Harry potter et la Chambre des secrets de Chris Colombus : moins sorcier qu'aventurier
Deuxième adaptation un peu décevante du deuxième volume de Harry Potter : Chris Colombus a privilégié le divertissement au détriment de l'intrigue et des personnages.
LE MATIN
28 Janvier 2003
À 17:57
Un an depuis la sortie au cinéma du premier épisode «Harry Potter à l'école des sorciers». Un an pendant lequel la «pottermania» a pu encore s'étendre et l'écrivain J.K. Rowling faire trépigner ses lecteurs qui n'en peuvent plus d'attendre le cinquième volume. Tout s'est déclenché récemment : la publication de «Harry Potter et l'ordre du Phoénix» a été annoncée pour le mois de juin en Angleterre (compter quelques mois pour la traduction en français) et «Harry et la chambre des secrets» est depuis la semaine dernière à l'affiche des écrans marocains.
Ce deuxième épisode des aventures du petit sorcier est, il faut bien le connaître, un peu décevant. A grand renfort d'effets spéciaux, le réalisateur Chris Colombus a privilégié le divertissement au détriment de l'intrigue et des personnages. Il l'annonçait pourtant «plus noir» que le premier, chargé de la mise en place.
Un parti pris d'abord : Harry Potter, tout le monde connaît, inutile de perdre du temps en présentations. Aussi, ceux qui n'ont ni lu les livres, ni vu le premier épisode, risquent de se sentir dépassés. Léger rappel à leur intention : après sa première année de sorcellerie au collège Poudlard, Harry, jeune orphelin, passe ses vacances chez son oncle et sa tante, des moldus (non-sorciers) qui le martyrisent depuis l'enfance. Il y reçoit la visite de Dobby, un elfe de maison (création stupéfiante en images de synthèse) qui veut à tous prix l'empêcher de retourner à Poudlard. Un grand danger menace l'école : la chambre des secrets a été réouverte. Mais pour Harry, Poudlard, c'est son vrai «chez lui», pas question de manquer la rentrée. Avec l'aide de son ami Ron, il s'échappe à bord d'une voiture volante, bille en tête, vers sa deuxième année.
Poudre de cheminette (pour se déplacer instantanément), saule cogneur, beuglante (courrier qui hurle la colère du mandataire), mystérieux et magique journal intime, mandragores geignardes : le film s'est attaché à illustrer les merveilleuses inventions de J.K. Rowling. Le château, le parc, la maison du géant Hagrid, les match de Quidditch, les décors sont absolument magnifiques, aucun doute là-dessus. Mais priorité aux images, la narration en pâtit : les événements se succèdent trop vite, frôlant l'incohérence pour les non-initiés et baclant toute subtilité pour les adeptes.
En réalité, l'histoire est complexe : la chambre des secrets enferme une force maléfique qui cherche à tuer tous les élèves dont le sang n'est pas exclusivement sorcier. Initiation inquiétante au racisme pour les mini-mages. D'autre part, Harry se découvre des aptitudes -il entend une voix menaçante, il parle «fourchelangue»- qui ressemblent étrangement à celles du terrible Voldemort. Confrontation avec l'idée de mort, doute de soi, omniprésence des ennemis et des menaces, sans oublier l'esclavage des elfes de maison, la Chambre des secrets ouvre des portes angoissantes.
Mais pas de panique, le film est d'une innocuité quasi totale : un Harry (Daniel Radcliffe) bien fadasse, un Ron (Rupert Grint) énervant de grimaces, ces enfants sont bien loin d'incarner la peur et les troubles de l'être. Heureusement leurs professeurs s'en tirent mieux : Richard Harris (décédé en octobre dernier), était parfait dans le rôle du proviseur magicien Dumbledore, de même Maggie Smith dans celui du professeur McGonagall. Keneth Branagh s'autoparodie allègrement en campant un enseignant imbu de lui-même, plus occupé à faire la couverture de Sorcières hebdo qu'à dispenser ses leçons de défense contre les forces du mal. Quant à Robbie Coltrane, il se glisse à merveille dans la pelisse du bon gros géant Hagrid. On pleurera quand même sur les larmes du phoenix, l'oiseau n'ayant pas eu, à la fin, toute l'étincelante ampleur que J.K. Rowling lui donnait.
Manifestement plus féru de comédie pour enfants («Maman j'ai raté l'avion», «Madame Doubtfire») le réalisateur Chris Colombus a cédé la baguette à Alfonso Cuaron («Y tù mama tambien») pour Harry Potter et le prisonnier d'Azkhaban. Ce troisième volet, actuellement en préparation, devrait sortir autour de Noël prochain, comme de coutume, maintenant, pour les affres cinématographiques du petit sorcier.