Vingt ans après la mort d'Hergé, Tintin est toujours bien vivant
Hergé est mort il y a exactement vingt ans, le 3 mars 1983 mais "les héros ne meurent jamais" et Tintin, son autre moi, son personnage emblématique, est toujours bien vivant.
>Si Georges Remi --le vrai nom d'Hergé qui inversa ses initiales pour en faire
Tintin est né le 10 janvier 1929 dans Le Petit vingtième, supplément illustré pour la jeunesse du journal catholique Le Vingtième siècle, qui l'a envoyé voyager, accompagné d'un petit chien blanc, au Pays des Soviets.
Dessin encore malhabile, sans la maîtrise de cette célèbre ligne claire qui devint la marque de Hergé et de ses disciples, histoire un peu simpliste très marquée par l'anticommunisme ambiant dans l'entourage de Hergé, mais succès fracassant. Et savamment orchestré avec la mise en scène du retour du reporter: le 8 mai 1929 à 16h08 en gare du Nord de Bruxelles, un jeune garçon, une valise dans une main et un Milou en laisse de l'autre descendait de l'express de Liège devant les lecteurs assemblés. Un triomphe et la naissance d'un mythe.
Les premiers essais de Hergé, Flub Nénesse, Poussette et Cochonet ou Totor de la patrouille des hanneton, tombent alors dans l'oubli, même si le maître ne se consacra pas tout de suite exclusivement à Tintin (Quick et Flupke, les malicieux gamins bruxellois, sont nés en 1930 et Jo et Zette en 1936).
Vingt-trois albums se succèdent en tout jusqu'aux Picaros au printemps 1976. Tintin a pris de la consistance, de moins en moins «reporter »et de plus en plus «aventurier du bien» tandis que toute une galaxie de personnages le rejoignait dans ses aventures. Les Dupond/t sont apparus dès 1932 dans Les cigares du pharaon puis ce fut un certain Archibald Haddock, capitaine colérique préférant le whisky à l'eau ferrugineuse et grand inventeur de jurons dans Le crabe aux pinces d'or, suivi de Nestor (Le secret de la Licorne) et de Tryphon Tournesol (Le trésor de Rackham le rouge).
Femme de la saga
Il y eut enfin Bianca Castafiore (Le sceptre d'Ottokar), seule femme de la saga, ne se montrant pas sous un jour séduisant, loin de là, car on ne badinait pas avec la moralité des jeunes lecteurs en ces temps là et le féminisme n'avait pas droit de cité.
Parallèlement, les albums ont évolué. De l'anticommunisme des Soviets ou du colonialisme paternaliste du Congo, on est passé à la défense des petits et des opprimés (Le lotus bleu, Tintin au Tibet, Le temple du soleil, Les Picaros). Les dernières années de sa vie, l'auteur s'était un peu lassé de son héros mais il déclarait néanmoins: «Tintin, c'est moi. Ce sont mes yeux, mes sens, mes poumons, mes tripes». Et il ajoutait, dans sa dernière interview, «Je crois être le seul à pouvoir l'animer. C'est une oeuvre personnelle. Si d'autres reprenaient Tintin, ils le feraient peut être mieux, peut-être moins bien mais ils le feraient autrement, du coup, ce ne serait plus Tintin».
Tintin n'a plus vécu de nouvelles aventures après la mort d'Hergé, Fanny sa veuve y a veillé. Mais, vingt ans plus tard, Tintin est toujours bien vivant, toujours héros favori des Français (avec Astérix) et ses albums continuent à se lire de 7 à 77 ans: plus de 200 millions d'exemplaires vendus à travers le monde, traduits en une cinquantaine de langues dont le latin.