L'humain au centre de l'action future

La caricature dans la presse arabe : Handhala n'a pas fait d'émules

En décembre 2003, le concours Nagi el Ali avait permis à de nombreux jeunes de donner libre cours à leur imagination à travers des dessins satiriques et humoristiques. Presque à la même période, l'édition «Lire en fête » était dédiée à la caricature. Ces

20 Novembre 2004 À 19:20

La 3ème édition du Festival de la Caricature et du dessin d'humour de Bruxelles, qui aura lieu en 2005, devrait accorder une place de choix à la caricature arabe.

Plus que les écrits, les dessins contestataires peuvent conduire à l'exécution sommaire de leur propriétaire. Cela s'est déjà produit lorsqu'une balle, tirée à bout portant, avait mis fin à la vie et à l'œuvre du père de «Handhala». Mais nullement à celle de ce personnage miséreux qui continue à déranger. «Ce personnage que j'ai créé ne disparaîtra pas après moi. Je ne crois pas exagérer en disant que je serai immortalisé à travers lui», disait Naji El Ali.

Et il ne se trompait pas. Aujourd'hui, Handhala est le nom et le symbole d'un réseau palestinien oeuvrant pour la défense du droit international et le respect des droits humains. Il est aussi prétexte pour monter des pièces de théâtre, pour organiser des concours et pour se rappeler encore et toujours le martyr de son créateur et la souffrance de tout un peuple.

«Handhala est né à l'âge de 10 ans et depuis son exil les lois de la nature n'ont aucune emprise sur lui. Il ne recommencera à croître que lors de son retour sur sa terre natale. Il n'est pas un enfant bien portant, heureux, serein et couvé. Il va pieds nus comme tous les enfants des camps de réfugiés. Ses cheveux sont ceux de l'hérisson qui utilise ses épines comme arme. Bien qu'il soit rude, il a l'odeur de l'ambre. Ses mains, toujours derrière son dos, sont le signe du rejet des solutions porteuses de l'idéologie américaine.

Au début il était un enfant palestinien, mais sa conscience s'est développée pour devenir celle d'une nation puis de l'humanité dans sa totalité. Il a fait la promesse de ne jamais se trahir. Handhala veut dire amertume», expliquait Naji El Ali qui avait démontré que le pinceau pouvait jouer un rôle considérable dans la recherche de la vérité.

Conscience de la société

Les dictionnaires nous apprennent que la caricature est une «représentation exagérant les traits, les caractéristiques physiques, l'habillement ou les manières propres à un individu dans le dessein de produire un portrait-charge» et que «la caricature (de l'italien caricare, «charger») constitue également un moyen de ridiculiser et de tourner en dérision faits et institutions politiques, sociaux ou religieux, ainsi que certains groupes ou classes sociales».

La caricature, se voulant depuis toujours conscience de la société, a pu profiter et s'épanouir grâce à la reconnaissance de la liberté d'opinion et au développement de la presse. Ce fut aussi le cas pour la presse arabe qui, à des degrés différents, avait introduit ce mode d'expression pour illustrer ses articles ou encore pour évoquer, avec le sourire en coin, tous les avatars de la société. On évoque la fin du XIXe siècle comme l'âge d'or de l'émergence de la caricature. En effet, l'acquisition progressive des libertés publiques dans les Etats et les sociétés arabes, avant et après l'accession à l'indépendance, avait permis à cet art de se développer et de jouir d'une totale liberté.

Actuellement, la tendance incite les dessinateurs à plus de prudence. Obligés de s'autocensurer puisqu'ils devaient éviter d'évoquer avec insistance les sujets qui fâchent sur un ton d'ironie ou le ridicule est trop poussé, les caricaturistes s'ingénient à investir avec plus d'ingéniosité ces espaces de liberté, pour transmettre leur message tout en incitant le lecteur à réfléchir aux avatars de la société. Avec le sourire.
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