«Une minute de soleil en moins» : le film de la polémique
Le dernier film de Nabil Ayouch, Une minute de soleil en moins, continue d'alimenter une polémique qui n'aurait pas lieu d'être. C'est ce qui se dégage de différentes déclarations faites autour du sujet. La dernière en date est celle contenue dans le comm
LE MATIN
22 Janvier 2003
À 19:25
« Ce procès d'intention ne se justifie nullement, notre pays ayant toujours prôné les orientations d'ouverture, de modernité et d'attachement aux libertés fondamentales, dans le respect des valeurs éthiques et morales qui le guident », précise le communiqué.
Le propos du ministre est qu'aucune partie «ne peut s'ériger en défenseur exclusif» de ces principes fondamentaux, du fait qu'ils constituent «le référentiel commun et le patrimoine collectif du peuple marocain». Le réalisateur du film, en l'occurrence Nabil Ayouch, est le premier à déplorer que le débat ait viré du champ artistique et esthétique pour se placer sur la scène politique. Il s'est même dit «surpris que des personnes qui n'ont pas vu son film en fassent un argument de campagne électorale au sein du Parlement». Et de préciser que la polémique autour de son film est vieille de plusieurs mois. Elle date précisément du mois de septembre dernier. Le long-métrage de Nabil Ayouch était alors programmé au Festival international du Cinéma de Marrakech. Auparavant la commission chargée du visionnage et du contrôle avait formulé des réserves sur certains plans du film et précisé au réalisateur des arrangements à apporter à l'œuvre pour qu'elle obtienne le visa d'exploitation. Nabil Ayouch, estimant que cela porterait préjudice à son film, a pris la décision de n'en rien faire. Ce qui avait impliqué le retrait de son film de la compétition du Festival international de Marrakech. Ce que le réalisateur n'admet toujours pas. Selon le communiqué du ministère de la communication, le réalisateur avait alors «décidé de ne pas sortir son film dans les salles du Royaume et en a informé la commission». Nabil Ayouch s'en tient aujourd'hui encore à cette position. Le réalisateur qui, à un moment, avait fait montre de souplesse a fait couper deux scènes particulièrement visées par la censure. Résultat : son film perdait son sens. «Les deux scènes étant centrales» et, de fait, essentielles pour la compréhension de l'histoire, explique-t-il.
Le processus a donc bel et bien «fait l'objet d'une concertation entre les parties concernées bien avant que le sujet n'ait été évoqué au Parlement», comme le souligne le communiqué du ministère de la communication et le confirme le réalisateur. Ce dernier précise, toutefois, qu'il « n'y a jamais eu d'arrangement comme le laissent entendre certaines parties ».
Nabil Ayouch revendique sa liberté de réalisateur. La question, en effet, se pose. Le débat sue cette question en particulier reste ouvert. Le ministre de la communication a été précisé à ce sujet en soulignant «en matière artistique, en particulier, la liberté d'expression constitue la règle». Pour le ministre de la communication, «le développement harmonieux du cinéma, de l'art et de la création en général, ne pourra valablement s'opérer que dans un espace de liberté et de créativité et dans le respect des valeurs éthiques». Ce qui, à ses yeux, «suppose une démarche de qualité rehaussée et de responsabilité de tous les intervenants, au-delà de toute considération partisane ou démagogique nuisible au secteur, à la consolidation de la démocratie et à l'image du Royaume».
Commission de visionnage
«Je n'ai jamais soutenu la censure», déclare Nabil Benabdellah qui rappelle, toutefois, qu'il «existe des valeurs éthiques qu'il convient de respecter». Pour ses considérations, le film «une minute de soleil en moins» ne peut être diffusé au Maroc. Cela aurait été possible dans un seul cas, conclut le ministre : «Si la législation permettait une classification des films X». Une conclusion qui convient parfaitement au réalisateur, selon ses propres déclarations, parce qu'illustrant le parfait exercice des libertés individuelles. S'il tolère qu'une commission de visionnage dont c'est la mission puisse discuter son film, voir prendre des décisions à son sujet, le réalisateur n'admet pas qu'une «partie quelconque s'érige en censeur et lui impose sa conduite».