"Maroc aux villes propres" de l’Agenda 21 à Agadir : grandeurs et servitudes d’une cité à l’épreuve de la modernité
Les Ateliers d’Agadir, inscrits dans le cadre de l’Agenda 21,organisés conjointement par le ministère de l’aménagement du territoire et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), s’ouvrent aujourd’hui à Agad
Comme les précédents, ils se caractériseront par la publication d’un Pacte de la ville d’Agadir.En exclusivité, nous publions ci-dessous la contribution d’Olivier Toutain, urbaniste, qui dresse le diagnostic de la ville et propose aux participants une feuille de route.
Pôle régional entre le Nord et le Sud du Maroc, Agadir est la cinquième agglomération dans l’armature urbaine du pays. Détruite par le séisme de 1960, la ville connaît aujourd’hui un développement urbain considérable soutenu par un dynamisme économique qui tire partie des atouts naturels dont elle dispose. Les enjeux démographiques à Agadir occupent une place essentielle dans l’analyse du processus de son développement : entre 1982 et 1994, la Wilaya d’Agadir est, au niveau national, celle qui a connu le taux d’accroissement de population le plus élevé (3,7 %). A l’échelle des communes urbaines du Grand Agadir1, ce taux a été de 5,76 % soit un résultat largement supérieur à la moyenne urbaine nationale (3,6%). Cette croissance tend aujourd’hui à se déplacer dans les communes rurales périphériques où se développent des centres urbains comme Laqliaa, Aourir, Drarga…
Une croissance urbaine qui frise l’anarchie
Agadir constitue un pôle considérable d’attraction de la population à l’échelle nationale dont l’aire de recrutement touche à la fois les provinces du Sud, les montagnes mais également les régions du Nord. Cette dynamique migratoire résulte du dépeuplement des régions rurales défavorisées et du dynamisme économique de l’agglomération, dont le rôle est déterminant auprès des ménages en quête d’un emploi et d’une amélioration de leurs conditions économique et sociale.Malgré une diminution du taux de croissance tendanciel, la croissance de l’agglomération va se poursuivre à un rythme soutenu au cours des quinze à vingt prochaines années. La population du Grand Agadir, qui était de près de 500.000 habitants en 1994 devrait doubler et dépasser le million d’habitants d’ici 2008. Au rythme de croissance actuel, 25.000 nouveaux urbains s’y ajoutent chaque année.
Le grand Agadir est aujourd’hui une vaste agglomération qui occupe une superficie urbanisée de 170 km2 sur plus de 25 Km de long. Bordé par l’Océan Atlantique et limitée au Nord par les derniers reliefs du Haut Atlas, la ville se développe aujourd’hui sur la plaine du Souss Massa. Cette extension s’effectue au détriment des terres agricoles et de l’arganeraie et gagne par endroits le secteur des piémonts où se développent des noyaux d’habitat non réglementaire.
Ce développement spatial donne à l’agglomération l’image d’un ensemble urbain en « pièces détachées » le long de l’oued Souss et des grands axes routiers (Marrakech, Taroudant…). De ce constat se dégagent des tendances lourdes de développement spatial et de fortes contraintes en matière d’encadrement urbain. L’organisation socio spatiale d’Agadir traduit un déséquilibre important entre le centre moderne structuré, pôle administratif et touristique, et les quartiers périphériques qui apparaissent marginalisés et ruralisés. Les indicateurs de développement dans l’agglomération font ressortir une situation très inégalitaire et des contraintes socio-économiques fortes qui risquent, si l’on n’y apporte pas de réponses, de conduire à la marginalisation progressive d’une partie importante de la population urbaine.
L’importance du taux d’analphabétisme dans le Grand Agadir en 94 (40,5%) constitue à la fois un problème social réel mais aussi un frein au développement économique de la ville. Celui-ci a en effet des conséquences négatives sur l’emploi et la formation, dans le contexte d’une plus grande exigence de qualification de la main-d’œuvre dans les différents secteurs d’activité de la ville (tourisme, services…).Au niveau de l’emploi, les taux de chômage urbain de l’année 2000 dans les préfectures d’Agadir Ida Outanane (16,4%) et d’Inezgane Aït Melloul (15,8%) font ressortir un résultat plus favorable comparé à l’urbain national (19,5%) qui est, en grande partie, le fruit du dynamisme économique de la ville. Il cache cependant des disparités et des écarts importants en matière de revenus et d’activité (emplois informels, petits métiers…).
Pôle de croissance et de développement, Agadir s’affirme aujourd’hui comme une métropole économique incontestable. En s’appuyant sur sa position charnière entre le Sud et le Nord du Maroc et la diversité de ses fonctions, la ville a su capter une part importante de l’attractivité nationale en tirant partie des atouts naturels et économiques dont elle dispose, mais aussi du dynamisme de sa population.