Fête du Trône 2006

Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran : Momo Poulain

En dépit de tous ses bons sentiments, Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran ne parvient pas à rendre crédible son allégorie de rapprochement entre les communautés juive et musulmane. François Dupeyron fait passer quelques messages utiles mais, à trop si

08 Octobre 2003 À 19:13


Déjà producteurs de La Chambre des officiers de François Dupeyron, Michèle et Laurent Pétin ont convaincu le réalisateur français d’adapter au cinéma le monologue de Eric-Emmanuel Schmitt, Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran.

Le projet s’est concrétisé le 11 septembre. «Nous sommes fier de présenter ce film de tolérance dans ce pays de tolérance qu’est la Maroc» a déclaré Michèle Pétin, dimanche soir avant la projection. Difficile, après cela, de poser un bémol à l’opération. Et pourtant. Pétri de bonnes intentions, de gentils protagonistes et de jolies images, le film de François Dupeyron est tellement déréalisé qu’il rend son histoire improbable et son propos inefficace. Qui n’aurait pas envie de croire en des rapprochements entre communautés juive et musulmane ? Seulement voilà, on parvient tout juste à croire en l’amitié du jeune Moïse avec son épicier, Monsieur Ibrahim.

Nous sommes dans les années soixante. Moïse (Pierre Boulanger), juif comme son nom l’indique, est un beau garçon de presque seize ans. Il vit seul avec un père odieux qui l’utilise et le déprécie constamment. A grand renfort de «Salut les copains» (émission radio de l’époque), Moïse se réfugie dans ses fantasmes naissants. Ne pouvant compter sur son paternel pour lui apprendre la vie, il va chercher conseils auprès de Monsieur Ibrahim (Omar Sharif) qui vient du Croissant d’or. Ce vieil homme tout en sourires et sagesse, professe des petites leçons de philosophie quotidienne directement appliquées de sa phrase favorite : «Je sais mon Coran». Et le petit juif, avide de bonheur, de se plonger dans la lecture du texte sacré.

Autant la première moitié du film tient la route, autant la seconde laisse son propos sur le carreau. Le modeste épicier devient subitement un riche ange gardien qui offre à Moïse un voyage initiatique en terre musulmane. Dès lors, tout devient artificiel. Culture et religion sont vendues tout rutilantes comme sur un dépliant d’agence de voyage où les personnages se figent dans leurs sourires.

De «Salut les copains» aux beaux chapeaux et belles voitures d’époque, François Dupeyron fait preuve une fois de plus de savoir faire esthétique en matière de reconstitution historique. Mais on se prend à regretter que le réalisateur ne s’en soit pas tenu à la relation entre un jeune garçon livré à lui-même et le vieil épicier du quartier. En tenant compte de leurs identités mais sans en faire des icônes. Car son «Amélie Poulain sauce amitié entre les peuples» est tellement démonstratif qu’il reste en deçà de ses pieuses ambitions.

Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, film français de François Dupeyron d’après Eric-Emmanuel Schmitt avec Omar Sharif, Pierre Boulanger, Gilbert Melki, Isabelle Renaud, Eric Caravaca.
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