L'humain au centre de l'action future

Hommage à Rabat au Poète grec constantin Cavafy, auteur d’une œuvre subversive

Une rencontre a été organisée jeudi soir à Rabat en hommage au célèbre poète grec Constantin Cavafy, à l’initiative conjointe de l’Ambassade de Grèce au Maroc, la Fondation Hellénique pour la Culture et l’Institut Français de Rabat.

12 Avril 2003 À 18:25

La soirée a été animée par la philologue et la critique littéraire Mme Alkistis Soulogianni, par ailleurs Directrice des Relations culturelles au ministère Hellénique de la Culture, qui a relevé que l’attitude du poète par rapport à la notion d’oeuvre et à sa motivation initiale ne cesse d’évoluer. «Il commence par contester l’évidence de la norme linguistique, et passe de la langue des puristes à un compromis original entre la langue savante et la langue populaire, inaugure même un mélange langue écrite et parlée, à la fois archaïque et familière, mêlée d’orientalismes discrets», explique-t-elle.
Commentant toujours l’écriture de C. Cavafy, Mme Alkistis Soulogianni souligne que ses poèmes, un «rire intérieur», sont en général brefs. Les vers sont pleins de sous-entendus, d’allusions, de connotations et d’information autobiographique où se mêlent le réel et l’imaginaire. Cavafy livre en effet «une oeuvre subversive et mordante», ajoute la critique. Le poète «se cache dans ou derrière chaque personnage» et chaque terme: la vérité, les dieux, la mort, l’éternité, la clarté et l’obscurité, le mythe et l’histoire, les symboles, la société et les non-conformismes, le sarcasme et la tolérance, l’amour et la sagesse, le désir, la peur et la honte, surtout l’hellénisme qui n’a pas de frontières que celles de l’esprit, poursuit-elle. «Tout cela, avec une sécheresse du constat et une ironie douce-amère, est le monde textuel de Cavafy». «Pas de fioritures ou de pittoresque. Surtout le nom omnipotent et omniprésent. L’adjectif et l’adverbe sont plus rares. C’est le contraire absolu du romantisme», relève Mme. Soulogianni.
Le sens dépend du lecteur, dit-elle. «Ce sens différé, retenu, suspendu par lui jusqu’à nos jours est le fil qui aide le lecteur à sortir du labyrinthe du temps».
Bensalem Himmich, qui a participé à cette rencontre-hommage, a établi, pour sa part, une comparaison entre cet auteur grec et Al Moutannabi, le célèbre poète arabe, concluant qu’il existe «des affinités d’ordre spirituel» entre les deux auteurs. Il a, par ailleurs, relevé l’absence dans l’œuvre de Constantin Cavafy d’événements internationaux tels la première guerre mondiale ou la perte par la Grèce d’Izmir. Il s’est également étonné que le poète grec n’ait pas appris l’arabe durant son long séjour en Egypte et qu’il n’ait pas eu de contacts avec de grands poètes égyptiens de son temps tels Ahmed Chawki et Khalil Matrane.
Constantin Cavafy compte à son actif une oeuvre très riche dont «Voix», «Cierges», «Murs», «En attendant les Barbares», «Troyens», «Serments», «Ambassadeurs d’Alexandrie» et «Tombeau de Lanis». Ses poèmes ont été traduits en arabe, en allemand, en anglais, en français, en italien, en espagnol, en hollandais, en portugais et en russe.
Constantin Cavafis est né le 29 avril 1863 à Alexandrie. Dès son enfance il voyage, avec sa famille ou seul, en Angleterre, en France, en Turquie, en Grèce.
Il a fait ses études au lycée Commercial «Hermès» à Alexandrie.
En 1892, il est engagé par les Anglais comme greffier au service de l’irrigation, qui dépend du ministère des Travaux publics. Il y restera 30 ans. En 1886, Cavafis publie ses deux premiers poèmes dans la revue «Hespéros» de Leipzig.
Il collabore aussi avec la revue «Phare d’Alexandrie» et la revue «Panathinéa» à Athènes. En 1926, il finance et dirige la revue «Art d’Alexandrie».
Pendant presque cinquante ans, Cavafy a créé son style comme «sceptique, philosophe, mélancolique, d’une ironie amère», et a fait la connaissance des écrivains anglais E.M.Foster et T.S.Eliot, de l’écrivain français André Maurois et de l’écrivain grec de renommée internationale Nikos Kazantzakis.
Copyright Groupe le Matin © 2025