Autour d'un thé avec Ilham Chahine : «Le Maroc est l'un des plus beaux pays que j'ai visités…»
De passage au Maroc pour assister au défilé Caftan 2004, évènement initié par la revue Femmes du Maroc, à Marrakech le week-end dernier, Ilham Chahine s'est tout de suite après envolée vers Rabat sur invitation du ministère de la communication. Habituée d
LE MATIN
05 Mai 2004
À 15:43
Ses rôles ont marqué le cinéma égyptien. Aujourd'hui c'est l'une des stars incontestables du grand écran, mais aussi de la télévision. Dans une interview exclusive, elle nous a ouvert son cœur et nous a parlé de ses débuts, de son premier contact avec les caméras et de son amour pour le Maroc.
Comment a été votre premier contact avec les caméras et les plateaux de tournages ?
Je suis la seule star égyptienne lauréate de l'académie des arts où j'ai étudié la comédie et la réalisation. Dés ma première année à l'académie, ce sont mes professeurs qui me désignaient pour incarner certains rôles, ils parlaient de moi autour d'eux en disant qu'il y a une jeune fille qui a beaucoup de talents et qui, en plus ressemble à la star du cinéma égyptien, Fatine Hamama. Ce qui m'a beaucoup aidé à me familiariser avec le domaine.
Mon premier rôle était dans la pièce de théâtre « houria fi lmarikh». Le réalisateur était mon professeur à l'académie. J'avais 17 ans à l'époque, j'ai enchaîné par la suite avec la télévision, les réalisateurs m'ont découverte petit à petits jusqu'au jour où j'ai joué le premier rôle aux côtés du grand Adil Imam dans « El Halfout». Ce film a marqué un grand tournant dans ma carrière professionnelle. Ce jour là, je suis devenue la star de cinéma et de premier rang après avoir été la star du petit écran.
Votre choix de faire du cinéma est-il né d'un amour particulier pour ce domaine, d'un intérêt sur tout ce qui se passe sur un plateau de tournage ?
Mon choix est née d'un amour et d'un grand intérêt pour ce domaine. J'aime l'art en général et je sais qu'a travers le cinéma je peux critiquer et émettre un avis. C'est la même chose pour les livres alors je me suis toujours intéressée à la culture et l'art dans sa globalité. Au début de mes cours je n'avais même pas l'intention de faire du cinéma. Je visais la réalisation mais à l'académie c'était la même branche et pour qu'un réalisateur maîtrise bien son travail, il faut qu'il s'immisce dans l'univers de l'acteur et comprenne son travail et sa démarche et aussi pour qu'il puisse l'encadrer et suivre de près son travail. Au début c'était ça mon idée. Mais dés ma première année, mes professeurs ont perçu chez moi un certain talent alors que j'étais trop timide. Vous savez, on ne peut pas savoir si on a du talent ou pas. Il faut que ce soit quelqu'un de l'extérieur qui vous le dise et l'expérience le confirme.
Est à cause de votre timidité que vous avez opté pour la réalisation au départ ?
C'est surtout parce que le réalisateur est le leader sur un plateaux de tournage. Il réalise et donne naissance à une œuvre artistique avant qu'elle ne soit cinématographique. Il gère son équipe en ce qui concerne les décors, le scénario et même les comédiens et acteurs.
Mais après avoir fait du cinéma, j'ai oublié la réalisation. Je considère que c'est un rêve reporté. Je n'ai pas eu l'occasion d'avoir des expériences dans le domaine. Mais qui sait, peut être qu'un jour...
Toute femme est à la recherche de l'élégance et d'être unique, est ce le cas de Ilham Chahine ?
Je suis une femme très simple. Je suis certes à la recherche de l'élégance mais aussi de tout ce qui est simple. Dans mes vêtements, il faut d'abord que je me sente à l'aise, que les couleurs reflètent un calme et une certaine pesanteur. Je suis une femme classique.
Choisissez-vous vous même les tenues que vous portez à l'écran ?
Oui. Je porte ce qui reflète le rôle que j'incarne. Rien ne m'est imposé en ce qui concerne cet aspect. Il y a des tenues que je n'oserais jamais porter en dehors des tournages mais que j'achète comme même. Des fois en faisant le lèche-vitrines je tombe sur des choses spéciales et je les achète parce que je m'imagine portant ceci dans l'un de mes rôles.
C'est moi qui choisit tous les vêtements que je dois porter dans le film. Il n'est pas nécessaire que j'aime ce que je vais porter. Il faut seulement que ça reflète le rôle incarné.
Y a t-il un rôle que vous avez incarné et que vous n'avez pas aimé par la suite ou au contraire qui vous a marqué positivement?
Il se peut qu'il y ait un personnage que je déteste en lisant le scénario. Mais j'accepte de le jouer par défi. Je suis une actrice révoltée et qui aime les défis. Je suis toujours à la recherche du nouveau, et d'un rôle qui pourra mettre en avant mes compétences chaque fois un peu plus. Je pars d'un point très important qui est le fait que je sois une actrice, peu importe si je suis jeune ou belle dans le film ce n'est pas le but. Le plus important pour moi est que je puisse incarner le rôle de toutes les femmes que l'on puisse rencontrer dans la vie : gentille, instruite, méchante, intègre, hors la loi, ministre, folle…et j'ai pu incarner tous ces rôles. J'ai même été la mère de l'acteur Hussein Fahmi dans le feuilleton «Al Imbratour» (feuilleton diffusé sur la deuxième chaîne au Maroc).
Quel est le rôle le plus proche à votre personnalité ?
Mon rôle dans le feuilleton «Najmat Al Jamahir» j'étais actrice dans le film et il relatait tous les problèmes que peut rencontrer cette dernière, le regard de la société, l'échec de sa vie personnelle et de ses histoires d'amour parce qu'elle passe tout son temps sur des plateaux de tournage ou entourée des producteurs et réalisateurs. J'ai ressenti qu'il y avait beaucoup de ressemblance entre moi et mon rôle dans le feuilleton.
Est ce que vous pensez à la réaction du public en lisant un manuscrit ?
Je ne pense à rien sauf au personnage dans le film. Le temps d'un tournage, j'oublie même Ilham Chahine et je vis le personnage avec ses petits détails. Sa manière de s'habiller, de parler, de réagir et de se comporter avec les autres et c'est un vrai moment de plaisir que de sortir de sa peau et vivre un personnage qui, au début vous est complètement étrange. A la longue, je sens que j'ai vécu plusieurs vies.
Y a t-il un réalisateur particulier avec qui vous aimez travailler ?
Il y en a plusieurs et j'éprouve un réel plaisir de travailler avec chacun d'entre eux. Par exemple, j'ai fait cinq films avec le réalisateur du feuilleton «Najmat Al Jamahir», Ali Abdelkhalek, c'est un réalisateur au cinéma et lors de sa première expérience pour le premier écran, j'ai travaillé avec lui.
Inés Déghidi est une grande amie et j'aime beaucoup travailler avec elle. On a travaillé ensemble dans le film «Lahmi Rkhiss». Samir Sif a contribué de près à ma réussite. Mounir Radi avec « Ayam Al Ghadab». Il y a beaucoup de réalisateurs qui sont de grands noms aujourd'hui et qui à l'époque, faisaient leurs premiers pas dans le domaine. Ali Badrakhane est l'un des plus grands réalisateurs. On a travaillé ensemble dans le film «Arraghba».
Qu'en est-il des acteurs ?
Il y en a plusieurs, les stars ne se comptent sur les bouts des doigts en Egypte. Ce sont tous des amis que je respecte beaucoup et on s'entend très bien. De plus, je trouve que nul n'a la reconnaissance du public gratuitement. Ils travaillent dur pour atteindre leurs buts.
Ahmed Zaki, que Ddieu le guérisse est un génie. Moi je le considère comme le meilleur acteur au monde. Une fois devant la caméra, c'est un Ahmed Zaki perfectionniste qui va jusqu'au bout de sa personnalité.
Nour Echerif est un pro du cinéma et à chaque fois qu'on travaille ensemble, je remporte un prix. Adil Imam, Mahmoud Abdelaziz, Hussein Fahmi qui est aussi un grand ami, Yahia Fakharani et beaucoup d'autres.
Comment voyez-vous l'évolution du cinéma arabe dans le monde ?
Elle a beaucoup évolué malgré les faibles moyens dont elle dispose. Et c'est ce qui fait la différence avec les Etats Unis Vu les moyens qui sont mis à sa disposition, on peut dire que c'est un cinéma qui est en constante évolution. Je peux citer l'exemple du cinéma au Maroc. J'ai été membre de jury à plusieurs reprises.
Le dernier festival auquel j'ai assisté est celui de Damas, il y avait trois films en compétition, le film marocain a remporté le deuxième prix alors qu'il y avait 26 films en lice, c'est excellent. J'ai eu l'occasion de regarder des films marocains à plusieurs reprises que ce soit ici ou au festival du Caire. J'aime beaucoup le travail de Farida Belyazid.
Le cinéma égyptien est présent dans tous les festivals du monde. J'ai eu droit à plusieurs consécrations. Le fait qu'il fasse partie des compétitions au niveau international et je trouve que c'est un bon indice d'évolution.
Si on vous proposait un rôle dans un film marocain ?
Je serais très heureuse. D'ailleurs, j'ai toujours pensé à un film qui pourrait rassembler les deux expériences avec une histoire commune à nos deux pays et on peut parler chacun à sa manière. L'important est d'allier nos efforts et de donner naissance à un bon produit cinématographique ce qui ne pourra qu'être bénéfique pour le devenir du cinéma arabe.
Que pensez-vous de la nouvelle vague de jeunes acteurs ?
Il y a beaucoup de jeunes qui regorgent de talents. Il est vrai qu'au début, ils n'étaient pas tout à fait bien accueillis parce que tout le monde considérait que c'était des jeunes qui ne cherchaient qu'a faire rire. Certains d'entre eux ont cette passion mais d'autres ont su réussir. D'ailleurs, dans le dernier festival de Damas, quatre prix ont été attribués à quatre jeunes comédiennes pour le film «Sahari Alayali».
Quelle est l'actualité de Ilham Chahine ?
Avant de venir au Maroc, j'ai terminé le tournage du film «Khali Minalkolistiroul» avec Mohamed Abou Seif. J'y incarne le rôle d'une femme attardée mentale qui va se marier et aura des enfants alors que mentalement elle n'a pas plus de sept ou huit ans. C'est un rôle tout neuf pour moi et aussi l'un des rôles les plus difficiles que j'ai pu incarner. Samedi j'entame le tournage d'un nouveau feuilleton pour le ramadan prochain «Binti Afandina», mon petit frère, Amir Chahine va jouer à mes côtés, ils ont saisi la ressemblance qu'il y a entre nous et il sera aussi mon frère dans le film.
Lorsqu'elle n'est pas sur un plateau de tournage, qui est Ilham Chahine ?
Je suis très casanière, avec ma famille ou en voyage. J'aime beaucoup ma famille et passer le maximum de temps avec elle me procure un réel plaisir. Je peux passer des jours à la maison sans m'ennuyer. Et ça me fait une occasion de lire soit des livres ou des scénarios. Sinon j'aime beaucoup voyager. Découvrir, rencontrer d'autres personnes est une culture non seulement dans le monde arabe mais le monde entier. A chaque fois que je suis dans un pays je veux découvrir leur cinéma, le théâtre, l'opéra, l'art. Les beaux paysages aussi.
Et le Maroc ?
C'est l'un des plus beaux pays que j'ai visité. J'ai eu l'occasion de bien visiter ce pays. Il a la particularité de répondre à toutes les demandes, la mer, la montagne, les hautes vallées. Chaque ville que j'ai visitée au Maroc m'a procuré une sensation différente. Sans oublier le fait que c'est un pays où les gens sont accueillants, le côté humain est encore présent.
Votre avis sur le caftan marocain ?
J'aime beaucoup le caftan marocain. D'ailleurs, à chaque fois que je suis au Maroc je n'hésite pas à acheter une belle tenue. Je porte ces tenues dans les tournages. Dans le feuilleton «Mahboubat Al jamahir», par exemple et tous ceux qui ont vu le film m'ont fait la remarque sur la beauté des tenues.
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Ilham Chahine en bref
Situation de famille : divorcée à deux reprises, sans enfants - Signe astrologique : Capricorne - Qualité : franche et naturelle - Défaut : réactive - Couleur préférée : blanc parce qu'il dégage un bonheur - Musique préférée : je suis très classique dans mes choix. J'aime beaucoup la poésie.