Fête du Trône 2006

Goytisolo, l'auteur rebelle espagnol publie prochainement un texte sur « El Pais »

A Tanger, où il a pris ses quartiers d'été, l'écrivain espagnol qui vit au Maroc, Juan Goytisolo, a appris la nouvelle. Non loin de là, au large de Tétouan, l'armée espagnole avait envahi, au petit matin du mercredi 17 juillet, l'îlot Leïla et délogé la

18 Juillet 2002 À 21:20

L'intellectuel engagé, devenu par ses prises de position une sorte de mauvaise conscience du royaume ibérique, pouvait-il rester silencieux, ne pas s'exprimer sur un tel coup de force militaire survenu à l'aube et surtout au 21ème siècle ? Ce jeudi matin, nous avons pris langue avec cet auteur qui a coutume de dire que sa « patrie est la langue de Cervantès » et de se décrire comme « un oiseau solitaire ». Nous avons donc sollicité la réaction de Juan Goytisolo, celui-là qui a arpenté en mars dernier les territoires occupés palestiniens et Israël pour raconter magnifiquement sur les colonnes du quotidien « Le Monde » l'occupation. Au téléphone, l'auteur, récompensé récemment pour son talent de rebelle par le prix Octavio Paz, est hésitant. Non pas qu'il ait une idée claire et précise « sur une affaire grave », mais il préfère, nous explique-t-il, réagir « par l'écriture ». D'ailleurs, nous a-t-il appris, il est en train de mettre en mots sa réflexion sur l'affaire Leïla –« le texte sera prêt dans deux ou trois jours »- qu'il publiera incessamment sur les colonnes de « El Pais ». Hier, ce quotidien madrilène avait publié, sur la même question, l'article d'une historienne espagnole évoquant « le faux contentieux de l'île Perejil », ce rocher sur lequel « l'Espagne n'a jamais exercé de droit de souveraineté ».
Quel rôle pour les intellectuels ?
L'écriture comme arme essentielle de combat, telle est celle de Goytisolo qui est membre du Parlement international des écrivains. L'homme préfère l'écrit à l'oral même s'il fait partie de ceux qui ont milité pour que la place Jamaa El Fna, à Marrakech où il vit depuis de longues années, soit inscrite au patrimoine universel oral… « Depuis que je vis à Marrakech, on m'appelle El Mauro.
Et lorsque je vivais en France, on me qualifiait de afrancesado », déclarait-il, il y a quelques années, à un journal de l'Hexagone.
Les critiques littéraires reconnaissent aisément à cet écrivain « la liberté de l'exilé ».
Il n'a pas l'habitude de mâcher ses mots ni de masquer sa pensée lorsqu'il explore l'injustice. Ses textes sur Sarajevo ou encore son ouvrage consacré à la guerre civile en Algérie (publié en 1994) en témoignent.
A toutes les rencontres hispano-marocaines, l'interrogation résonne comme un vœu pieux. Quel rôle des intellectuels des deux rives peuvent-ils jouer dans le rapprochement de deux pays condamnés à s'entendre ? Aujourd'hui plus que jamais et à l'aune d'une actualité aux accents anachroniques, la réponse à ce questionnement est une urgence…


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