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Des dizaines de milliers d'emplois fictifs : Le gouvernement traque les fonctionnaires fantômes

La chasse aux fonctionnaires fantômes est bel et bien lancée. Ceux-ci ont été décrits comme relevant des services de l'Etat ou des collectivités locales qui ne rejoignent pas leurs lieux de travail, ceux qui s'absentent en permanence ou encore ceux qui n'

15 Mars 2005 À 19:42

Cette opération pourrait déboucher sur la radiation des salariés occupant des emplois fictifs. Le chiffre «de plus de 80.000 personnes, soit plus de 17% de l'effectif de l'Administration, évalué à 540.000» est avancé, représentant une perte pour l'Etat de plusieurs millions de dirhams.

En effet, nombreux sont les cas de fonctionnaires percevant le double de leur salaire, ou des primes et indemnités non conformes à leurs emplois, sans compter les morts et les personnes en disponibilité ou en abandon de poste qui continuent d'être payés avec la complicité des gestionnaires de leurs départements. Ces fonctionnaires fantômes se retrouveraient dans les plus gros ministères, l'Education nationale et l'Intérieur. Selon les statistiques du ministère de l'Intérieur, le personnel des collectivités locales est passé de 30.000 en 1977 à 143.000 en 2002 avec un taux d'encadrement très faible de l'ordre de 5%. D'après une étude faite par le Dr.

Ali Sedraji, professeur à la faculté de droit, Université Mohammed V et directeur de l'UFR des sciences administratives et développement institutionnel, la contrainte majeure des collectivités locales est la masse salariale. Dans certaines villes, elle représente plus de 80 % des recettes. Du reste, les communes sont devenues des organismes d'assurance chômage; le cas de Casablanca est édifiant en la matière en ce sens où sur 25.000 agents du personnel communal recensé dernièrement, 7.000 font partie de ce que l'on appelle des fonctionnaires fantômes, payés pour ne rien faire.

Aussi, le cas de ce fonctionnaire qui, après enquête, s'est révélé être un ingénieur d'Etat actuellement installé au Canada, qui est-il toujours présent dans les esprits. Sans aucun remord, tout en menant une vie paisible, et certainement aisée, en Amérique du Nord, il a continué pendant des années à percevoir son salaire de fonctionnaire. Lequel salaire lui était viré mensuellement sur son compte bancaire.

Aujourd'hui, le gouvernement décide de procéder au recensement strict de ces fonctionnaires fantômes, à la suspension du versement de leurs salaires mensuels et à la mise en application de "dispositions législatives et réglementaires" à leur égard.

Les différentes administrations de l'Etat vont poursuivre la détection et la répression des fonctionnaires fantômes. Le communiqué de la primature précise que des sanctions de radiation seront prises à l'encontre de tous ceux ayant quitté leur fonction ou abandonné leur poste sans aucune justification juridique. Il ajoute que lors d'une réunion présidée lundi par Driss Jettou à Rabat « le Premier ministre a mis l'accent sur la détermination du gouvernement à lutter avec force contre ce phénomène qui porte préjudice aux principes de bonne gestion, donne lieu à la dilapidation des deniers publics et ternit l'image de l'administration ».

Les fonctionnaires fantômes ont été décrits comme relevant des services de l'Etat ou des collectivités locales qui ne rejoignent pas leurs lieux de travail, ceux qui s'absentent en permanence ou encore ceux qui n'accomplissent aucune tâche ou mission au profit de leur administration. Pour éradiquer ce fléau qui ronde l'administration, tous les syndicats prônent l'encouragement des départs volontaire en retraite anticipée moyennant la mise en place d'une indemnisation exonérée d'impôt, en procédant par ailleurs, au licenciement des fonctionnaires fantômes qui seront immédiatement remplacés par de nouvelles compétences nationales parmi les jeunes diplômés chômeurs.

Historique : La chasse est ouverte
En avril 2003, Najib Zerouali, alors ministre de la Modernisation des secteurs publics nous avait dans un entretien que son département avait entrepris de recenser les fonctionnaires de l'Administration pour « disposer de données sur l'ensemble des fonctionnaires avec la définition exacte de leur qualification. Il s'agit, avait-il précisé, de savoir qui est vraiment fonctionnaire et de disposer du nombre de ceux qui se prétendent l'être sans pour autant fournir un travail quelconque.

Fonctionnaires fantômes, il fallait les mettre dehors. « Il faut bien qu'il y ait une rationalisation de la dépense publique. Vous ne pensez tout de même pas que l'Etat va payer des fonctionnaires qui ne sont pas là ».
Préalablement à cette action, le ministère des Finances avait, pour sa part, introduit des réformes dans le GIPE (système de Gestion intégrée du personnel de l'Etat) et la GID (Gestion intégrée de la dépense).

Ce département qui avait élaboré un Plan d'action structurel (PAS), commençait à accorder une «attention particulière à la rationalisation de la gestion du personnel».
C'est qu'avec un montant de 53,34 milliards de dirhams en 2003, pour un effectif de l'ordre de 800.000 fonctionnaires, «les dépenses de personnel constituent le poste le plus important du budget général de l'Etat» loin devant le service de la dette publique (41,76 milliards de dirhams) et des dépenses d'investissement ( 19,55 milliards de dirhams).

Se fixant comme ultimes objectifs de normaliser des règles de gestion, tout en simplifiant les procédures et les circuits administratifs, de nombreuses initiatives ont été ainsi prises en faveur de la GIPE et de la GID. Et c'est justement dans ce cadre qu'il importe de placer le processus d'encouragement au départ anticipé à la retraite du personnel civil de l'Etat, qui devrait concerner un effectif estimé à 63.200 agents, dont la totalité des agents comptent 30 années ou plus d'ancienneté (40 500) et 15% de l'effectif ayant accompli moins de 30 années (21.800 agents).

80.000 fantômes
dans l'Administration

Pendant longtemps, l'administration publique et les collectivités locales ont servi de réceptacles au clientélisme et aux prébendes.
Selon des informations de presse, le recensement physique des fonctionnaires pourrait déboucher sur la radiation des salariés occupant des emplois fictifs. Le chiffre «de plus de 80.000 personnes, soit plus de 17% de l'effectif de l'Administration, évalué à 540.000», est avancé.

Ces «fonctionnaires fantômes» se retrouveraient dans des ministères budgétivores comme l'Education nationale et l'Intérieur.

4,4 milliards de dirhams pour
l'«Intilaka»

L'amélioration de l'efficacité de l'administration peut-elle se faire autrement que par des réductions budgétaires? L'approche choisie confirme que c'est cette option qui a actuellement le vent en poupe.

preuve, les responsables du gouvernement ont lancé une vaste de campagne incitant au départ les fonctionnaires civils de l'Etat. Le ministre des Finances et de la Privatisation a indiqué à ce propos que "la réforme de l'administration publique au Maroc est devenue une exigence impérative pour que le pays puisse faire face aux enjeux résultant des mutations de l'environnement international marqué notamment par l'ouverture des marchés et l'accélération des processus de modernisation ".

Pour y arriver, environ 30.000 fonctionnaires de l'administration publique, dont 6.000 n'ont pas encore atteint l'âge de la retraite anticipée, sont concernés par l'opération des départs volontaires, qui de l'avis des promoteurs du projet permettra d'avoir un impact positif sur la masse salariale, en ce sens que celle-ci sera de l'ordre de 60 milliards DH en 2005, soit 12,5 % du Produit Intérieur Brut (PIB). Le gouvernement a ainsi met en place des mesures incitatives visant à favoriser les départs volontaires.

Parmi ces mesures, l'on cite l'élargissement du champ de son application pour englober toutes les catégories de fonctionnaires, y compris ceux ne remplissant pas les conditions de la retraite anticipée, sachant bien que ces derniers peuvent demander la récupération des cotisations versées à la CMR.

Ces mesures concernent également la comptabilisation de la prime de départ sur la base d'un mois et demi de salaire pour chaque année de travail exonéré d'impôt, avec un plafond de 36 mois pour les fonctionnaires classés à l'échelle 6 et plus. Cette opération portera de 15 à 100 % le quota des fonctionnaires désireux de partir en retraite anticipée.

Ces mesures incitatives comprennent la prise en compte de la pension de retraite des anciens fonctionnaires sur la base de 2 % du salaire de base et des indemnités fixes jusqu'à l'âge légal de retraite et sur la base de 2,5 % du salaire de base et des indemnités fixes qu'ils percevaient en quittant la fonction publique après avoir atteint l'âge légal de retraite.

Le montant global des indemnisations de ces fonctionnaires devrait atteindre 4,4 milliards de dirhams. Si ces fonctionnaires, dont l'âge varie entre 45 et 59 ans, choisissent de poursuivre leur carrière au sein de la fonction publique jusqu'à l'âge réglementaire de départ à la retraite, la masse salariale de cette catégorie s'élèvera à 27 milliards de DHS.

L'opération a débuté le 1er de ce mois de janvier et devra prendre fin le 30 juin 2005`

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