Création du Conseil français du culte musulman : plaidoyer pour un nouvel institut de formation des imams
Le président de la Fédération nationale des Musulmans de France (FNMF), M. Mohamed Béchari a plaidé pour la mise en place d’un nouvel institut de formation des imams, en association notamment avec le ministère français de l’Education supérieur
MAP
20 Avril 2003
À 17:11
Selon M. Béchari, français d’origine marocaine, les trois instituts existants ont été un «échec». «Un échec dû à des programmes disparates ou purement engagés», a affirmé M. Béchari.
La FNMF est sortie grande gagnante du scrutin, du 6 et 13 avril, pour désigner les futurs membres du Conseil français du culte musulman (CFCM), avec 18 sièges sur 41 au conseil d’administration.
Image de l’imam dans les médias
Cette question de la formation des imams est effectivement l’un des thèmes importants qui seront évoqués au sein de ce futur conseil français du culte musulman. «Je souhaite qu’il y ait en France un institut de formation des imams de France, qui parlent français, qui connaissent notre culture et qui respectent nos coutumes», avait déclaré le ministre français de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy.
Pour M. Béchari, vice-président du futur CFCM, la création d’un nouvel institut, en partenariat notamment avec des universités islamiques «reconnues pour leur ouverture», telles que Al Karaouyine au Maroc, l’Emir Abdel Kader en Algérie et la Zaitouna en Tunisie, est «plus que souhaitable».
Le président de la FNFM a également appelé à la régularisation des imams présents sur le sol français car, selon lui, «pour sortir l’islam des caves, il faut régulariser les imams clandestins».
«La plupart des imams en France n’ont pas de statut juridique légal ni de salaire régulier. Ils vivent souvent de l’aumône des fidèles. Leur situation est vraiment précaire», s’est indigné M. Béchari en précisant que Nicolas Sarkozy a promis que ce dossier sera parmi ses «priorités».
Elaboration de propositions
D’autres chantiers aussi importants attendent ce conseil et qui figurent déjà dans la plate-forme de la Fédération, a observé le président de la FNMF.
La FNMF a en effet élaboré des propositions, lesquelles seront soumises au CFCM. Elles concernent notamment le problème des carrés musulmans dans les cimetières, le pèlerinage, l’aumônerie, et l’image de l’Islam dans les médias et les manuels scolaires français. «Rares sont les cimetières qui disposent d’un carré musulman en France. L’intégration de l’Islam en France commence aussi par les cimetières», a-t-il déploré.
Les conseils régionaux du culte musulman seront d’ailleurs les interlocuteurs directs auprès des mairies françaises pour traiter cette question.
«Nous souhaitons des carrés mais aussi des cimetières dans des régions à forte population musulmane comme Marseille, Lyon, la Lorraine et l’Ile-de-France», a-t-il ajouté.
Le problème du pèlerinage sera posé tout comme celui des aumôniers dans les hôpitaux et les prisons, a encore expliqué M. Béchari. «24.000 musulmans partent année à la Mecque dans des conditions déplorables. Ils constituent une bonne proie pour des agences de voyages sans scrupule», s’est-il ému.
L’image de l’Islam dans les médias et dans les manuels scolaires français constitue un autre sujet de préoccupation pour le président de la FNFM qui compte bien demander la mise en place d’un comité mixte regroupant le ministère de l’Education et des maisons d’édition afin de «travailler ensemble et essayer de rectifier l’image fausse qu’on donne de l’Islam et des Musulmans».
Engagement du gouvernement
Se réjouissant du taux de participation aux scrutins des 6 et 13 avril (88 %), M. Béchari a par ailleurs souligné la «forte adhésion» de la communauté musulmane à un processus «long et difficile».
«Pour la Fédération, c’est l’aboutissement d’un travail responsable et de proximité», a-t-il noté, tout en rendant hommage aux «efforts» et à l’«engagement» du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy. Cette élection du CFCM avait pour objectif «d’achever l’intégration» de l’Islam en France.
«C’est la seule religion qui n’est pas gérée par la loi 1905. Ce traitement à part de l’Islam en France a fait perdurer une gestion policière et sécuritaire», a-t-il relevé.
Financements occultes
Concernant la question des financements des lieux de culte, M. Béchari a estimé que pour barrer la route à des financements occultes, il est «primordial» de mettre à profit la manne de la viande halal. «Le marché de la viande “dite halal” est énorme. Il y a un prélèvement de 1 FF par kilo de viande vendu. 500 000 tonnes de viande halal sont consommées sans compter l’exportation», a-t-il constaté.
«Ces prélèvements qui se font au nom de la défense des intérêts de la communauté musulmane doivent être strictement contrôlés», a-t-il plaidé en appelant à la création d’une «commission de la viande halal» pour que l’argent généré par cette activité finance la construction des lieux de culte ou le paiement des salaires des imams.
M. Béchari est à la tête de la FNMF depuis dix ans.
Cette Fédération regroupe près de 250 associations et lieux de culte à travers toute la France.