«Quelqu'un de bien» de Patrick Timsit : un beauf hystérique
Comment un frère qu'on déteste devient quelqu'un de bien en donnant un bout de son foie ? Le deuxième film de Patrick Timsit est une lourde comédie sous acides, parfois hilarante, parfois indigeste et plus drôle du tout.
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LE MATIN
17 Décembre 2002
À 17:53
Pendant que Marie choisit sa robe de mariée, Pierre choisit son cercueil. Pas d'idée macabre du mariage derrière ça, bien au contraire. Mais Pierre est atteint d'une cirrhose aiguë. D'après le docteur, s'il ne reçoit pas rapidement une greffe du foie, il lui reste entre deux et six mois à vivre. Le compte à rebours a commencé. Sauf que les foies libres, frais et compatibles sont une denrée rare. Le plus simple reste de demander à un membre de sa famille, en bonne santé si possible. Mais on n'imagine pas combien c'est difficile de se faire ouvrir le ventre pour concéder un petit bout de sa chair. Paul, le frère de Pierre accepte immédiatement. Générosité des plus déconcertantes quand on sait que les frangins ne se sont pas vus depuis dix ans et qu'ils se détestent cordialement.
Paul est représentant en produits thalasso. La semaine, il parcourt l'hexagone dans des voitures hors de prix, picole, trompe sa femme avec des masseuses et fréquente les clubs échangistes.
Le week-end, il rejoint sa dite femme, Élisabeth, qu'il a quand même piquée à Pierre une semaine avant leur mariage. Question image de marque, c'est pas terrible. Ajoutez à cela un côté beauf rentre-dedans complètement hystérique, sensibilité refoulée derrière de très mauvaises blagues. Vous obtenez le portrait de l'anti-donneur de quoi que ce soit. Le concerné confirme : «Donne-moi une bonne raison de faire ça pour toi». Réponse hésitante de Pierre : «Parce que... tu serais quelqu'un de bien».
C'est la première idée du film : comment, par un geste totalement gratuit, une tête à claques peut s'octroyer une image type respectable ? Bon ressort comique mais enjeu scénaristique faiblard. Heureusement se profile une question nettement plus intéressante : pourquoi Pierre et Paul se haïssent-ils autant ? Pas de retour en arrière ni de d'analyse très poussée mais on devine les grandes lignes : le grand frère qui a toujours délaissé le petit, le petit qui a séduit la femme du grand et puis cette impression, désastreuse et réciproque, d'être radicalement différents... Pourtant, le sont-ils vraiment ? Leurs vies, qui semblent si contraires, ne pourraient-elles s'interchanger ? Ces considérations donnent au film contenu et liant sans lesquels il ne serait qu'on long déferlement sous acides d'humour kitsch, lourd, parfois vulgaire.
Le jeu de José Garcia dans La Vérité si je mens, serait, en comparaison, de la fine dentelle. Patrick Timsit est plus charmant que d'habitude mais un peu fade. Marianne Denicourt, adorable, est cantonnée à un rôle de gentille et jolie gourde.
Les personnages féminins sont si peu reluisants et les délires tellement limités à lever le coude et baisser son pantalon, qu'on se dit que ce doit être un film pour mecs. Des répliques hilarantes succédant à des scènes particulièrement douteuses, le mélange laisse un vague goût de vitamines rances. D'autant que cette comédie de Patrick Timsit (deuxième film après Quasimodo d'el Paris) accuse un net penchant pour le glauque. Humour noir dira t-on. Plutôt graveleux. Mais l'humour, c'est comme les greffes, parfois ça ne prend pas.