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Comédie - Les Dalton de Philippe Haim : les pires crétins de l'Ouest

Nouveau méfait de Eric et Ramzy. Ces deux humoristes infantiles ont encore compromis le 7ème art en signant et interprétant Les Dalton. Une comédie même pas drôle qui pense combler l'absence de cinéma avec des décors et des effets coûteux. Alerter Goscinn

18 Décembre 2004 À 17:54

A chaque nouveau film, Eric et Ramzy s'excusent du précédent : « La Tour Montparnasse Infernale (2001), c'était raté, mais Double Zéro c'est nettement mieux ». Quelques mois plus tard : « Double Zéro c'était nul, mais les Dalton, là…. » Encore raté. Ils sont gentils Eric et Ramzy, et volontaires. Mais on ne passe pas comme ça d'une petite scène de variétés à un long métrage. Il faut se donner un peu de mal, se creuser la cervelle, s'appliquer. Ou alors, il faut un peu plus qu'un Philippe Haim aux manettes. Ne serait-ce que pour écrire le film et diriger les acteurs. Elémentaire ? Faut voir : Les Dalton, c'est un hold-up.

Un crime de lèse 7ème art : des humoristes gonflés à bloc ont dévalisé une banque-cinéma de seconde zone pour s'offrir décors grand luxe et effets numériques à gogo. En oubliant l'essentiel. A ce rythme, ce type de production n'aura bientôt plus besoin de personne. En attendant, les Français Eric et Ramzy persistent à s'agiter en plans serrés devant la caméra, forts d'un principe qui passe mal sur grand écran : l'improvisation.

Au départ, l'idée serait venue de Jamel Debbouze. Le fameux comique d'origine marocaine aurait proposé d'acheter les droits des Dalton pour en faire un film. Mais ayant tourné Astérix et ne voulant pas être de tous les projets bandes-dessinées (Marsupilami et Boule & Bill sont en prévision), il a cédé son rôle de Jo - le plus intelligent et le plus méchant des Dalton - à Eric. Lequel donne donc la réplique à son partenaire de toujours, Ramzy, dans la peau de Averell-le-bêta. Les frères intermédiaires, Jack et William (Saïd Serrari et Romain Berger), ne servant – comme dans la bande dessinée – que de faire valoir aux légendaires disputes des deux autres.

C'est d'ailleurs sur ce point qu'Eric et Ramzy se sont appuyés pour le scénario. L'affrontement fraternel façon western faisant office de mine d'or pour ces duettistes en quête d'inspiration. Pas question, cependant, d'adapter réellement la bande dessinée imaginée par René Goscinny, qui fit des Dalton, avec le dessinateur Morris, les ennemis récurrents de Lucky Luke. Mais plutôt d'en tirer prétexte à de nouveaux sketchs.

Un numéro d'illusionnisme

Averell, le chouchou de Ma Dalton, vient contester l'autorité de son frère Jo au motif qu'ils sont réputés dans tout le Far West pour leur bêtise et leur incompétence. Pas une attaque de train ou de banque, pas un vol de bétail ou de chevaux, pas une descente de saloon : les crétins de l'Ouest se contentent de braquer des épiceries pendant que leur mère pille des diligences avec ses copines.

Copines qui, en tant que parentes de Billy the Kid ou Calamity Jane, se moquent sans vergogne de la pauvre Ma (Marthe Villalonga, accent pied-noir désopilant dans le contexte) qui n'a pas su élever ses bandits. Celle-ci force donc ses quatre garçons à trouver un « bonne situation », sous peine de ne pas réintégrer le domicile maternel.

C'est le seul piquant dans l'histoire. Car l'idée d'envoyer les Dalton au Mexique trouver un chapeau magique qui rend invincible est farfelue, sinon inepte. Exit Lucky Luke (Til Schweiger, ridicule, sauf quand il dit « mouais »), Jolly Jumper (doublé par Jean Rochefort) et Rantanplan (affublé d'un ballon de football en guise de truffe et d'une tête de synthèse sur un corps de chien) : les personnages phares de Goscinny ne font que traverser l'écran tels des silhouettes de rappel.

« Oui, oui, c'est bien les Dalton, regardez, Lucky Luke vient de passer ». Philippe Haim s'est prêté à un numéro d'illusionnisme gaspilleur : ce n'est pas le Far West mais un parc d'attraction où des garnements, sept ans d'âge mental, jouent aux cowboys-andouilles. Presque un nouveau genre.

Ce pourrait être déridant si les comédiens, qui ont largement dépassé la trentaine, n'avaient pas l'air bouffon, tout engoncés et grimaçants dans leurs costumes de supermarché qui fleurent l'animation bas de gamme. Cela dit, voir ces grand dadais imiter des incendiaires en racontant des blagues débiles doit avoir une fonction expiatrice et décomplexante, car la jeune classe est loin de tordre le nez.

Pour les plus grands, qui s'ennuient ou s'endorment, c'est une autre histoire. Ouvrir une paupière pour les numéros plus professionnels des seconds rôles comme Darry Cowl, Eli Semoun, Michel Muller ou Kad.

En soulever une deuxième pour entreapercevoir les décors, éléments les moins bâclés avec la cavalerie. Mais refermer les deux quand Eric et Ramzy reprennent en roue libre sans se soucier des flops. Au moins ces deux comiques ont-ils le mérite de rappeler, à chaque fois qu'ils se commettent, que le cinéma nécessite un peu de génie. C'est parfois cruel de jouer dans la cour des grands.

Les Dalton, film français de Philippe Haim avec Eric Judor (Jo), Ramzy Bedia (Averell), Saïd Serrari (Jack), Romain Berger (William), Marthe Villalonga (Ma), Til Schweiger (Lucky Luke), Darry Cowl, Eli Semoun, Michel Muller, Kad. Durée : 1h26.
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