Fête du Trône 2006

Billet : L'Amérique et nous

24 Février 2005 À 16:09

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, l'Amérique de George Bush veut séduire le monde, mais le monde -nous compris- fuit cet «amer-hic», mais rêve toujours des Etats-Unis du monde libre et juste, où règnent la prospérité, l'égalité des races et la liberté des cultes. Si aujourd'hui, l'Amérique renvoie l'image d'une grande nation au repos, son Président ne veut pas être au chômage.

Cette semaine, l'agenda de Bush fut bien chargé, à Bruxelles. Après «un dîner de travail» en tête-à-tête avec Jacques Chirac, le Président de la toute première puissance du monde devait retrouver l'ensemble des chefs d'Etat européens au siège de l'Otan, rendre visite à Gerhard Schröder (mercredi), puis rencontrer Vladimir Poutine à Bratislava hier jeudi, dernière rencontre de ce périple européen avant de s'envoler pour Washington.

Un périple placé sous le signe de la «réconciliation» et une reprise de la «coopération» entre l'Europe et les USA . Les observateurs, y compris le petit monde de notre chère Afrique, disent qu'il est grand temps de s'y mettre, car les contentieux potentiels s'accumulent entre l'Ancien et le Nouveau Monde, sur des sujets aussi divers que «l'attitude à adopter face à Téhéran sur la question du nucléaire» (Washington ne saurait tolérer la détention d'armes de destruction massive par l'Iran), les ventes d'armes à la Chine (la France se propose de lever un embargo «qui n'a plus de sens») et enfin la question libano-syrienne (qui semble la moins problématique depuis l'adoption unanime de la résolution 1559 par l'ONU proposée conjointement par la France et les Etats-Unis). On est tenté de croire que George W. Bush semble, ces jours-ci, déterminé à se «comporter de façon un peu moins unilatéraliste sur les grands dossiers» (l'Irak ne compte plus), mais sur le pétrole, question de vie ou de mort, les tractations ne peuvent être faciles.

A commencer par l'Iran, qui a fourni, selon les informations, pour 20 milliards de dollars de gaz liquéfié à la Chine en 2004, vient de signer avec Pékin un contrat d'exploitation gazier sur vingt-cinq ans d'une valeur estimée à 700 milliards de dollars! Et si l'on y ajoute les fournitures de pétrole, l'Iran, d'après les analystes, va devenir le premier fournisseur d'énergie de l'Empire du Milieu, et, par conséquent, être à l'abri d'un éventuel «embargo économique» que pourraient decréter les USA.

Autre chose qui ne plait pas aux décideurs américains, c'est que la Russie et les ex-républiques soviétiques riveraines de la Caspienne occupent le second rang en tant que fournisseurs de la Chine. Pour faire un raccourci, disant que c'est bien «au cœur de l'Asie Centrale que la Chine va de nouveau se heurter frontalement aux intérêts vitaux de l'Amérique en matière d'approvisionnement pétrolier».

Le nouvel «axe économique Pékin/Tashkent/Ashgabat/Téhéran» qui vient de s'établir, comme l'était autrefois, la «route de la soie» que certains ont vite baptisée la «route de l'or noir» qui semble chambouler au plus haut niveau les intérêts stratégiques de l'Amérique et dicter aussi ce rapprochement Bush-Chirac-Schröder. Poutine, pour l'heure, se contentera de jouer les trouble-fêtes.

Au sujet du pétrole, énergie fossile plus que jamais fatale, on en finira pas d'entendre parler du renchérissement des cours mondiaux et des perspectives noires que cela pourrait provoquer.

Même si le dollar continuera à faire le dos rond face à l'euro, Il sera difficile d'analyser le comportement des marchés pétroliers puisque le seuil des 50 dollars le baril devait être débordé dans les prochains jours. La vague de froid qui s'abat sur l'hémisphère nord sera, sans nul doute, une raison pour chercher de la chaleur dans l'hémisphère sud. Mais l'ordre naturel ne risque-t-il pas de faire les frais d'une frénésie démesurée.
Copyright Groupe le Matin © 2025