Entretien avec l'écrivain Abdelkader Benali, le jeune prodige
Parmi les écrivains qui ont participé à « Phares du Nord », un jeune talent néerlandais d'origine marocaine aura marqué le public. Il s'appelle Abdelkader Benali, il a 26 ans et son premier roman, « Noces à la mer », qu'il est venu présenter durant cette
LE MATIN
23 Février 2002
À 18:41
Votre premier roman, « Noces à la mer », a été plus qu'apprécié aux Pays-Bas et partout dans le monde, comment expliquez-vous ce succès ?
Vous savez, pour un écrivain, un livre est toujours connu pour les mauvaises raisons. Quand j'écrivais mon roman, je ne me disais pas que j'allais raconter une histoire qui a lieu au Maroc, pour faire dans l'exotisme et mieux vendre mon livre par exemple. J'ai juste essayé de mettre sur papier des choses que je ressentais, en donnant naissance à des personnages qu'il a fallu par la suite faire vivre. Maintenant, mon roman a eu du succès, tant mieux. Il y a des gens qui sont venus me dire qu'ils ont aimé ce roman, juste pour ce qu'il y a dedans. Cela m'avait fait très plaisir. Il y a différentes manières de lire un roman, et je ne peux pas savoir ce qui a le plus touché chacun de mes lecteurs.
C'est facile de vivre juste de ses écrits quand on est un jeune écrivain aux Pays-Bas, comme c'est le cas pour vous ?
Je suis quelqu'un assume ses choix. Tout est dur dans la vie, alors il faut s'accrocher, y croire tout en essayant de s'améliorer pour faire de son talent un argument. Je lis beaucoup, près de deux livres par semaine, et je pratique aussi énormément. J'essaye d'être professionnel. Je sais que c'était dur, ça l'est encore aujourd'hui et ce le sera encore demain, mais, il faut essayer de donner toujours le meilleur de soi-même. Ce qui me frustre le plus dans ce que je fais, c'est le fait de devoir attendre longtemps pour voir le résultat de mon travail. Quand on écrit un roman, on doit attendre un an, deux ans, avant de terminer son œuvre et recueillir après les réactions des gens.
Comment avez-vous été associé à cette rencontre littéraire « Phares du Nord » ?
Par le biais de Rudi Wester. J'avais déjà fais trois rencontres à Londres avec la Fondation pour présenter mon livre. Quand j'ai entendu parler de « Phares du Nord », j'ai espéré au fond de moi que je serais invité. En plus, je me disais que ces gens-là ont vraiment du courage pour aller organiser une telle manifestation dans un pays dont ils ignorent jusqu'à la langue. Alors vous imaginez bien que quand Mme. Wester m'a contacté pour me proposer de participer, je n'ai pas hésité une seule seconde
Comment aura donc été cette première rencontre avec le public marocain ?
Pour moi, « Phares du monde » était une grande réussite. Je suis déjà venu au Maroc en touriste mais, c'est la première fois que j'y reviens pour présenter un livre. C'est une expérience très intense que je viens de vivre. Le public marocain est très émotionnel et c'est quelque chose qui me touche énormément. Pour ma part, j'essaye aussi de trouver les bons mots pour parler de tous sans heurter les sensibilités des uns ou des autres. Les gens ici sont très aimables et savent écouter. Ils sont curieux de savoir qui on est, et pour cela, ils savent qu'on peut se connaître en s'écoutant mutuellement. J'essaierais certainement de revenir encore une fois quand mon roman sera traduit, et quand mon français se portera mieux.
Avez-vous déjà pensé à traduire vos œuvres pour les rendre plus accessible aux lecteurs de votre pays d'origine ?
Au départ, je voulais faire traduire mon roman, « Noces à la mer », en Tamazight. Alors, comme je savais que les gens sont encore peu alphabétisés dans la région, et que la culture orale est celle qui domine encore, j'ai pensé présenter mon roman, sous une forme audio. Mais, la manœuvre s'est avérée très compliquée, alors j'ai fini par laisser tomber. Mais je continue d'espérer qu'une traduction en arabe ou en français sera un jour possible.