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Les interprétations divergent : Allégeance de Zarqaoui à Ben Laden

18 Octobre 2004 À 15:00

L'annonce de l'allégeance à Oussama ben Laden d'Abou Moussab al-Zarqaoui, ennemi juré des Américains en Irak et chef du groupe Tawhid wal Jihad, donne lieu à des interprétations très divergentes sur les raisons de cette décision et surtout sur le moment choisi pour la rendre publique.

"Cette allégeance est un démenti flagrant aux allégations de l'administration américaine sur les liens présumés entre Al-Qaïda et Saddam Hussein par le biais de Zarqaoui", estime Yasser Serri, directeur de l'Observatoire islamique, basé à Londres, qui rappelle que "ces allégations et celles sur les armes de destruction massive ont servi d'alibis (aux Etats-Unis) pour occuper l'Irak".

"L'annonce de cette allégeance intervient au début du ramadan, le mois du jihad et du sacrifice", ajoute M. Serri, qui s'attend à "une prochaine recrudescence des opérations du groupe Zarqaoui en Irak, surtout à l'approche du scrutin présidentiel américain" du 2 novembre.

A la veille de ramadan, Tawhid wal Jihad (Unicité et guerre sainte) avait promis dans un communiqué "une bonne nouvelle qui irritera les ennemis d'Allah durant le mois des victoires".

"Nous annonçons que le groupe Tawhid wal Jihad, son émir (Zarqaoui) et ses soldats ont prêté allégeance au cheikh des moudjahidines, Oussama ben Laden", affirmait un communiqué attribué au groupe de Zarqaoui publié dimanche sur un site islamiste, mais dont il était impossible de vérifier l'authenticité.

Pour Abdel Bari Atwan, le rédacteur en chef du quotidien arabe londonien Al-Quds al-Arabi, "l'annonce de l'allégeance à ben Laden consacre le retour de la partie au tout. Zarqaoui s'est entraîné en Afghanistan. Il a été nourri à l'école d'Al-Qaïda. Il a créé une branche de ce réseau en Irak. Aujourd'hui, il se place sous le parapluie de ben Laden, le père spirituel de ce réseau horizontal".

"Le choix du ramadan, le mois du sacrifice, est très significatif. Cette allégeance donnera une impulsion au Tawhid wal Jihad et ne manquera pas de se traduire par des opérations sur le terrain", estime-t-il.

M. Atwan admet toutefois que le réseau-mère "n'est pas en mesure d'aider le groupe de Zarqaoui, étant loin de l'Irak et traqué en Afghanistan".
A l'opposé de ces deux interprétations, Dhia Rachwan, un expert égyptien des groupes islamistes, va jusqu'à mettre en doute l'authenticité du communiqué attribué au groupe de Zarqaoui.

"Ce communiqué intervient après le gel des avoirs financiers que ce prétendu groupe pourrait posséder aux Etats-Unis. Il intervient à moins de trois semaines de la présidentielle américaine. Il intervient aussi au moment où les autorités irakiennes et les forces d'occupation mènent de violentes offensives militaires contre la résistance irakienne", affirme-t-il.

"Celui qui a intérêt à publier un tel communiqué est bien le groupe électoral du président Bush. Si ben Laden est l'ennemi international de l'administration américaine, Zarqaoui est son ennemi régional. Ce communiqué établit le lien entre le symbole de ce qui s'appelle le terrorisme mondial et celui du terrorisme régional", conclut M. Rachwan.

"Zarqaoui est devenu le bouc émissaire sur lequel on fait retomber tous les malheurs de l'Irak", écrivait récemment l'islamiste égyptien Hani al-Sebaï, le directeur du Centre al-Maqrizi d'études historique, basé à Londres.

Pour sa part, Hussein ben Mahmoud, un expert du Centre d'information islamique mondial, estimait, dans une analyse publiée récemment sur des sites islamistes, que Zarqaoui ne serait qu'"un mythe créé par l'administration Bush pour justifier le maintien des troupes américaines en Irak".

"Lier Zarqaoui à al-Qaïda confère une certaine +légitimité+ à l'occupation de l'Irak, sous prétexte de combattre le terrorisme", écrivait-il.
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