Moins policier mais plus drôle, scénario un peu pauvre mais blagues qui s'affinent, le dernier Taxi est peut-être le meilleur des trois. Il faudrait cependant que les producteurs stoppent leur obsession du tiroir-caisse avant de se laisser complètement en
LE MATIN
31 Janvier 2003
À 19:35
Une horde de riders (bande à rollers) catapultée d'on ne sait où dévale toutes les rampes de la ville à la poursuite d'un inconnu casqué manifestement en fuite. Cascades en bataille, l'époustouflante course s'achève sous le célébrissime taxi du non moins connu chauffeur marseillais, Damien (Samy Naceri) tranquillement occupé à sa pause déjeuner. Ni une, ni deux : devant la liasse allongée par le cavaleur (Sylvester Stallone), Damien précipite son casse-croûte et s'apprête à tester ses nouvelles «options». 298 kilomètres à l'heure à l'aide d'un mélange au pastis, de quoi duper tous les radars et atteindre l'aéroport marseillais en 19 minutes chrono. Jolie performance qui n'aura dans le film qu'une fonction introductive. Qui est le fuyard ? Qui sont ses poursuivants à roulettes ? Peu importe, on zape bien vite avec un générique stylé «à la James Bond». 007 est décidément tendance cet hiver, en support esthétique et parodique servant à la fois de modèle et de contre modèle. Mais sur le trajet du genre, Taxi 3 laisse espionnage et intrigue policière loin derrière, pour foncer, pied au plancher, vers la comédie d'action. Rollers, vélos, voitures, bolides, et même skis : tout ce qui roule ou qui glisse a droit à sa performance acrobatique. On n'est pas dans la sensation forte avec profusion d'accidents et explosions mais plutôt dans la démonstration de maîtrise de l'engin, la pirouette de cirque. Que les cinéphiles traînés de force où cette troisième grosse production signée Luc Besson se rassurent : ce nouveau Taxi a également soigné son texte. Pas de grands discours, bien-sûr, mais des échanges en duels, rapides et précis, pas extrêmement fins mais jamais vulgaires et particulièrement marrants. Samy Naceri est fidèle à lui-même, Frédéric Diefenthal et Bernard Farcy se surpassent. Leurs personnages, Émilien et le commissaire, sont en revanche complètements dépassés : ils s'acharnent depuis des mois sur un gang de pères Noël braqueurs de banques. Ils auraient été plus facile à repérer en juillet mais, manque de chance, on est en décembre. C'est une catastrophe pour Émilien qui en rêve la nuit et n'a même pas noté que sa femme était enceinte. Idem pour Damien : il passe plus de temps avec sa voiture qu'avec sa belle. Observation : le duo de choc travaille trop. Raison de plus pour suivre les pères Noël à Tignes, histoire de prendre l'air, et la neige. Jamais deux sans trois : dérogeant à la règle des séries qui tirent en longueur, la machine Taxi gagne en goût en prenant de l'âge. Il faut rester cependant dans l'esprit de vitesse et ne pas trop s'arrêter sur les détails et les incohérences narratives. Le scénario est pauvre, tant pis : tout est dans la forme. Et la forme carbure. Rayon garage, on remarquera quand même que Marseille est reléguée au rang des figurants, condamnée à n'apparaître que sur la portière des voitures. Il faut également citer, au passage, l'indignation de la prévention routière française devant cette apologie de l'excès de vitesse. Luc Besson s'en défend avec force avançant qu'il fait bien la différence entre la réalité et le cinéma. Puissent les taxis et automobilistes casablancais en faire autant. Autre réserve, plus amère : ce dernier Taxi dévale doucement vers le publifilm, suivant, là-aussi, le (mauvais) exemple du dernier James Bond. Certes, les voitures font partie du casting (à pieds, l'effet n'était pas le même). Pas de naïveté qui tienne : le cinéma est une industrie nécessitant des sponsors. Mais on peut néanmoins s'offusquer de ce marketing agressif. Les comédiens en oublieraient presque leur répliques au profit d'un slogan type «Vous avez vu ma voiture? Elle est bien étanche n'est-ce pas ?» (démonstration dans une piscine). «Et que pensez-vous de mon téléphone portable?». C'est pourtant Peugeot, avec Megarama le distributeur de Taxi 3, qui a organisé, mardi soir, une projection du film en grandes pompes. Sur l'esplanade du cinéma, les deux nouveaux modèles du fabriquant, fraîchement débarqués au Maroc. Dans la grande salle, une somme d'invités gâtés. Une avant-première, une sortie mondiale : là aussi les efforts sont louables. Mais soutenir le cinéma plutôt que l'investir, l'image de Peugeot ne s'en porterait que mieux. Quant au Megarama, il parvient de plus en plus souvent au but fixé : sortir les films au Maroc en même temps qu'ailleurs.