Retraits espagnol et hondurien de l'Irak : l'effet boule de neige risque de s'amplifier
Malgré la déception affichée par Washington, après la décision de Madrid de retirer ses troupes de l'Irak, le secrétaire d'Etat américain aux Affaires étrangères, Colin Powell, a estimé, hier, que la coalition tient bon et reste solidaire.
LE MATIN
20 Avril 2004
À 20:24
Les responsables américains ont eu plusieurs contacts avec les capitales des pays qui forment la coalition en Irak, pour s'assurer de leur soutien inconditionnel. La réponse a été généralement une confirmation de leur engagement à continuer de collaborer avec les Etats-Unis. Toutefois, les craintes d'un effet boule de neige après le désengagement espagnol, commencent à se concrétiser suite à la décision du Honduras de retirer également ses soldats.
Séoul, Tokyo et Sofia ont renouveler leur soutien aux Etats-Unis mais les Italiens ont refusé, hier, de remplacer les unités espagnoles qui se sont retirées, ce qui laisse entendre que des problèmes existent bel et bien. Le cours que les événements ont pris, depuis le siège de Falloujah, cours qui va crescendo vers une escalade militaire et politique, est la principale cause des décisions de retraits hondurien et espagnol.
L'intensification de la résistance, partout en Irak, que ce soit dans les zones sunnites ou dans les zones chiites, porte à croire que les engagements pris par les alliés des Etats-Unis, seront de plus en plus difficiles à respecter, notamment avec l'approche du 30 juin. Cette échéance fixée pour le transfert de la souveraineté aux Irakiens, est une date purement fatidique, puisqu'il sera difficile de maintenir la solidarité au sein de la coalition si ce processus de règlement politique échoue.
La situation a presque atteint un point de non-retour car la majorité des Irakiens se trouve, depuis la chute du régime de Saddam Hussein et en raison de l'évolution de la situation dans le pays, dans un côté diamétralement opposé aux visions et plans proposés par les Etats-Unis. Amr Moussa, le secrétaire général de la Ligue arabe, a salué, hier, le retrait espagnol en le considérant comme susceptible d'avoir un grand impact sur le règlement du dossier irakien.
Cette déclaration pourrait irriter les Etats-Unis, car il s'agit de la première position d'un responsable arabe, qui va dans ce sens. En ce qui concerne l'opinion publique américaine un sondage publié, hier, a confirmé le renforcement de la tendance des américains qui sont pour une augmentation du nombre de soldats en Irak, malgré le lourd bilan des pertes enregistrées ces dernières semaines. Un tel soutien populaire, ne peut que conforter le Président George W. Bush dans ses choix, quant au traitement de la crise irakienne.
Il va falloir donc s'attendre à une plus grande escalade militaire, d'autant que les choses ont atteint une situation dangereuse où la confrontation armée commence à devenir inévitable. Sur le terrain, une cinquantaine de familles ont été autorisées, hier, à entrer dans Falloujah et une autre cinquantaine pourront, aujourd'hui, y accéder. Cette décision révèle que les négociations ont permis de surmonter certains différends entre la résistance et l'armée américaine.
Un accord de cessation des hostilités a été conclu, lundi, prévoyant aussi la remise des armes, une amnistie pour ceux qui remettent leurs armes lourdes, l'accès aux hôpitaux et l'enterrement des morts. La communauté sunnite est sortie renforcée de la bataille de Falloujah en s'imposant en tant qu'interlocuteur incontournable avec lequel il faut compter.
Ces accords ne veulent pas dire pour autant que la résistance va cesser. Elle va peut-être diminuer pour quelque temps, mais elle risque de reprendre de plus belle, si un terrain d'entente n'est pas trouvé en vue d'un règlement du dossier irakien. Dans les villes chiites de Najaf et Kerbala, la situation est toujours tendue et les risques d'une explosion ne sont pas à écarter.
D'autre part, des tirs de mortier ont fait 21 morts dans la prison d'Abou Gharib, où plusieurs centaines d'Irakiens sont emprisonnés pour des raisons de sécurité. La coalition détient plus de 6000 personnes pour des raisons de sécurité. Les arrestations massives ont été l'une des causes de la recrudescence des attaques contre les forces de la coalition.