Harry Potter est-il dangereux pour la jeunesse?
AFP
18 Novembre 2005
À 16:18
Succès mondial de l'édition, les aventures de l'enfant-sorcier Harry Potter sont-elles nocives pour la jeunesse?
C'est ce que prétendent quelques critiques américains, proches de la droite chrétienne, alors que le 4e épisode de la saga de l'écossaise J.K. Rowling à être adapté à l'écran, «Harry Potter et la Coupe de Feu», sortait vendredi au cinéma.
Steve Wohlberg, un prédicateur chrétien habitué des radios d'extrême droite, est parti en guerre contre le jeune sorcier, l'accusant ni plus ni moins d'être le diable.
Harry Potter, «c'est vraiment le diable contre un diable (Voldemort) encore plus grand. Ce n'est pas le bien contre le mal», a estimé Wohlberg dans un livre consacré aux «forces obscures de la spiritualité». «L'histoire d'Harry Potter enseigne aux jeunes enfants qu'on peut être une bonne sorcière ou un bon sorcier», a-t-il ajouté.
Le cardinal Ratzinger, futur pape Benoît XVI, avait estimé en 2003 que Harry Potter «désagrège l'esprit du christianisme», selon des propos rapportés par une sociologue et fervente catholique allemande, Gabriele Kuby.
Auteur d'un livre critique «Harry Potter, le bien ou le mal», Mme Kuby a publié, sur son site internet, des extraits d'une lettre du cardinal Josef Ratzinger adressée le 7 mars 2003, à qui elle avait envoyé son ouvrage. «Merci pour votre livre instructif», écrit-il. «Il est bon que vous fassiez la lumière sur Harry Potter dont le subtil pouvoir d'attraction a un impact profond sans que l'on s'en rende compte et désagrège l'esprit du christianisme», selon un extrait rendu public par Mme Kuby.
Face à ces critiques, les défenseurs de l'apprenti-sorcier rétorquent qu'il s'agit «d'arguments idiots».
«C'est stupide, Potter est un héros qui accomplit un ensemble de choses très morales», estime Melissa Agnelli qui dirige un site internet d'admirateurs du jeune sorcier.
Reste que, selon l'association des bibliothèques américaines, des associations de parents s'inquiètent du paganisme qu'elles croient déceler dans les pages des aventures du héros préféré de leur progéniture.
Verlyn Flieger, professeur d'anglais à l'Université du Maryland, ne partage pas ces craintes. «Je pense que ceux qui s'inquiètent de quelque chose de satanique ou d'occulte dans les histoires d'Harry Potter ne comprennent pas l'usage de la métaphore», dit-elle.
Rowling elle-même, dans un entretien à une radio américaine en 1999, avait déclaré: «si on interdit tous les livres pour enfants qui mentionnent des épisodes magiques, des sorcières et des sorciers, il faudrait retirer des rayons les trois quarts des livres classiques pour enfants».
Cela ne désarment pas les critiques. Selon Richard Abanes, autre pourfendeur du jeune sorcier, Rowling envoie à ses jeunes lecteurs «des messages moraux qui ne sont pas clairs». «Harry Potter et ses amis mentent, volent, trichent, sont rancuniers, hypocrites et manquent d'honnêteté», dit-il. Wohlberg confirme que le jeune sorcier est «un personnage qui ment beaucoup, ne respecte pas la loi, est capricieux, étudie les sciences occultes et lance des formules magiques».
Toutes choses condamnables selon lui. Avocate de la défense, Agnelli explique que si Potter «viole les règles» c'est pour faire «quelque chose de plus important comme sauver une vie ou aider un ami».