Un chef-d'œuvre publié par la Fondation Mezian Benjelloun : «Bou Inania, la plus célèbre médersa de Fès»
La médersa Bou Inania , que S.M. le Roi a visitée hier, incarne la richesse patrimoniale du Maroc médiéval. En plein XIVè siècle, alors que l'Occident sortait péniblement de l'obscurité d'un long Moyen Age, une médersa avait surgi à Fès, elle répandait s
LE MATIN
10 Novembre 2004
À 23:34
Elle est aujourd'hui un symbole du passé glorieux du Maroc, mais aussi l'héritage d'une dynastie qui a su fructifier et répandre la culture et les lieux du savoir. C'est conscients d'une telle dimension, historique et spirituelle, soucieux également de préserver les richesses d'un si merveilleux monument que les dirigeants de la Fondation Benjelloun-Mezian ont pris en charge la restauration de la médersa Bou Inania, érigée au cœur de la médina, hissée entre Fès el-Bali et Fès-Jdid, croisement de deux exigences, la spiritualité et la réflexion discursive.
La Fondation Benjelloun-Mezian n'a pas seulement assumé de bout en bout la restauration et la remise quasiment à neuf de la médersa Bou Inania, elle a aussi accompagné cette œuvre de mécénat par la publication d'un livre d'une beauté exceptionnelle : « Bou Inania, la plus célèbre médersa de Fès » en collaboration avec l'éditeur Franco Maria Ricci.
Publié en langues française et anglaise, d'un grand format carré, l'ouvrage de plus de 100 pages, est agrémenté d'une cinquantaine de grandes photographies, réalisées après la restauration par Giovanni Ricci et Massimo Listri, exposant tous les pans de la médersa, portes dorées, fenêtres au bois finement incrustées, zellige, fontaines, patio, balconnets, vitraux , poutre en bois de cèdre, voûtes et plafond en stuc dont les encablures et les angles avaient été réalisés de main de maîtres artisans qui, à l'ouvrage comme à la prière, s'y adonnaient avec ferveur et spiritualité.
Pour accompagner aussi les photos, réalisées sur fond de couleurs chaudes mais dont l'éclat réside dans leur sobriété même, le livre nous propose de merveilleux textes et des moindres, notamment de Scott O'Connor, Léon L'Africain, Luis de Marmol Carjaval, Diego de Torres, Edmondo de Amicis, Pierre Loti, Budgett Meakin, Edith Warthon et Jérôme et Jean Tharaud. Chacun à sa manière décrit avec talent et conviction son rapport à la ville spirituelle ou ce qu'il en ressent à son évocation.
« Fès la lettrée » nous dit Gianni Guadalupi « dont la grande mosquée al-Qaraouiyine, ainsi nommée parce que fondée par la pieuse Fatima dont le père avait émigré de Kairouan, devint l'université la plus réputée du Maghreb. A cette époque, la ville se couvrit de médersas, des fondations vouées à l'enseignement, où les élèves étudiaient et logeaient ».
Ces écoles portaient le nom de « collège de l'islam » et la médersa Bou Inania en constituait le fleuron, le modèle de rigueur et de convivialité studieuse, un espace de partage et de communication. Dans une ville où la spiritualité prédomine à tous les niveaux, il n'est pas de plus grand bonheur qu'un lieu, un espace comme celui-là où s'allient l'architecture et les couleurs, un havre sur lequel le soleil se lève et se couche avec une placide certitude qu'il n'est de grandeur que dans la connaissance et dans la science.
La restauration aujourd'hui de la médersa s'inscrit, en effet, dans l'esprit de réhabilitation de ces diverses dimensions, d'un retour à l'âge immémorial où la parole fusait mais ne s'envolait jamais, à partir d'un espace où les débats étaient croisés et universels parce qu'ils parlaient de Dieu, de l'être, de la vie et de la mort, parce qu'enfin la médersa devenait le confluent par lequel les sciences – fussent-elles théologiques ou morales – transitaient et rayonnaient. C'est une grande et noble entreprise que d'avoir restauré la médersa Bou Inania.
Cette décision dont le pouvoir revenait il y a quelques années à feu S.M. Hassan II qui en a confié la tâche à la Fondation Benjelloun-Mezian, s'inscrivait dans le souci de sauvegarder le patrimoine spirituel, culturel, architectural et intellectuel du Royaume. Aujourd'hui , nous retrouvons un merveilleux joyau restauré, une tradition réhabilitée et un patrimoine sauvegardé grâce à la Fondation Benjelloun-Mezian qui a pris à son compte les travaux de réfection.
Mais le fait que S.M. le Roi Mohammed VI se rende à ce sanctuaire de la culture et du savoir aujourd'hui-même, c'est -à-dire le 27 Ramadan, nous rappelle cette coïncidence constellaire que les travaux de construction ordonnés par le Roi Abou Inan, avaient débuté un 28 Ramadan 751 !