Mustapha Benali s'explique sur « Studio 2M » : «C'est un programme qui s'inscrit dans la logique du développement de notre pays…»
Polémiques, communiqués…le programme lancé par la deuxième chaîne « Studio 2M » à la recherche des jeunes talents dans le domaine de la chanson a suscité, lors des deux premières soirées, un grand taux d'audience et par la suite beaucoup de controverses
LE MATIN
22 Juillet 2004
À 18:34
Qu'est-ce qui a créé autant de polémiques sur un programme comme « Studio 2M » ?
« Studio 2M » est une opération comme les autres. Des équipes ont sillonné le Maroc et l'étranger à la rencontre de jeunes talents marocains. L'opération prendra fin le 31 juillet avec un direct qui décidera des deux finalistes sachant que, pour notre chaîne, tous les finalistes sont des gagnants.
Les 33 participants ont de belles voix et ils vont tous bénéficier du soutien de la chaîne au-delà du mois d'août avec en particulier la mise en place d'un fonds qui sera dédié à la promotion de la chanson marocaine et de la chanson au sens large. Ce suivi vise aussi les jeunes talents qui sont passés par « Noujoum oua Noujoum » et les autres émissions diffusées sur la deuxième chaîne.
C'est pour vous dire que c'est une opération qui ne se limite pas au 31 juillet mais qui va s'étaler sur toute l'année.
« Studio 2M » sera reconduit en juin 2005 pour la deuxième saison, et c'est surtout un effort important dans le domaine de la chanson.
Détecter des talents, cela relève-t-il des fonctions ou des statuts de la deuxième chaîne ?
Une chaîne de télévision est, avant tout, un média important qui bouge, il doit être interactif et réactif. Il y a, dans le domaine de la culture, énormément de chantiers à explorer. Je pense au même titre qu'on fait des magazines pour faire découvrir au public de jeunes cinéastes et des artistes peintres ou écrivains. Il est également de notre devoir de promouvoir le domaine de la chanson.
Aujourd'hui, on entame une phase plus moderne, plus professionnelle et donc nous sommes tenus d'offrir un produit qui répond à ces attentes au niveau du contenu et de la forme. D'où le fait que notre chaîne répond à des normes internationales au plan esthétique.
Si on arrive à fidéliser notre public et développer une audience, le marché va s'étendre avec de nouveaux intervenants, ce qui va contribuer à la promotion du patrimoine national.
Ceci étant, ce n'est pas tellement inscrit dans nos statuts mais ça fait partie de notre mission. C'est la matière première de notre travail. Aujourd'hui, quand on a une grille, c'est facile de l'alimenter avec des produits achetés à l'étranger ; ce qui est, je le rappelle, rentable. Mais notre but est de promouvoir la production locale.
Le rôle d'un média est de porter les projecteurs sur des exemples de réussite.
Lancer des jeunes dans le domaine de la chanson ne constitue-t-il pas une tâche difficile et de longue haleine ?
C'est une tâche très lourde. Nous on mets en avant. Ceci étant, nous ne sommes pas en mesure d'accompagner ces jeunes. On est obligés d'être avec d'autres partenaires. C'est un travail de producteur qui va se faire par la suite.
Si ces jeunes ne sont pas pris en charge, leurs talents pourront s'éteindre.
C'est toute une industrie à développer. Mais on juge qu'il y a un premier travail qui doit être fait.
C'est très lourd et très compliqué, mais il fallait que ça commence un jour. Nous n'avons pas la prétention d'inventer quoique ce soit. Ce sont des opérations qui se font dans plusieurs pays du monde, et à notre tour, il a fallu qu'on reste en harmonie avec l'environnement marocain à travers des opérations positives, chargées de sens et qui sont porteuses de développement.
Et je pense que les deux opérations, à savoir « 15 ans, 15 talents » et « studio 2M », s'inscrivent dans cette logique.
Et notre ambition, c'est de contribuer à cet effort-là avec d'autres. On essaye de rectifier, d'ajuster et d'apprendre à travers les autres expériences, ce qui nous permettra d'aller davantage dans le sens recherché par tous.
Si tout va bien et s'il n'y a pas de problèmes au niveau de ce programme, que reproche le syndicat libre des musiciens marocains à la deuxième chaîne ?
Je respecte la position du syndicat. On s'est vus et on en a discuté. C'est une expérience nouvelle pour nous. L'intention est bonne ; ce qu'on a cherché, c'est de créer un espace. Il y a de la place pour tout le monde pour qu'il y ait collaboration et synergie. Je pense que la réussite sera dans la contribution de tous. Nous ne demandons qu'à avoir des artistes marocains sur nos plateaux.
Et si on va à la recherche des jeunes talents, c'est dans le même esprit. Ceci étant, s'il y a des artistes qui s'expriment dans d'autres langues, ce n'est pas mauvais, parce que ce qui est primordial, c'est la voix. Le fait d'avoir un jeune Marocain qui chante en français ou en anglais n'est pas une faute grave au contraire, c'est une richesse. Je ne veut en aucun cas dire qu'il renie sa langue maternelle sans oublier que ce sont nos ambassadeurs à travers le monde.
Le syndicat est mécontent des jeunes et du jury.
Dans toute opération, il y a des mécontents mais nous, on propose un programme de divertissement qui comporte une valeur ajoutée à travers une dimension de proximité. On voulait s'adresser aux jeunes et aux familles et je pense qu'on ne s'est pas trompé. Dans tout programme, il y a des personnes qui apprécient et d'autres non. On ne peut pas plaire à tout le monde.
D'où le fait d'avoir imposé aux jeunes de chanter des chansons marocaines?
Dans la limite du possible. Il est clair qu'on est pas une école pour la chanson, nous sommes une chaîne de télévision et un média de divertissement. On est là pour découvrir de jeunes talents et on ne cherche à aucun prix à mettre des barrières en leur imposant certaines conditions. Ils sont débutants, pleins de volonté et il faut les aider . C'est notre objectif.
Y a-t-il une autorité qui confère au syndicat des musiciens de s'attribuer la tutelle sur les émissions d'une chaîne de télévision ?
Du tout. c'est leur droit absolu de défendre leur point de vue ; et personnellement, je le respecte. Ceci dit, la chaîne fait son travail. Nous avons commencé une opération, nous la mènerons jusqu'au bout. Nous sommes convaincus de faire un programme qui s'inscrit dans la logique du développement de notre pays et qui répond à une attente, ce qui est confirmé par les taux d'audience extrêmement élevés.
Nous n'avons de comptes à rendre qu'à notre public, et puis, nous n'avons jamais dit que nous étions parfaits. Il est clair qu'après chaque émission, un bilan est fait et les points négatifs sont détectés et évités par la suite. Nous n'avons touché à aucun interdit. Nous sommes respectueux aux valeurs de notre pays et aux règles de la morale. D'autant plus que nous n'avons, à aucun moment, annoncé que c'est un programme dédié à la chanson marocaine.
Y a-t-il un contrat qui lie la deuxième chaîne et les jeunes ?
Il y a en effet un contrat que les deux parties sont obligées de respecter. C'est un programme qui dépasse le 31 juillet. La deuxième chaîne va les accompagner dans un concert pendant le mois d'août. Il y a un autre programme pendant le mois de ramadan. Une émission qui sera dédiée à la chanson marocaine, et on fera aussi le nécessaire pour trouver d'autres partenaires qui vont nous rejoindre dans cet effort .
Et le changement du jury. E.Lam Jay est partenaire de Platinium et fait une campagne de publicité pour Coca Cola, ce qui ne lui donne pas le droit de faire partie du jury ?
Le changement ne s'est pas opéré dans cette logique. Le règlement a été déposé chez le notaire en mai et nous avons convenu de changer le jury à chaque étape de la compétition.
On ne pouvait remplacer Karim Tadlaoui et Cristie Caro parce qu'ils sont les accompagnateurs des jeunes talents depuis le terrain et ils ont accepté.
E.lam s'est excusé parce qu'il a la promotion de sa chanson.
Peut-on en déduire que la chanson fait partie des priorités de la chaîne, tout en sachant qu'il y en a d'autres plus importantes ?
Il y a plusieurs priorités. Vu le déficit dans le paysage audiovisuel, on peut considérer que tout est prioritaire.
Il y a l'information au quotidien, les magazines d'information.