Dernière édition des Dicos d'Or : les acrobates de l'orthographe à l'académie Fratellini
Le plus périlleux dans la dictée de Bernard Pivot pour la finale des Dicos d'Or 2004, ce ne fut pas le "schibboleth" ou le "breitschwanz" -encore que...- mais plutôt "aucuns frais" (aucuns avec un s). Trois candidats -un professeur de lettres de Dijon, un
24 Janvier 2005
À 15:40
Ils devaient également répondre à des questions de langue française destinées à les départager. Chez les seniors professionnels, le trophée d'Or revient à Karim Andréys-Kéroui, 35 ans, Dijon (Bourgogne), professeur de lettres classiques, qui a réussi 0 faute à la dictée et 0 faute aux questions. Il a prévenu ses élèves de 3e : "Ca va repartir de plus belle avec les dictées!".
Il s'agissait pour Bernard Pivot de la dernière édition des Dicos d'Or, lancés en 1985 avec le soutien du Crédit Agricole, France 3, Larousse et Lire. Toutefois, une ultime rencontre aura lieu en novembre pour départager lequel des champions d'orthographe des 19 dernières années est un superchampion.
Sous le chapiteau en dur de l'académie Fratellini (Seine-Saint-Denis), où étaient réunis les 187 finalistes, bien des acrobates de l'orthographe tombèrent dans les filets des "bienfaits de la gymnastique".
L'exercice de la dictée, diffusé dimanche en fin d'après-midi sur France 3, avait été enregistré la veille dans la toute nouvelle académie Fratellini, centre de formation aux arts du cirque inauguré en mai dernier près du Stade de France.
Entre deux numéros de voltige de jeunes athlètes (le mot figurait dans la dictée) à couper le souffle, les personnalités invitées purent méditer, elles aussi, sur les mérites des équilibristes de l'orthographe.
Il y avait là Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture, qui se prit les pieds dans un accord de participe passé, ou Hélène Carrère d'Encausse, Secrétaire Perpétuel de l'Académie française, qui riait d'avoir trébuché à cinq reprises. Immortelle, mais pas infaillible!
Egalement en piste, Renaud Dutreil, ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat, Marc Tessier, président de France Télévisions, Rémy Pflimlin, directeur général de France 3, Paul Fratellini, président de l'académie éponyme, l'écrivain Philippe Claudel.
Seuls trois finalistes, un professeur de lettres classiques, un informaticien et un typographe retraité parvinrent au "zéro faute", sur un texte mêlant calembours, termes liés à l'exercice physique, mais pas seulement.
Les néophytes apprirent ainsi que le "schibboleth", provenant de l'hébreu, signifiait "l'épreuve décisive qui fait juger de la capacité d'une personne". Et que le "breitschwanz" est tout simplement une variété d'astrakan.
Un quart des participants n'avait manifestement jamais pratiqué le cheval d'arçons (avec un s et, si l'on veut, un trait d'union) et largement autant ignoraient tout de "l'ascèse". La faute à la société de consommation?
Il fallait écrire la silhouette "fusiforme" (en forme de fuseau) -et non "fusilforme", comme certains l'imaginaient, qui pensaient peut-être à la position en chien de fusil- et se rappeler que l'urticaire est féminine et l'érythème masculin.
Les candidats "juniors" eurent plus de mal avec le "saindoux" -qu'ils n'ont pas connu- qu'avec les "sushis", de plus en plus répandus, et, comme les "cadets" et les "seniors", durent se rendre à l'évidence : dans "aucuns frais", aucuns prend un "s", puisque "frais" est toujours au pluriel.
Au total, 187 finalistes avaient été sélectionnés parmi les 4.826 participants de la finale régionale du 27 novembre, répartis en 6 catégories : "cadets Lire" et "cadets scolaires" (jeunes de moins de 15 ans), "juniors Lire" et "juniors scolaires" (jeunes entre 15 et 18 ans), "seniors professionnels" (plus de 18 ans et ayant qualité de spécialistes de la langue française) et "seniors amateurs" (autres participants de plus de 18 ans).