde» chez les gens du Livre. Le Coran dit des gens du Livre: «Parmi les Gens du Livre, il en est qui, leur confierais-tu un quintal, ne te le rendrait; il en est qui, si tu leur confiais un seul dinar, qu'après longue insistance de ta part. Cela tient à ce que selon leur dire: - il n'y a pour les autres communautés contre nous nul recours».
On voit bien que certaines gens du Livre établissent cette différenciation afin, pour les acc de rendre licite pour eux les biens et les personnes des autres peuples. Attitude qu'ils se sont permis d'adopter à partir de l'interprétation des Dix Commandements lorsqu'ils prescrivent: «Ne désire ni la femme de ton proche, ni ses biens, ni son domicile, ni sa monture», comme si les biens des autres, lointains, leur étaient licites et qu'ils sont donc libres de les convoiter et de les acquérir à leur guise. Dieu dans Sa toute puissance répond à ces allégations lorsqu'Il dit: «Ils disent des mensonges sur Dieu alors qu'ils savent». Il ne font donc que mentir lorsqu'ils prétendent que rien ne leur interdit les richesses des autres peuples, tant leurs biens que leurs personnes. En réalité, Régis Blachère, en interprétant «Ummi» par les gentils et en traduisant le prophète Ummi par prophète des gentils, en d'autres termes le prophète des païens, se contredit, car cela voudrait dire que le Prophète (P.S.) était un idolâtre alors que notre auteur sait pertinemment que jamais Mohammad (P.S.) ne s'est prosterné devant une idole et qu'il n'a jamais embrassé les anciennes croyances de son peuple. Il suivait, avant la révélation, la religion de son ancêtre Abraham et il parjurait les croyances de Qureich en se retirant dans la caverne de Hira. Blachère est donc sûr que le Prophète (P.S.) n'a jamais participé aux rites paganistes de quelque peuple que ce soit. Les orientalistes sont donc dans le faux le plus total en interprétant «Ummi» comme étant l'état des peuples n'ayant jamais reçu une révélation divine. La question est en réalité posée au niveau du principe, car les gens du Livre et les gentils sont tous deux égaux devant le message que le Prophète devait leur faire parvenir, Dieu dit en effet à son messager:
«S'ils argumentent contre toi, dit: «Je soumets ma face à Dieu, moi et quiconque me suit».
Puis Il dit aussi bien à ceux qui ont reçu l'Ecriture qu'aux Ummis:
«Est-ce que vous vous soumettez? S'ils le font, c'est qu'ils se dirigent bien. S'ils se dérobent, seule t'incombait la communication. Dieu est clairvoyant avec ses adorateurs».
Donc, concernant la communication du message, rien ne diffère que les peuples soient-ils avertis ou non.
Ce terme il a été convenu entre savants et philologues qu'il est étymologiquement dérivé du radical «Umm» (La mère). Ce qui veut dire que lorsqu'on dit d'une personne qu'elle est «Ummi», cela voudrait dire qu'elle se trouve dans un état d'innéisme comme un nourrisson tout juste enfanté par sa mère et que donc elle ne peut ni parler, ni écrire....
Ce qui bien sûr ne manque pas de susciter la question suivante: une personne peut-elle demeurer à l'état maternel comme le dit Dieu dans ce verset:
«Dieu vous a fait sortir du sein de vos mères, dénués de tout savoir, Il vous a conféré l'ouïe, la vue, le cœur escomptant de vous gratitude».Cette personne n'acquiert-elle pas avec le temps un certain savoir et vue certaine connaissance de son existence et de l'univers qui l'entoure? Nous savons par exemple que l'homme apprend le langage et s'engage dans la vie, armé de ce savoir, puis acquiert d'autres savoir-faire et compétences qui vont lui permettre de s'intégrer dans la vie de sa société. Cette question n'est pas sans évoquer chez-nous un certain nombre de réflexions concernant ce peuple resté dans l'innéisme maternel. Certes, son état n'a pu que se transformer, mais a été néanmoins caractérisé par la volonté divine. Dieu a voulu les choses ainsi pour un destin divin. Ils sont maintenus dans un innéisme, mais tout en atteignant le summum dans la rhétorique. Ils sont parvenus dans la connaissance de leur langue au plus haut degré au point où ils avaient surpassé les autres peuples parmi ceux qui pratiquaient les autres langues sémitiques comme l'hébreu, le syriaque, l'araméen et d'autres langues qui étaient même parvenues à un stade de réelle maturité.
Nous pouvons affirmer que la langue arabe se distingue non seulement des langues sémitiques, mais aussi de toutes les autres langues par des spécificités propres. Ce n'est pas là une constatation faite à la légère, mais bien sûr une question qui se fonde aussi bien sur des points objectifs que subjectifs. En effet, dans toutes les langues, les termes sont ajustés comme les briques d'un mur où chacune est posée l'une sur l'autre et la forme du signifié, une fois utilisé dans une autre phrase garde toujours le même graphisme. Le changement du graphisme ne se produit qu'en arabe, car c'est une langue où le premier terme agit sur ceux qui suivent et qui y sont rattachés en passant d'un état à un autre; ce qui confère justement son génie propre à cette langue.
Ainsi la phrase (‘Ardu Allahi wasi'a) «la terre de Dieu est vaste» le (l) de Allah est géminé, mais si on introduit la copule (Inna) le (l) n'est pas géminé de même que dans la phrase (Sirna fi Ardi Lahi).
Ce sont là des interactions constantes entre les éléments de la phrase et du discours que nous ne trouvons pas dans les autres langues. Si certains grammairiens l'expliquent par la déclinaison, nous pensons quant à nous qu'au delà de ce phénomène, la phrase arabe est structurée selon une architecture spécifique que ne connaissent pas les autres langues. L'Arabe parle sa langue de Ummi agencée et où la phrase possède une âme dont le noyau est le verbe en tant que l'élément agissant, car il gouverne la phrase différemment que dans les autres langues. Nous savons par exemple qu'en français le phonétisme d'un mot se transforme avec le changement du nombre, cela relève de la conjugaison alors que sur le plan morphologique, les structures sont constantes et ne subissent aucune transformation au niveau des termes, sauf exception.
Nous disions donc que ce peuple resté à son stade originel avait néanmoins atteint dans le domaine de la langue le plus haut degré de perfection, mais c'est l'écriture qu'il n'avait pu connaître. Le nord de la presqu'île arabique maîtrisait tout à fait l'écriture utilisée pour transcrire chroniques et événements historiques, l'Egypte pour sa part avait atteint un rayonnement civilisationnel dont on a pu déchiffrer les secrets à partir des fresques des temples et des papyrus et autres transcriptions. Les Arabes n'ont connu cette activité ni des Perses ni des Byzantins qui pourtant y excellaient. Ils étaient restés cantonnés dans leur désert, ou plutôt Dieu a voulu qu'ils le restent pour des raisons que nous expliquerons après. En fait, «incultes» dans notre verset, veut dire uniquement, ne sachant pas écrire, car ils récitaient et clamaient des textes en prose ou en vers. D'ailleurs, lorsque Dieu dit au prophète (P.S.) dans le 1er verset révélé «lis!» celui-ci étant arabe et appartenant à l'une des plus nobles tribus de Qureich (il disait d'ailleurs): «Je suis le plus éloquent des Arabes» pouvait très bien observer l'ordre de Dieu, mais il a dit: «Je ne le puis» dans le sens qu'il n'arrivait pas à déchiffrer, alors qu'il pouvait très bien réciter ce que Dieu lui dit d'énoncer. Dieu lui dit alors: «Lis au nom de ton Seigneur qui créa....». et le Prophète (P.S.) récita ce verset qui parvint par la suite à l'ensemble de l'humanité, Dieu dit d'ailleurs à d'autres endroits du Coran:
«Et quand Nous l'aurons lu, suis-en la lecture» puis: «Nous te le ferons lire, n'oublie pas» et enfin: «C'est là une lecture qui guide à la voie la plus droite».
Le Coran, en fait a été révélé de manière à convenir tout à fait à l'état où se trouvaient ces Arabes «incultes» qui connaissaient tout à fait leur langue et y excellaient sans pour autant savoir l'écrire.
En les maintenant ainsi dans cet état, Dieu a voulu que leur situation d'inculture intervertisse la règle établie pour les messages antérieurs. C'est qu'en effet la Torah a été révélée transcrite dans des tables comme nous l'apprend le Coran: «Nous lui écrivîmes de toute chose, sur les tables, en forme d'édification et en explicitant toute chose», alors que l'Islam, supervisant toutes les autres religions, s'est caractérisé par son aspect oral qui le distingue des confessions des gens du Livre. Cela signifie tout d'abord que le Prophète (P.S.), ne sachant pas écrire, n'a pas pris connaissance des autres Ecritures, Dieu dit à cet égard:
«Pourtant naguère tu ne récitais le texte d'aucune Ecriture, pas plus que tu n'en retraces de ta droite, et c'est cela qui fait douter les tenants du faux!».
Partant, le concept coranique «al Ummiya» renvoie à ce peuple arabe qui était parvenu à ce haut degré qu'il avait atteint dans la connaissance de sa propre langue au niveau de la rhétorique, de la stylistique et de la poésie, sans pour autant savoir écrire. Le Prophète (P.S.) dit à ce propos: «Nous sommes une communauté «inculte, ne savons ni l'écriture, ni le calcul», mais il n'a pas dit «nous ne savons pas lire». Le sens répandu concernant notre terme et qui veut qu'il signifie généralement l'ignorance de la lecture et de l'écriture devrait être restreint à l'écriture pour un temps seulement, car ce peuple allait par la suite y recourir et l'utiliser pour affronter les exigences nouvelles qui allaient s'imposer à lui. Et c'est le Coran qui lui apprendra cet art par la suite.
Néanmoins, au début de la révélation, pendant les cinq premières années, on estimait à huit personnes ceux qui avaient acquis l'art de l'écriture dans la péninsule. Ainsi par exemple, Fatima fille d'Al Khattab possédait des feuillets où étaient transcrits des versets coraniques du chapitre «Taha». Errité d'avoir appris sa conversion à l'Islam, son frère Omar connaissant également l'écriture, avait fait irruption chez elle (pour la dissuader d'embrasser cette nouvelle religion). Saïd ibn Zayd, son mari, pratiquait aussi cet art. C'est qu'en effet cette technique n'était nullement une fonction mais plutôt un art. Elle n'était pas nécessaire et ne s'était donc pas répandue parmi ce peuple. Mais le Coran allait plus tard combler cette carence. C'est qu'en effet ces Arabes possédaient alors une forte mémoire qui suffisamment aux services que pouvait rendre l'écrit. Ils mémorisaient tout ce qui était dit ou convenu. En outre, lorsque quelqu'un parmi eux prenait une décision, sa parole seule l'engageait exactement comme s'il le faisait à l'appui d'un écrit. Et ce n'est que lorsque cette société s'est développée et que les affaires entre les membres de ce peuple se sont multipliées, lorsque la vie musulmane fit naître de nouvelles exigences, que l'écrit s'imposa avec force comme lorsque Dieu prescrivit aux croyants:
«Croyants, si vous convenez une dette à terme fixé, mettez-la par écrit. Que l'inscrive parmi vous un scribe, en toute équité, qu'il ne se refuse pas à l'écrire selon ce que Dieu lui a appris, qu'ils écrivent donc sous la dictée du débiteur», puis il ajoute plus loin: «Ne répugnez pas à mettre par écrit la dette petite ou grande, jusqu'à son terme: cela sera pour vous plus équitable en Dieu, plus valable comme témoignage, plus propre à épargner le doute. A moins qu'il ne s'agisse d'une affaire tout venant, réglable entre vous: alors point de faute à ne l'écrire pas».
Le Coran était d'abord révélé en tant que miracle défiait les arrogants de ce peuple qui en appelaient tout d'abord à leur art de l'éloquence, à leur poésie et à leur rhétorique, car la révélation qu'ils entendaient par la bouche du Prophète (P.S.) surpassait à la connaissance qu'ils avaient de leur langue qu'ils adoraient avec la même passion que leurs idoles. Ce prophète les surpassait tous dans l'art poétique de leur langue qui représentait pour eux le bien qu'ils chérissaient par dessus tout.
Cette maîtrise d'une langue, qui de l'avis des spécialistes, se distingue de plus des 3.000 idiomes que connaissent les êtres humains démarquait le Prophète (P.S.) de tous ses contemporains parmi les Arabes. Mais ce sont là des détails sur lesquels nous n'avons pas l'intention de nous étendre plus. L'essentiel, c'est que lorsqu'il reçut la révélation, le Prophète (P.S.) a opté pour la maison de Al Arquam ibn abi al Arquam comme lieu de réunion pour apprendre à ses compagnons les versets qui lui étaient parvenus, les leur faire réciter et discuter leur énoncé, comme le lui prescrivait le Coran:
«Et Nous avons fait vers toi descendre le Rappel pour que tu expliques aux humains ce qui à plusieurs reprises était vers eux descendu: Nous les engagions ainsi à réfléchir».
Pendant cette période mecquoise qui avait duré treize années, le Prophète avait œuvre pour débarrasser les esprits des convertis de la mécréance qui les avait gagnés, de l'ignorance accumulée pendant la période anté-islamique, de l'idolâtrie et des illusions qui les avaient atteints.Oeuvre que seul le Prophète (P.S.) était en mesure de mener à son terme par l'effort soutenu afin de dissiper les ténèbres où vivaient ses compagnons et leur faire entrevoir les signes d'Allah contenus dans les versets qu'il leur apprenait. Ils se réunissaient chaque jour autour de l'Envoyé (P.S.) qui leur apprenait ce qui lui avait été révélé (d'ailleurs la plus grande partie de la révélation eut lieu à la Mecque) puis le leur faisait réciter, parvenant ainsi à façonner leur esprit par le Coran qui allait alors supplanter progressivement leurs connaissances acquises pendant la période de l'ignorance (Jahiliya).
Dans ces réunions, ces néophytes, subissaient en fait, une mutation en remplaçant un discours par un autre, une littérature par une autre et un art par un autre. L'Islam avait alors défié tous les Arabes de forger ne serait-ce qu'un seul verset semblable à celui du Coran, ou un vers de poésie aussi merveilleux. Ce défi était lancé en ces termes par le Coran:
«Dis: - Si les hommes et les génies s'unissaient pour produire rien de semblable au Coran, ils y échoueraient, même en se soutenant les uns les autres».
Acculés, ils se rendirent à l'évidence qu'ils ne pouvaient relever ce défi et le Coran prit alors dans la vie des Arabes une place prépondérante de sorte qu'on ne parlait que de ce Livre qui suscitait discussions, controverses et rivalités dans son assimilation et sa mémorisation.
Le rang des Musulmans ne fit alors que grossir de jour en jour, d'année en année et d'étape en étape alors que celui de la mécréance se réduisait comme une peau de chagrin pour céder la place au monde nouveau de la foi rayonnante. A cet égard, il convient de remarquer que l'empire de la poésie faisait l'orgueil et la fierté des Arabes, voire leur suffisance pour défendre le faux, comme lorsque `Amr ibn Kulthum dit:
«Lorsque l'un de nos nourrissons est sevré.
Les monts se prosternent devant lui en adoration».
Cet empire, disions-nous, connut son déclin et son crépuscule. Cette arrogance, ressentie par ce poète isolé des connaissances de son époque dans sa presqu'île arabique, ne pouvant même pas affronter les puissances ainsi que la civilisation qui l'entourait, ne trouvait sa justification que dans l'ignorance de son époque et de son peuple. La révélation est donc venue mettre fin à l'empire de la poésie anté-islamique et le remplacer par celui du Coran en instaurant une vie nouvelle où on ne parlait que de ce Livre et de ses aspirations, de Mohammad (P.S.) et de son éloquence ou des questions auxquelles répondaient les versets révélés et les normes qu'ils établissaient alors. Plus tard, à Médine, la révélation continua jusqu'à la mort du Prophète (P.S.) et l'empire de Coran finit par s'établir définitivement après la disparition du messager d'Allah.
Le dernier verset où il est dit: «Prémunissiez-vous contre le Jour où il sera de vous fait à Dieu retour, où toute âme récupérera ses acquis, sans la moindre injustice» fut révélé quatre jours avant la mort du Prophète pour clore ce beau cycle coranique. Puis on assista après à un réel prodige. Toute cette société anté-islamique abandonna totalement son ancien discours, ses conceptions n'était plus qu'une époque révolue, on n'entendait plus que le Coran clamer tout haut:
«Vous annoncerai-je sur qui s'opère la descente contrefaite de Satan? Elle s'opère sur tout imposteur et pêcheur: Quant aux poètes, ne les suivent que les fourvoyés, ne vois-tu pas qu'ils brament dans toute vallée et qu'ils disent ce qu'ils ne font pas? Exception faite de ceux qui croient, effectuent des oeuvres salutaires, rappellent Dieu sans trêve: ils ont triomphé après avoir subi l'iniquité, tandis que ceux qui l'ont commise sauront quel retournement ils vont subir».
Le Coran n'a bien sûr pas condamné la poésie en totalité, il a néanmoins maintenu celle qui recèle l'éthique de ceux qui ont la foi, font oeuvre pie et agissent pour le bien, ainsi que celle qui défend la vérité contre l'injustice et répond aux poètes qui dénigrent le Prophète (P.S.), l'Islam et les Musulmans. Ce que je soutiens n'est pas de moindre importance, car on ne peut l'affirmer sans preuves ni arguments. C'est ce que j'ai pu réaliser à partir de deux travaux que j'ai accomplis dans ce sens. Le premier date des années 70 et a consisté en une étude statistique de toute la langue arabe à partir du dictionnaire «Taj al Arous» qui contient tous les mots de cette langue. Cette étude qui s'est en outre penchée sur cinquante dictionnaires nous a révélé que par exemple «Assihah» de Jawhari comporte le tiers de la langue et que «Lissan al Arab» qui a emprunté au «Sihah», au «Attahdhib» et au «Al Jamhara» contient les deux tiers. «Taj al Arous» lui contient la totalité de la langue et s'est reporté à cent cinquante six références, ce qui lui a permis de passer en revue toute la matière de la langue arabe.
Mon étude a consisté à recenser les racines de toute cette matière, ou ce qu'on appelle en français les radicaux, car dans cette langue le terme reste constant et ne change pas dans sa structure alors qu'en arabe seules les consonnes restent les mêmes et c'est leur vocalisation qui change, ainsi la racine (Ktb) «écrire» peut devenir Katab, Kutiba ou Kutub ou encore Kitaab (avec un allongé). J'ai alors pu établir que les racines sont de trois sortes: trilitaires comme dans (Ktb) et qui se composent de 7.597 racines, quadrilitaires comme (BAcTR) et (DHRJ) (4.081), des racines de cinq consonnes (environ 300). Cette étude a été éditée et diffusée sans que personne ne lui objecte quoique ce soit ou lui adresse quelque critique et ce, depuis 1973.
Le deuxième travail a été effectué pendant les années 90. J'avais alors présenté un index détaillé des versets coraniques en dix tomes et où j'avais extrait les racines utilisées par le Coran.
A la fin de chaque tome se trouvaient les racines tirées à partir des versets du Coran. Seul, et sans l'aide de personne, j'en ai établi un classement. J'ai pu alors constater que les racines trilitaires sont au nombre de 1.610, que les quadrilitaires ne dépassent guère 12 et qu'on ne trouve pas une seule racine de 5 consonnes.
En effectuant les pourcentages, je me suis rendu compte que la matière coranique ne représentait que 15% de la matière arabe. Où sont donc passés les 85% restant?
Pour ce qui est des racines trilitaires dans le Coran, elle représentent 20% de celles de l'arabe, pas plus, où sont donc passés les 4/5 de la matière?
Tout cela est en fait passé dans les dictionnaires pour constituer un surplus de termes utilisés très rarement ou pour un besoin spécifique quelconque. L'étonnant en tout cela, c'est que les gens n'ont nullement conscience de cette réalité et ne se rendent pas compte que pour communiquer, ils utilisent la matière coranique. A cet égard, j'ai réalisé une expérience pour me prouver qu'effectivement c'est cette merveilleuse langue coranique qui nous suffit pour notre communication. De chaque racine, on pourrait dériver environ 100 signifiants. Ainsi, du trilitaire on forme 14 paradigmes qu'on dérive à leur tour pour obtenir autant de formes, ce qui fait 100 dérivation au total. On voit donc que la langue coranique est vraiment riche et a pu procurer les termes pour les besoins littéraires de la communauté à l'époque des compagnons du Prophète (P.S.) et peut encore aujourd'hui combler nos besoins actuels et ce, jusqu'au jour de la résurrection.
Ce qui m'a paru étrange après cette étude statistique, c'est que j'ai travaillé sur un article écrit par Taha Hussein (Que Dieu ait son âme) alors qu'il vivait une période de doute et de scepticisme et qu'il était séduit par la civilisation moderne et ses relents d'athéisme. Cet auteur avait fait paraître, dans son ouvrage «Hadith al Arbi'a» (Les Causeries du Mercredi) rédigé pendant les années 30, un article de 5 pages dont le thème ne concerne aucune question religieuse. J'en ai extrait les racines et j'ai pu constater qu'elles étaient toutes coraniques.
C'est effectivement bien étrange, car notre auteur, alors même qu'il n'a pas de grandes affinités avec le discours coranique, n'a pas pu s'en défaire et sortir de son cadre puisqu'il s'est imposé à lui avec force. On peut certes trouver dans cet article un terme ou deux non coraniques, mais la langue coranique utilise surtout les racines trilitaires, les racines quadrilatères sont, quant à elles, du domaine de la composition et du néologisme dans (b'tr) = (b't) + (‘tr) que nous trouvons d'ailleurs dans le chapitre coranique «Galoper»: «Alors ne sait-il pas? Quand l'intérieur des tombes sera bouleversé» (bu'thura). Ce qui fait que le discours coranique est essentiellement composé de racines , l'origine même de la langue arabe, et tous les trilitaires utilisés par Taha Hussein sont d'origine coranique. Tout cela nous met devant une réalité étrange: tous que nous soyons, croyants ou athées, amis ou ennemis de la religion, puisons nos termes pour notre communication dans la matière coranique, inconsciemment, comme cela a été établi par l'étude que je viens de présenter. Je ne pouvais que me rappeler alors ce que dit Safy Eddin Al Hilli à propos de l'éloquence:
«Baragouinage qui agresse nos oreilles et nos esprits.
Que sont ces cacophonies
Devant d'autres sons doux à entendre?
Laisse à Al A'sami l'exploration des déserts
Dans une peine qui altérerait les raisons.
Ces termes sont de fer et le meilleur mot pour moi c'est l'aimant qui attire».
Tant la poésie que l'esprit, tant le discours et les termes que la matière de la langue de notre communauté, depuis l'aube de l'Islam jusqu'au jour du jugement dernier sera et sera coranique qu'on le veuille ou le non. A aucun moment, cette 110n n'a ressenti le besoin d'utiliser d'autres significations et d'autres mots ou procédés d'expressions que ceux du Coran. Certes, il reste l'emprunt des termes ou leur arabisation ou d'autres procédés pour exprimer les besoins de la vie moderne, mais la langue arabe demeure néanmoins celle de la vraie signification expressive et l'auteur ou le poète authentique est celui dont l'écrit approche la langue et les expressions coraniques.
Nul parmi les belles plumes et ce, jusqu'au dernier jour ne peut éviter d'employer le Coran et c'est là un miracle qui fait de la 110n musulmane celle de ce Livre saint.
Révolus sont donc pour ce peuple polythéisme et idolâtrie, car il était devenu celui du monothéisme et du Livre jusqu'au jour de la résurrection. Partant, il me paraît nécessaire qu'une attitude soit adoptée:
- Premièrement, on remarque que ceux qui sont en relation avec le Coran maîtrisent le langage et ses procédés mieux que tous ceux qui utilisent une autre langue. Ainsi, l'usager de la langue française par exemple peut se suffire de 500 ou 600 termes dont il connaît la composition et l'utilisation, pour communiquer avec autrui. D'ailleurs, les dictionnaires simplifiés pour enfants et jeunes dans les autres langues contiennent jusqu'à 1000 mots tout au plus. Certes, les gens possèdent des capacités inégales, mais celui qui mémorise le Coran retient en même temps toute la matière de sa langue, donc une compétence certaine. Les termes coraniques n'arrêtent pas de l'enrichir et de lui procurer des compétences langagières inépuisables, car cette personne aura accédé à un vrai patrimoine linguistique et à des significations merveilleuses. C'est ce qui distingue tout d'abord le Musulman utilisant l'arabe de ceux qui utilisent une langue étrangère.
- Deuxièmement, cette communauté qui dispose d'un matériel linguistique aussi génial et aussi expressif a pourtant tourné le dos à l'arabe et a adopté des langues étrangères dans les domaines culturel et scientifique. Pourtant, il est aujourd'hui des peuples dont les langues sont mortes depuis déjà deux millénaires, mais qui commencent à les faire reconnaître et à leur donner vie: ils les utilisent dans les sciences et dans leurs relations internationales pour amener le monde à respecter leur volonté. En Turquie par exemple, j'ai voulu savoir avec quelle langue la médecine et l'architecture étaient étudiées.
On m'a répondu que c'était en turc et la raison en est qu'il s'agit là pour eux de dignité et de sentiment 110nal pour lesquels ils tenteront l'impossible pour le développement et la renaissance de leur langue et de leur société. Après la révolution bolchevique de 1917, méditant la situation, Lénine s'est rendu à l'évidence que le progrès est le fait de l'Europe et que la langue russe était ce qu'il y avait de plus sous développé. Il fonda alors un cabinet de traduction comportant 100.000 traducteurs dont il supervisait lui-même le travail. Il a pu ainsi faire renaître de ses cendres la langue 110nale par la traduction de toutes les sciences de l'époque. Cette action n'a pas manqué de transformer le russe en une langue de civilisation exprimant tous les concepts nouveaux et ce peuple a même pu surpasser d'autres dans le domaine de la recherche spatiale lorsque Youri Gagarine a été propulsé dans l'espace à bord de la fusée «Spoutnick».
Telle doit être l'attitude de ceux qui désirent la renaissance de leur communauté qui ne saurait se produire en dehors de la langue maternelle et de l'expérience personnelle. En effet, cette renaissance doit émaner du for intérieur du peuple et de son identité. Et c'est pareille renaissance, ou plutôt révolution, que la langue arabe nécessite le plus aujourd'hui. Nous devons obligatoirement relever les défis qui s'imposent à nous. On dit que nous sommes arriérés.
Comment le peuple de l'unicité et le maître du monde en matière du verbe peut-il être classé parmi les 110ns sous développées et celles du tiers monde....?
Soyons donc au moins à l'avant garde des peuples en voie de développement en prenant d'assaut les domaines civilisationnels afin de rendre sa place à notre langue après que certains peuples l'ont sacrifiée devant l'autel du modernisme au profit des langues étrangères voulant ainsi être plus royalistes que le roi, en devenant plus anglais que les Anglais.
Comment peut-il arriver que ces personnes perdent ainsi leur identité? Nous espérons vivement promouvoir cette nouvelle révolution pour la restauration de l'empire du Coran qui nous ramènera au sein de ce Livre qui a édifié notre 110n et lui a insufflé la vie.

Hadith du jour
"Zaïd Ibn Tabit a dit : "Nous prîmes le dernier repas de la nuit (Sehour) avec le Prophète Sidna Mohammed, que la Bénédiction et le Salut de Dieu soient sur Lui, ensuite, il se leva pour aller à la prière.
- Combien de temps s'écoula-t-il entre l'appel à la prière et le dernier repas, demande Anas ?
- Le temps de réciter cinquante "Sourates», répondit Zaïd».
Traduction : Association Al Imam Al Bokhari.
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