Spécial Marche verte

Un combat contre l'ignorance et les préjugés

A travers le monde, autorités et organismes non gouvernementaux ont marqué la campagne mondiale de lutte contre le Sida par une série de manifestations conçues pour attirer l'attention sur la maladie et les efforts à multiplier en vue de son éradication.

09 Décembre 2004 À 16:18

Cet événement a réuni autorités, représentants de l'art et des médias, société civile et organismes internationaux. Des militants qui prônent la vigilance, la compréhension et la solidarité à l'égard des personnes touchées par ce fléau. Un fléau qui s'étend chaque jour davantage. Toutes les six secondes, une personne est contaminée à travers la planète. Les femmes et les jeunes filles sont de plus en plus vulnérables. C'est d'ailleurs ce qui justifie le choix du thème de la campagne mondiale de lutte contre le Sida «Femmes, filles et VHI/SIDA », célébrée le 1er décembre.

Par ce choix, les responsables d'ONUSIDA veulent interpeller les gouvernements sur la situation des femmes, notamment sur les femmes africaines. Le taux d'infection chez ces dernières est de 76%. Dans la plupart des cas, il s'agit de femmes mariées. En effet, une étude en Afrique a montré que les jeunes femmes de 15 à 19 ans, mariées, présentaient un taux d'infection supérieur à celles du même âge qui étaient célibataires et sexuellement actives.

Au Maroc, depuis la déclaration du 1er cas de sida au Maroc, 1557 cas cumulés ont été déclarés fin septembre 2004. Le rythme de la progression annuelle des cas déclarés de SIDA accuse une nette augmentation depuis le début des années 90. Cette augmentation touche particulièrement les régions du Grand Casablanca, Sous-Massa-Drâa, et Marrakech Tensift El Haouz. La tranche d'âge la plus touchée est celle des adultes jeunes, près de 72% des personnes atteintes de Sida sont âgées entre 20 et 39 ans %. La contamination est précoce chez les femmes (30% sont âgées de 20 à 29 ans contre 20% chez les hommes).

Une diminution très nette du sexe ratio au cours des dernières années, il y a aujourd'hui presque autant de nouveaux cas masculins que féminins. Le mode de transmission hétérosexuel est largement prédominant avec 75% des cas. La contamination est plus précoce chez les cas féminins, 34 % des femmes atteintes sont mariées. En se référant aux techniques de calcul mises au point par l'OMS et l'ONUSIDA, le programme national de lutte contre le SIDA estime le nombre de personnes porteuses du virus du SIDA, à fin 2004 entre 13 000 et 16 000.

Ce chiffre peut sembler dérisoire par rapport aux autres pays où l'on compte les cas par millions. Certes, si jusqu'ici le rythme de l'épidémie est considéré dans notre pays comme relativement lent, il a tendance à présent à s'accroître d'année en année. Cet état de fait donne à réfléchir, mais surtout à réagir au lieu de se cantonner dans une politique d'autruche et de sous estimer les dangers de ce fléau. Justement, le ministère de la Santé ne sous-estime pas ce danger.

Il a d'ailleurs inscrit parmi ses actions prioritaires, du Plan stratégique national de lutte contre le Sida, la réalisation d'une campagne nationale de communication sociale. Cette campagne a été a lancée en juin dernier et se poursuivra jusqu'à fin janvier 2005. Cette campagne se propose d'atteindre trois principaux objectifs : sensibilisation d'un très grand nombre de personnes au risque SIDA en les informant sur les modes de transmission et de prévention, la promotion du dépistage volontaire anonyme et gratuit et la lutte contre la discrimination et la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH/SIDA.

La campagne cible la tranche la plus vulnérable au risque SIDA au Maroc, à savoir les jeunes. La majorité de ces derniers, sont peu ou mal informés sur ce fléau et beaucoup d'entre eux n'ont jamais appris à se protéger du SIDA quoiqu'ils soient les premières victimes de cette maladie. Donc, ils ont le droit de développer les aptitudes et attitudes adéquates pour le jour où ils se trouveront dans une situation où ils risquent de se faire infecter.

L'organisation de telles campagnes est primordiale, compte tenu des tabous et de l'autocensure qui entourent la sexualité dans notre pays et les phénomènes de stigmatisation et de discrimination qui distinguent la société marocaine. Le peu d'informations ( la plupart du temps erronées) que le citoyen possède sur cette maladie fait d'elle une maladie honteuse. Nombreuses sont des personnes qui, interrogées sur la question, affirment, en effet, que « la maladie n'arrive qu'aux personnes qui l'ont vraiment cherchées et d'ailleurs que c'est une punition divine ». Pis, à ce jour, ils ne sont pas nombreux nos concitoyens qui savent pertinemment qu'à la suite d'une contamination par n'importe quelle infection sexuellement transmissible (IST), lors d'un simple rapport sexuel non protégé, ils peuvent l'être par le virus SIDA.

Nous avons également le sentiment que nos concitoyens ne se sentent pas concernés par le SIDA, avec ce vieux réflexe «ça n'arrive qu'aux autres». C'est également un contexte pertinent pour pallier ce manque de visibilité, ces lacunes et surtout à pousser les individus à adopter des comportements non dangereux. Les actions de la mobilisation sociale se basent sur l'apport et la contribution des médias. En effet, ces acteurs sont un moyen sûr pour diffuser une information fiable. Mais cette information doit être claire et sans ambiguïté sur les risques encourus. Le respect des principes de l'éthique et de confidentialité pour les personnes vivant avec la maladie doit être assurés, les mots employés doivent êtres mesurés…

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