Amir Peretz, un Marocain à la tête du Parti travailliste en Israël
Le 9 novembre 2005, le parti travailliste (Avoda), a organisé le vote de «primaires», pour élire le Président du Parti. Etaient candidats Shimon Peres, - élu président par intérim pour la deuxième fois, il y a six mois et qui souhaitait devenir le préside
10 Novembre 2005
À 16:39
Cependant, le vote vient d'accorder une large victoire à Amir Peretz, prenant de court la classe politique israélienne et démentant les pronostics.
Jusqu'au désistement de Matam Vilnaï, Shimon Peres n'avait que peu de chance d'obtenir les 40 % des voix qui lui permettaient d'être élu dès le premier tour.
Amir Peretz, se plaçait toujours au deuxième rang, - avec un écart de 10% seulement par rapport à Shimon Peres, selon les derniers sondages -, et Fouad Ben Eliezer très loin derrière.
Aujourd'hui, comme ira jusqu'à l'écrire dans le journal populaire, Yediot Aharonot, l'analyste Sima Kadmon « Cette fois même Shimon Peres aura des difficultés à perdre » (pourtant le looser !).
Pourtant l'analyste Yoël Marcus, dans le grand quotidien Haaretz, expliquait que Amir Peretz n'avait aucune chance d'être élu, étant d'origine marocaine… Il est intéressant de rappeler que David Ben Gourion, principal créateur de l'Etat d'Israël en 1948, prédisait «qu'un jour viendra où il y aura un chef d'état-major israélien, d'origine yéménite (les plus primaires des juifs à l'époque)».
Evidemment, même Ben Gourion n'avait jamais prédit la nomination d'un Chef du gouvernement israélien, d'origine orientale : jusqu'à ce jour, en 2005, cette prédiction serait théorique.
Pis encore, quand le premier chef du gouvernement israélien avait décidé de promouvoir des jeunes contre les caciques du parti travailliste ultra majoritaire (Mapaï), aucun d'eux n'était ni yéménite, ni marocain, ni oriental… Et Yöel Marcus rappelait qu'il « a fallu 36 ans pour avoir un premier chef d'Etat Major oriental (Moshé Lévy) et 56 ans pour un chef du Mossad. Mais, jamais le chef du Shabak (sécurité militaire) ».
Pour le Marocain Amir Peretz, sa moustache lui vaut des moqueries pour éviter d'appliquer des railleries à son origine ethnique, par ceux qui restent opposés à le voir à la tête du parti travailliste.
Contrairement aux caricatures qu'a connues dans le passé la politique israélienne, pourtant appliquées à des questions d'honneur ou de discrimination ethnique, nul n'a jamais accusé Amir Peretz d'avoir utilisé sa naissance au Maroc pour sa promotion.
Le défaut de toute argumentation communautaire ou syndicale (le socialisme archaïque, disent les économistes pour expliquer l'augmentation du chômage ou la dépendance d'allocations sociales des vieux et des pauvres…), est pourtant, en vérité, de supposer que le parti travailliste aurait la moindre chance d'emporter les prochaines élections législatives.
Chacun sait que le parti (Avoda) a perdu sa vitalité et a besoin «de transfusion de sang». Plusieurs noms prestigieux, notamment d'universitaires, ont été avancés pour diriger les travaillistes. Mais personne, en dehors d'Amir Peretz, n'accepterait de « se salir les mains, et préfèrera attendre qu'on lui offre le pouvoir sur un plateau d'argent» (Yoël Marcus).
Aujourd'hui, dans cette situation de crise, Amir Peretz, 52 ans, est le seul espoir qu'il ne faut pas négliger. Ses amis le décrivent comme « le sel de la terre », sincère et qui dit ce qu'il pense.
Pouvait-il, pour autant, devenir Chef de gouvernement ? S'interrogeaient les observateurs ? La question demeurait lancinante jusqu'à l'issue duscrutin. Amir Peretz est aujourd'hui élu aux primaires du parti israélien travailliste, il a déclaré vouloir mener la «Avoda» dans l'opposition, pour construire une véritable alternative au Likoud, en dislocation.
Il est d'avis qu'Ariel Sharon est arrivé au bout de ses capacités de concessions. «La période d'opposition sera une serre qui lui permettra d'accumuler l'expérience nécessaire pour devenir le dirigeant du changement dont le parti a besoin» (Yoël Marcus).
En effet, Amir Peretz est un dirigeant authentique, stable, plus à jour qu'on ne le dit, des besoins de l'économie moderne d'Israël. Plus important, encore, il est le représentant authentique du million d'adhérents à son syndicat.
Et encore, un des représentants du presque million des israéliens originaires du Maroc (l'Israélien ayant un lien avec le Maroc par son père ou par sa mère ; voire même par son épouse…).
Après la génération des fondateurs de l'Etat d'Israël, de ceux de la génération du Second Israël, on est arrivé à ceux d'Amir Peretz, ancien maire de la ville de Sdérot proche de Gaza, une petite cité typiquement marocaine. Il est un dirigeant authentique sorti du terrain, et à ce titre «il a des chances de conduire le troisième chamboulement de l'histoire d'Israël.
C'est pourquoi, malgré sa moustache, le Marocain Amir Peretz ne mérite aucune raillerie», a également écrit Yoël Marcus.